Faire développer le secteur industriel, donner plus de poids aux petites et moyennes entreprises et accroître le rôle des banques dans le domaine de la transformation digitale et d’inclusion financière. Telles sont les recommandations les plus importantes des participants au premier Sommet économique tenu le 12 novembre au Caire. Cet événement important a rassemblé des responsables gouvernementaux, les dirigeants d’entreprises publiques et privés, ainsi que d’experts opérant dans les secteurs-clés de l’économie égyptienne, tels les banques, les télécommunications et l’industrie. Les participants ont tous salué les progrès de l’économie égyptienne au niveau des indicateurs macroéconomiques, en mettant le point sur les plans de travail dans les différents secteurs durant la prochaine période. Et ce, après la fin du programme de réforme économique entamé en novembre 2016 avec le Fonds Monétaire International (FMI), basé sur la réduction du déficit budgétaire, la réduction des subventions d’énergie et la libéralisation de taux de change.
« Nous avons terminé ce programme avec le FMI, mais nous sommes en milieu du chemin », a noté Hani Serieddine, président honorifique du Sommet économique à l’issue de l’inauguration de cet événement.
Au niveau des indicateurs, l’économie égyptienne a atteint un taux de croissance de 5,6 % pour l’exercice budgétaire 2018-2019 et dans le premier trimestre de cette année 2019-2020. Il s’agit du taux de croissance le plus élevé en 11 ans et l’un des plus élevés au monde cette année. Outre les chiffres, la croissance économique a ainsi connu d’importants changements, étant désormais dominée par les investissements et les exportations nettes, qui ont représenté ensemble 81 % de la croissance réalisée au cours de l’année. Alors qu’auparavant, la consommation était la principale source de croissance du PIB en 2018-2019. « L’objectif principal de tout programme de réforme économique est d’éliminer la pauvreté. Le fait d’atteindre un taux de croissance économique élevé est une bonne chose, mais il doit d’abord être durable et parvenir à une croissance inclusive qui suppose un partage équitable des dividendes de la croissance entre individus et groupes sociaux », souligne le président de la Bourse du Caire et d’Alexandrie, Mohamad Farid.
Limiter les importations
Les participants au sommet ont insisté sur l’importance de se concentrer sur le développement sectoriel durant la prochaine période pour garder la durabilité des taux de croissance. Le secteur industriel, qui participe à 17 % du PIB, vient en tête des secteurs économiques prioritaires. C’est pourquoi une séance y a été consacrée, une séance au cours de laquelle les participants ont mis le point sur la situation actuelle du secteur et les préparatifs du gouvernement à la 4e révolution industrielle. « Nous avons déjà commencé à entreprendre les préparatifs nécessaires au cours des trois dernières années, que ce soit au niveau de la législation ou celui de l’infrastructure », a noté Magdi Ghazi, président de l’Autorité générale du développement industriel, en expliquant que l’absence d’une législation spécifique pour le secteur industriel représentait un grand défi pour l’attrait des investissements étrangers. « C’est pourquoi le parlement a promulgué, il y a deux ans, la loi facilitant les procédures d’obtention des licences. Selon la loi, la période de l’obtention des licences pour exercer l’activité industrielle n’est plus qu’une semaine pour les industries à risques minimes et d’un mois pour celles à risques élevés contre 2 ans auparavant », souligne-t-il, en ajoutant que le lancement du portail électronique de la carte industrielle, qui fournit un haut degré de transparence et une rapidité dans la spécification des terrains industriels pour les investisseurs étrangers et nationaux, représente aussi un progrès dans ce domaine.
Ces mesures interviennent dans le cadre d’une politique nationale visant à développer le secteur industriel au niveau des grandes entreprises, mais aussi des PME. L’objectif est d’augmenter les composants locaux et de limiter les importations. « Raison pour laquelle nous avons lancé le programme national pour l’industrie locale 2019-2024, visant à augmenter la compétitivité des produits locaux et inciter les investissements consacrés au secteur industriel », souligne le ministre du Commerce et de l’Industrie, Amr Nassar. Selon lui, ce programme est basé sur des piliers importants : l’intégration des chaînes de valeur ajoutée pour le marché intérieur, le renforcement de la coopération entre les fabricants et les fournisseurs locaux, la mise en relation de l’industrie locale avec les chaînes de valeur des marchés étrangers.
Quel sera donc l’avenir du secteur durant la prochaine période ? Ghazi a présenté le plan de l’organisme pour faire développer le secteur industriel durant la prochaine période. « La stratégie de l’organisme est basée sur la modernisation des zones industrielles en installant l’infrastructure nécessaire. De même, la création des nouvelles zones industrielles doit se baser sur le principe de la spécialisation afin que les industries spécifiques et leurs industries complémentaires soient installées dans la même zone. Ceci aura un impact économique important sur l’exploitation des ressources et des composants de chaque région et fournit une commercialisation aisée des produits », renchérit-il.
Intérêt particulier aux PME
En ce qui concerne les PME, le président de l’Autorité de développement industriel a révélé son intention de créer des parcs industriels dans les différents gouvernorats de la République, au nord et au sud, en fonction des ressources, des composants et des avantages comparatifs de chaque gouvernorat. « 13 nouveaux complexes industriels seront lancés d’ici avril 2020 », prévoit Magdi Ghazi.
Les banques vont allouer 20 % de leurs portefeuilles de crédit aux PME d'ici 2020. (Photo : Al-Ahram)
Le développement du secteur industriel ne se limite pas à installer le cadre législatif ou à créer des zones industrielles, mais il comprend aussi la mise en place d’une liste de produits qui devraient être fabriqués par les nouvelles entreprises. C’est ce qu’a révélé la présidente de l’Organisme des petites et moyennes entreprises, Nevine Gamae, en notant que cet organisme analysait la liste des produits importés et manufacturés localement. « Nous avions commencé à accomplir cette tâche dès le début de cette année et nous avions découvert que la majorité des biens importés dans le domaine industriel peuvent être fabriqués en Egypte. C’est pourquoi nous avons décidé, en coopération avec l’Autorité de développement industriel, de diriger les jeunes qui veulent créer leurs propres projets à se spécialiser dans ces types de produits. Et ce, en vue de baisser leurs importations dans l’avenir pour maximiser les gains de l’économie égyptienne », explique t-elle, en ajoutant que l’autorité fournit des projets à tous les secteurs économiques, tels l’agriculture, les services, l’élevage et l’activité industrielle. « Le secteur industriel est désormais au centre de nos préoccupations au sein de l’autorité, dans la mesure où il peut créer des emplois aux jeunes », renchérit-elle.
Or, il sera très difficile de réaliser les plans précédents à l’écart du secteur bancaire. Ce dernier, sous la surveillance de la Banque Centrale d’Egypte (BCE), va allouer 20 % du portefeuille de crédits des banques égyptiennes aux PME d’ici 2020. « L’objectif est de mobiliser toutes les ressources financières vers ces projets, qui sont considérés comme étant les principaux piliers de l’exportation et de la localisation de l’industrie locale », explique le président de la banque du Canal de Suez, Hussein Al-Réfaï. Il a ajouté que la BCE était intéressée non seulement par le financement des PME, mais aussi par leur soutien par le biais de l’Initiative des pionniers du Nil. Selon cette initiative, un groupe important de banques s’est associé à l’Université du Nil pour soutenir les entrepreneurs au niveau technique et financier.
Le financement des PME intervient dans le cadre de la politique gouvernementale basée sur deux piliers : le premier est l’inclusion financière qui vise à faire intégrer toutes les couches défavorisées au sein du secteur bancaire, tout en offrant une gamme de produits et de services financiers et non financiers. Le second est la transformation numérique visant à offrir les services bancaires via les moyens de paiements électroniques. « Aujourd’hui, le secteur bancaire possède un surplus de liquidités qui doit être injecté dans le secteur privé, y compris les PME. Mais ces derniers n’ont pas seulement besoin de financement. Ils ont besoin aussi de services bancaires, telle l’ouverture des comptes à des frais abordables dans le cadre de l’inclusion financière », explique-t-il, en concluant que le portefeuille des crédits accordés aux PME a atteint 13 milliards de L.E. en 2019.
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