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Ibrahim Al-Ashmawy : La Bourse des marchandises va permettre de réduire le taux d’inflation

Gilane Magdi, Mardi, 29 octobre 2019

Ibrahim Al-Ashmawy, premier adjoint du ministre de l’Approvisionnement et président de l’Appareil du développement du commerce intérieur, revient sur le lancement de la Bourse des marchandises et son rôle pour contrôler la fluctuation des prix des biens stratégiques.

Ibrahim Al-Ashmawy
(Photo : Mohamad Adel)

Al-Ahram Hebdo : Le ministère de l’Approvisionnement, en coopération avec la Bourse égyptienne, a annoncé la fin des études de faisabilité en vue de la création de la Bourse des marchandises, pouvez-vous nous décrire son utilité ?

Ibrahim Al-Ashmawy : La Bourse des marchandises ou la Bourse du commerce sert de point de rencontre entre les producteurs d’un bien stratégique et les acheteurs, dans le but de conclure leur transaction sans intermédiaires. En suivant le parcours de l’agriculteur depuis l’étape de la récolte jusqu’à la vente des produits (céréales, légumes, fruits), on constate qu’il y a une longue chaîne de commerçants intermédiaires qui réalisaient de grands profits, ce qui entraîne la hausse des prix. Par exemple, le prix initial de la banane au moment de la récolte ne dépasse pas une livre égyptienne, alors que son prix de vente s’élève à 15 L.E. dans un quartier comme Madinet Nasr à cause des intermédiaires. Imaginez la situation lorsque le marchand de bananes inscrira le volume de la récolte et le prix demandé sur les écrans de la Bourse des marchandises. De l’autre côté de l’écran, apparaîtront les acheteurs potentiels qui cherchent cette même quantité à un prix déterminé. Dès que les deux parties se mettent d’accord sur la quantité et le prix, ils seront en mesure de conclure la transaction. Donc, la Bourse des marchandises sert à éliminer les intermédiaires entre les producteurs et les acheteurs pour que le bien soit vendu directement au consommateur à un prix abordable. La Bourse des marchandises non seulement amènera une baisse des prix de l’ordre de 20 à 25 %, elle éliminera également les pratiques monopolistiques.

— Les Bourses en général sont de nature spéculative, comment serait-il possible dans ce contexte de contrôler les prix ?

— La Bourse des marchandises est différente de la Bourse des titres financiers qui est de nature spéculative. Dans la première, l’échange porte sur un bien qui existe alors que dans la seconde, l’échange porte sur un actif, donc une valeur qui n’est pas palpable. Il existe deux types de Bourse des marchandises : la Bourse à terme où les prix ne sont réglés qu’à une date ultérieure, car il n’y a pas de livraison immédiate, et la Bourse au comptant (Spot Market) où les actifs négociés sont livrés dès la conclusion de la transaction. Donc, le produit est prêt à être échangé immédiatement. Nous allons commencer par introduire ce modèle, le Spot Market, en Egypte. L’objectif est de créer une Bourse qui offre au consommateur un bien de qualité à un prix abordable sans être soumis à des hausses injustifiables ou spéculatives.

— Cette Bourse sera-t-elle capable de contrôler les prix des biens stratégiques et donc de freiner l’inflation qui préoccupe les Egyptiens ?

— Oui, bien sûr. Nous prévoyons une baisse des prix des biens qui sera de l’ordre de 20 à 25 % par rapport aux prix actuels. Ensuite, nous pensons pouvoir augmenter l’offre sur le marché en encourageant les petits agriculteurs à vendre leurs produits et en incitant les grands commerçants à ne pas stocker leurs marchandises pour les vendre à des prix plus élevés. Pour parvenir à cette fin, l’Organisme de développement du commerce interne créera un centre d’informations qui collectera toutes les données sur la production et la récolte. En examinant le panier des marchandises incluses dans l’indice des prix à la consommation, on trouve que 60 % de ces marchandises sont des produits de base. Au cours des derniers mois, le taux d’inflation a nettement reculé. En réalité, le rythme de fluctuation des prix s’est ralenti. Par exemple, le prix de la viande a augmenté l’année passée de 120 à 125 L.E. seulement, alors que ce prix était passé de 90 à 120 L.E. l’année précédente. Plus le taux de fluctuation recule, l’inflation baisse. Le seul bénéficiaire est le consommateur qui va obtenir sa marchandise à un prix convenable sans être soumis à des augmentations de prix injustifiées en raison du monopole des commerçants.

— Quelles sont les marchandises qui seront échangées à la nouvelle Bourse ?

Notre objectif est d’introduire un panier de biens stratégiques stockables avec notamment les céréales et les légumes. C’est pourquoi nous allons commencer dans la première phase par introduire 4 denrées (le blé, le riz, le maïs et le sucre) et un légume, la pomme de terre ou l’oignon. Nous voulons faire réussir l’expérience pour introduire ensuite d’autres biens, notamment les fruits.

— Comment les marchandises seront-elles cotées en Bourse ?

— Il faut tout d’abord que l’agriculteur possède une bonne expérience dans le domaine de l’agriculture, et il doit disposer de lieux de stockage approuvés par les organismes accrédités, soit par le ministère de l’Approvisionnement ou des maisons d’expertise privées. Les étapes sont simples. Pour commencer, chaque producteur ou agriculteur doit remplir les formulaires nécessaires en indiquant son activité, le type et la quantité de marchandises et les lieux de stockage. Ensuite, viendra le rôle des experts qui vont vérifier la conformité de la marchandise et des lieux de stockage aux normes internationales. Les producteurs payeront des frais d’enregistrement qui seront différents d’un commerçant à l’autre selon la quantité des marchandises. Nous allons faire appel à des agents et des consultants internationaux qui vont répertorier les produits et fixer les prix en fonction de la qualité.

— Quand est-ce que l’idée de la Bourse des marchandises a commencé en Egypte et quand est-ce qu’elle sera opérationnelle ?

— L’idée de la création d’une Bourse des marchandises n’est pas nouvelle, mais la Bourse des marchandises a vu véritablement le jour il y a à peu près six mois. Cela a commencé avec les études de faisabilité effectuées par le ministère de l’Approvisionnement en coopération avec la Bourse égyptienne. Le dimanche 20 octobre, nous avons annoncé la fin de l’étude de faisabilité et nous avons envoyé des lettres aux différents actionnaires disposés à investir dans la société qui dirigera la Bourse. Elle sera chargée de former les courtiers et de superviser les transactions boursières.

— Et qui sont ces actionnaires ?

— La liste comprend des banques d’investissements, comme le groupe financier EFG-Hermes et Beltone Financial, des banques commerciales, comme la banque publique Misr et la première banque privée CIB, l’Union des Chambres commerciales, la Bourse égyptienne, la société Misr Leasing et les développeurs chargés de créer les centres commerciaux, les points de stockage et les zones logistiques selon les normes internationales. La nouvelle entité sera dotée d’un capital de 100 millions de L.E. dans lequel le secteur public détient 60 % et le secteur privé 40 %. Selon l’étude de faisabilité, ce capital sera amorti par l’entreprise en l’espace de 3 à 4 ans. La Bourse du commerce réalisera des profits compris entre 30 et 35 millions de L.E. au cours de la 4e année. Les profits proviendront des commissions payées en échange des transactions, du stockage des marchandises et de la formation des courtiers qui opéreront dans ce nouveau domaine.

— Quel sera le rôle de la Bourse égyptienne et du ministère de l’Approvisionnement ?

— La Bourse égyptienne nous donnera l’expérience requise pour installer la plateforme électronique de la Bourse du commerce. Le rôle du ministère de l’Approvisionnement est essentiel. Il consiste à garantir la qualité des produits et à surveiller les lieux de stockage.

— Les Bourses du commerce existent dans plusieurs pays. Quel est le modèle qui convient le plus à l’Egypte ?

— En faisant l’étude de faisabilité, nous avons étudié les expériences des marchés émergents qui ont créé des Bourses de commerce comme l’Indonésie, l’Inde, la Malaisie et la Turquie. En explorant toutes ces expériences, nous avons trouvé que le modèle indien est celui qui convient le plus à l’Egypte. L’Inde a introduit la Bourse au comptant il y a une quinzaine d’années, et elle a commencé par un panier de biens stratégiques composé de 10 articles. Au cours des années, elle a réussi à contrôler la fluctuation des prix.

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