Le commerce extérieur des différents pays du monde sera le plus touché par le recul de la demande mondiale.
L’économie mondiale se dirige vers des eaux troubles en 2020. C’est ce qu’indique la Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) dans son rapport présenté le 25 septembre dans plusieurs pays du monde, y compris l’Egypte. « La récession en 2020 est désormais un danger évident et d’actualité. Plusieurs grandes économies émergentes sont déjà en récession, tandis que certaines économies développées, dont l’Allemagne et le Royaume-Uni, en sont dangereusement proches », note le rapport, qui prévoit un recul du taux de croissance du PIB au niveau mondial à 2,3 % en 2019, alors qu’il était de 3 % en 2018. Pour le continent africain, la Cnuced prévoit la stabilité de la croissance du PIB à 2,8 % en 2019. Il était au même niveau l’année dernière, et de 2,6 % en 2017.
Le rapport dessine une image pessimiste de l’économie mondiale durant la prochaine période tout en mettant l’accent sur trois points principaux : le contexte mondial, allant de la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis aux tensions géopolitiques, qui ont des répercussions sur le commerce mondial, la question de l’endettement et les risques de la libre circulation des capitaux. Pour ce qui est du commerce mondial, le rapport note qu’il est en mode de décélération. « Après avoir été de 1,3 % en 2016 et de 4,5 % en 2017, la croissance moyenne du volume des exportations mondiales et les importations ont reculé à 2,8 % en 2018. A la fin de cette année, la croissance des échanges commerciaux devrait fortement ralentir, soit à 2 %, suite à l’affaiblissement de la demande mondiale et en raison des tarifs unilatéraux imposés par l’Administration américaine », prévoit le rapport.
Mahmoud ElKhafif, expert économique auprès de la Cnuced à Genève, a indiqué lors d’une conférence de presse tenue le 25 septembre au Caire : « Le cycle économique est dans sa dernière phase dans les pays développés, qui souffrent déjà du ralentissement économique. Cela se traduit par la baisse de la demande relative aux produits de base provenant des pays en développement. A cela s’ajoute l’impact de la guerre commerciale sur les importations chinoises, considérées comme le catalyseur du commerce des différents pays du monde ». Et d’ajouter que les prix des biens principaux sont soumis à la spéculation dans les Bourses de commerce (céréales, métaux, etc.) et non pas à l’offre et la demande. « C’est un grand problème résultant de la mondialisation, qui maximise les répercussions du ralentissement du commerce », explique-t-il. Le rapport révèle le recul de la croissance des importations dans les pays développés : dans l’Union européenne, le taux est par exemple passé de 2,6 % en 2017 à 1,5 % en 2018 et au Japon de 2,6 % en 2017 à 2 % en 2018. Quant au continent africain, le taux de croissance du volume des exportations est devenu négatif en 2018 (-0,6 %), alors qu’il était de 0,5 % en 2016 et de 3,5 % en 2017.
Attention aux dettes
La Cnuced tire aussi la sonnette d’alarme devant le gonflement de la dette mondiale, qui est devenue un moteur dominant de la croissance, sans toutefois permettre d’augmenter fortement l’investissement productif. « Au cours des 38 dernières années, les dettes ont été multipliées par 14, mais malheureusement, cet argent n’est pas injecté dans des investissements productifs. Il alimente surtout la spéculation financière », explique ElKhafif. Le rapport explique que les pays en développement ont vu leurs dettes se transformer d’un instrument de financement à long terme, pour les aider à libérer leur potentiel de croissance, en un actif financier potentiellement à haut risque, soumis aux aléas des marchés financiers internationaux et à la prolifération des intérêts des créanciers à court terme. « En prenant en compte un échantillon de 30 pays en développement, ces derniers subiront une augmentation du ratio dette/PIB pouvant atteindre environ 185 % en moyenne d’ici 2030. Et le PIB doit être de 12 % en moyenne pour répondre aux besoins d’investissement nécessaires pour atteindre les quatre premiers objectifs de développement durable, à savoir l’élimination de la pauvreté, l’amélioration de la nutrition, la santé et l’éducation », indique le rapport.
Concernant le troisième axe, à savoir les risques de la libre circulation des capitaux, le rapport de l’Onu attire l’attention sur le fait que les mouvements de capitaux privés incontrôlés peuvent provoquer un transfert de ressources des pays en développement vers les pays développés et fait valoir que le contrôle des capitaux a toute sa place dans la panoplie des politiques macroéconomiques menées pour atteindre les Objectifs de Développement Durable (ODD). « En réalité, on ne pourra pas orienter le financement vers l’investissement productif à long terme sans que le secteur public joue un rôle de premier plan et sans changer fondamentalement la réglementation des capitaux étrangers privés », estime le rapport.
Les dirigeants et les responsables du monde doivent donc instaurer les politiques nécessaires pour limiter les répercussions négatives de la conjonture mondiale sur leurs économies et leurs peuples.
Lien court: