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La Bourse égyptienne a besoin de sang neuf

Gilane Magdi, Mardi, 17 mars 2020

La 5e Conférence du marché financier a eu lieu la semaine dernière au Caire. Les participants ont discuté des difficultés actuelles de la Bourse, tout en proposant diverses pistes pour la revivifier. Compte-rendu.

La Bourse égyptienne a besoin de sang neuf
Les experts du marché financier appellent au soutien du gouvernement à la Bourse égyptienne.

« Marché financier, fenêtres de financement multiples », tel était le titre de la 5e Conférence du marché financier, tenue au Caire le 10 mars sous la houlette de la Bourse égyptienne, des ministères des Finances et de la Planification et du journal économique Dailynews. Au cours de 4 sessions, les participants — de hauts responsables, des experts et des dirigeants de banques d’investissement, telle Beltone Holding — ont discuté de l’actuelle situation de la Bourse égyptienne, qui souffre d’une instabilité des échanges et d’une baisse de ses indices et est à la recherche de nouveaux moyens de financement.

« La volatilité des marchés est naturelle en temps de crise. Si nous regardons dans le passé, par exemple la crise dite du mardi noir en 1987 et la crise financière mondiale de 2008, nous verrons que les marchés mondiaux se sont toujours remis vite de telles fluctuations. Le plus important actuellement est de sortir vite de cet état de volatilité pour qu’on puisse poursuivre nos affaires », a déclaré le président de la Bourse égyptienne, Mohamad Farid, au moment d’inaugurer la conférence. Il a expliqué l’actuel état d’instabilité par des causes externes, liées à l’expansion du coronavirus et aux discussions entre producteurs et consommateurs concernant le niveau de production mondial du pétrole.

La conférence a eu lieu au lendemain du « lundi noir », pendant lequel tous les indices boursiers ont connu une forte baisse, notamment l’indice EGX 30 (-7,31 %, pour atteindre 10 983 points) et l’indice EGX 70 pour les petites et moyennes actions (-5,04 %, pour atteindre 1 083 points). La Bourse a par ailleurs interrompu les échanges durant une demi-heure pour freiner les pertes des investisseurs. Les participants à la conférence ont attribué cette chute non seulement à l’impact du coronavirus, qu’ils considèrent comme une cause temporaire, mais aussi à des causes structurelles liées à la Bourse elle-même. « Le corona a frappé le marché monétaire, mais les baisses l’ont précédé et l’ampleur de l’impact est principalement due à la faiblesse du marché local lui-même », a noté Rana Al-Adawy, PDG du Fonds d’investissement Acumen. Une opinion partagée par l’ex-président de l’Organisme du marché financier, Ahmad Saad, qui a noté que le marché boursier avait perdu 22 % depuis le début de 2020, « amenant son indice principal, le EGX30, à son plus bas niveau depuis la libéralisation du taux de change il y a 4 ans ».

Des problèmes structurels à surmonter

Les participants imputent la dégradation de la situation boursière à deux causes principales : la première est liée à l’imposition de taxes sur les transactions et à l’augmentation des restrictions sur les échanges. « L’imposition de droits de timbre et d’impôts sur les gains en capital et les distributions représente une charge supplémentaire pour les investisseurs. Au cours des trois dernières années, les recettes des taxes imposées en Bourse se sont élevées à 1,75 milliard de L.E., alors que la capitalisation de la Bourse a perdu plus de 500 millions de L.E. en termes de valeur durant cette période », a expliqué Mohamad Maher, PDG de la banque d’investissement Prime holding.

Maher a ajouté que l’augmentation du nombre de régulations risquait de mener à une situation de « surrégulation » de la Bourse. A cela s’ajoute l’absence d’avantages comparatifs pour l’enregistrement des sociétés en Bourse en échange d’une exonération, comme c’était le cas dans le passé. « Toutes ces restrictions sur le marché boursier ont rendu celui-ci plus fragile, avec un niveau de liquidité plus modeste », a indiqué Maher. On a ainsi vu le nombre d’entreprises cotées en Bourse baisser. Selon Ahmad Saad, ce nombre est actuellement de 240 entités, contre 1 700 il y a une quinzaine d’années.

La deuxième cause est liée à la baisse de la liquidité et de la valeur quotidienne des échanges en Bourse. « Au cours des 6 dernières années, la valeur quotidienne des échanges a fortement baissé, passant d’un milliard de L.E. en 2017-2018 à 650 millions de L.E. en 2019, soit une baisse de 35 % », a expliqué Amr Al-Alfi, président du département des recherches au sein de la maison de courtage Shuaa Egypt. Al-Alfi attribue la faiblesse de la liquidité à la pénurie de l’offre des entreprises cotées en Bourse et insiste sur l’importance d’attirer de nouveaux investisseurs. « L’inclusion financière ne dépend pas seulement des banques ; elle nécessite davantage que de la publicité et que les personnes soient dirigées vers des fonds d’investissement et non vers des sociétés de courtage », a-t-il souligné.

Al-Alfi a présenté une comparaison qu’il a effectuée entre les dépôts, les bons du Trésor du gouvernement et la Bourse en termes de rendement annuel. « Au cours des 15 dernières années, le rendement moyen en Bourse était de plus de 14 %, contre 10,57 % pour les dépôts et 10,4 % pour les bons du Trésor », a-t-il expliqué. Selon lui, cela montre la nécessité de changer la vision des investisseurs pour qu’ils considèrent la Bourse comme un canal d’investissement à long terme. « Les compagnies d’assurance et de retraite doivent jouer leur rôle pour collecter l’épargne individuelle et l’investir », a-t-il proposé.

Plus d’attention pour la Bourse

Pour sa part, le PDG de Prime holding a indiqué aux participants qu’il avait analysé, avec la ministre de la Planification, les problèmes du marché financier lors d’une rencontre tenue la semaine dernière. « Et elle a promis de trouver des solutions. Mais la Bourse est désormais devenue sans propriétaire, car elle dépendait du ministère de l’Economie à une époque, puis du ministère de l’Investissement, qui a été supprimé récemment. Et l’Autorité de surveillance financière ne peut soutenir le marché qu’avec les ministères compétents », a dit Maher.

Le gouvernement a reporté plusieurs fois son programme d’introduction en Bourse d’entreprises publiques en raison du prix modeste des actions et de la baisse des échanges. « Le programme d’offre du gouvernement est lié aux prix du marché, qui ont atteint leur plus bas niveau actuellement », a noté Al-Alfi. Or, le ministre du Secteur public des affaires, Hicham Tawfiq, a annoncé la semaine dernière l’introduction de trois entreprises publiques avant l’été. « Ces entreprises sont Alexandrie pour l’échange des cargaisons, la Banque du Caire et la société de paiement e-finance », avait-il déclaré.

Pour sa part, le vice-président de la société Mubasher, Ihab Rachad, a appelé le gouvernement à accorder plus d’attention à la Bourse égyptienne, d’autant plus que l’argent public est le plus grand actionnaire des sociétés cotées. « Soutenir l’investissement en Bourse par le biais d’un ensemble d’initiatives présentées par la Banque Centrale est devenu important en vue d’attirer des investisseurs étrangers », a souligné Rachad.

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