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Vers un environnement plus propice à l’investissement

Amani Gamal El Din, Mardi, 30 juillet 2019

La loi sur l’investissement de 2017 a été amendée par le parlement égyptien. Objectif : augmenter les investissements étrangers directs et accroître la compétitivité.

Vers un environnement plus propice à l’investissement
Les stimuli sur l'extension d'anciens projets doivent être soumis à des règles strictes de gouvernance.

La loi sur l’investissement n° 72 de l’année 2017 vient d’être amendée. Le texte avait été approuvé il y a deux ans par le parlement égyptien. Au nombre de trois, les amendements prévoient notamment, pour l’extension d’anciens projets, des privilèges et des stimuli similaires à ceux accordés aux projets concernés par la loi de 2017. Sahar Nasr, ministre de l’Investissement et de la Coopération internationale, a justifié les changements par « une ferme résolution de surmonter les défis de l’investissement sur le terrain de la réalité ».

Ces amendements interviennent à un moment où les Investissements Etrangers Directs (IED) en Egypte connaissent une baisse. Selon les bulletins de la Banque Centrale d’Egypte (BCE), les investissements étrangers directs nets en Egypte ont reculé de 24,4 % au cours des six premiers mois de l’année financière 2018-2019. Ils sont ainsi passés de 3,76 milliards de dollars, au cours de la même période en 2017-2018, à 24,4 milliards. Fakhri Al-Feqqi, ex-adjoint du directeur général du Fonds Monétaire International (FMI), estime que ce chiffre n’est pas si inquiétant si l’on prend en compte l’instabilité géopolitique régionale.

Toujours est-il que ce recul a lieu à un moment où le pays vise une croissance de 6 % du PIB pour 2019. Sigma Capital et Beltone Financial prévoient non seulement une baisse des IED en 2019, mais également en 2020. « Les investissements dans les titres publics sur les marchés émergents ont fourni des opportunités attrayantes pour les investisseurs. Le ralentissement de la croissance mondiale, accompagné d’un environnement monétaire serré, a affecté le flux de capitaux sous forme d’IED, qui n’ont pas atteint le chiffre projeté de 7,9 milliards et se sont chiffrés à 7,7 milliards », indique Alyaa Mamdouh, économiste en chef de la banque d’investissement Prime Securities. Ce même scénario est à prévoir pour les années fiscales 2019-2020 et 2020-2021. Les IED atteindront, selon les analystes de Prime, 7,9 milliards et 8,9 milliards de dollars respectivement.

Le gouvernement se trouve donc devant un défi énorme pour atteindre les chiffres projetés en matière de croissance, d’autant plus que les IED sont les moteurs de la croissance, selon les théories économiques. Jihad Azour, directeur du département du Moyen-Orient et du Nord de l’Afrique auprès du FMI, estime que pour parvenir aux chiffres projetés, soit une croissance comprise entre 5,5 et 6 %, l’Egypte doit travailler sur deux volets : améliorer la production et les infrastructures, et accroître sa compétitivité en augmentant les IED. C’est ce qui a incité les responsables égyptiens à amender la loi régulant l’environnement de l’investissement.

Les amendements sont au nombre de trois. Le premier concerne l’article 12 relatif aux mesures incitatives et aux garanties fournis à l’investisseur. En vertu de l’amendement, ces stimuli seront également appliqués à l’extension des projets lancés à des dates précédant la mise en vigueur de la loi. Le second amendement concerne l’article n° 48. Il limite les frais de vérification des contrats, en contrepartie de frais s’élevant à 0,25 % du capital, avec un maximum de 10 000 L.E. ou l’équivalent en devises étrangères. Cet article a fait l’unanimité auprès des députés, car réduisant les frais et facilitant les procédures pour les investisseurs. Auparavant, il n’existait, en effet, pas de plafond relatif aux frais d’enregistrement. Conséquence : ceux-ci représentaient un fardeau pour les entreprises, les empêchant de changer leur mode d’investissement ou d’accroître leur capital, surtout pour celles possédant un grand capital et qui sont obligées de changer à plusieurs reprises leurs règlements, comme l’explique Ayman Hadhoud, consultant économique et en matière d’investissement. Le troisième amendement accorde une nouvelle compétence à l’Organisme de l’investissement, qui aura la responsabilité de publier les chiffres relatifs aux IED.

Maintenir le flux de capitaux

Vers un environnement plus propice à l’investissement

L’amendement de l’article 12 s’adresse aux projets qui cherchent à étendre leurs activités à travers l’établissement de nouvelles lignes de production ou de nouveaux produits. Cet amendement a fait l’objet de discussions, applaudi par certains et contesté par d’autres. Ceux qui y sont favorables estiment que l’application des mesures incitatives est bénéfique pour certains projets, et encourage les investisseurs à injecter de nouveaux fonds. « Les preneurs de décisions veulent, ce qui est correct, maintenir le flux de capitaux et empêcher la sortie des investisseurs avec les rendements que les projets anciens avaient générés », explique Hadhoud.

Ceux qui sont plus réticents, tel Amr Al-Gohari, député et membre du comité économique au parlement, avancent que ces investisseurs bénéficient déjà d’incitations et de garantis depuis plus de 15 ans, allant des exonérations fiscales aux terrains industriels gratuits, en passant par le gaz, l’électricité et même le dollar subventionné. Ce qui est difficile dans un pays qui se trouve sur la voie des réformes économiques structurelles et où les revenus fiscaux se situent en général autour de 80 % du budget. Selon Al-Gohari, il serait plus adéquat d’accorder ces incitations uniquement aux investisseurs qui ont fait leur entrée après le flottement, dans le contexte des conditions économiques difficiles.

Mahmoud Gamal El-Din, investisseur et homme d’affaires, nie catégoriquement la possibilité que ces mesures incitatives ne génèrent de la corruption ou qu’ils pourraient être alloués à de mauvais candidats. « Le problème est celui de l’application. Il faut bien étudier si ces expansions auront un impact concret sur l’économie. Les régulations qui sont actuellement étudiées par le cabinet ministériel doivent ponctuer tout le processus de manière efficace et être fixées de manière à protéger les droits de l’Etat et ceux des investisseurs », indique-t-il. Concernant ce point, la parlementaire et économiste Passant Fahmi déclare : « On a demandé au gouvernement de fixer des règles de gouvernance pour les projets qui sont éligibles à ce genre d’incitations. Nous avons demandé à la ministre de l’Investissement de nous décortiquer le mode de gouvernance et de parler des critères d’éligibilité. Par exemple, les expansions de projets doivent être évaluées selon la production, la main-d’oeuvre, les revenus, les exportations, leur impact sur le PIB, etc. Le conseil des députés doit les approuver. Je veux avoir des indicateurs pour évaluer l’éligibilité des projets sélectionnés ».

Mohsen Adel, président de l’Organisme de l’investissement, a clarifié ce point dans le quotidien Al-Shorouk, indiquant que des régulations sont en train d’être fixées par le Conseil des ministres pour évaluer les expansions de projets sur la base de leur rentabilité et de leur coût, selon des critères méticuleux. Il a aussi déclaré que les mesures incitatives n’étaient pas déterminées par le ministère de l’Investissement, mais par l’Organisme des taxes, qui relève du ministère des Finances. Ces règles doivent en outre déterminer clairement les rôles et les responsabilités du ministère des Finances, de celui de l’investissement et de l’Organisme de la collecte des taxes, pour éviter une interférence des rôles quitte à ralentir le processus.

La loi en bref

L’un des traits caractéristiques de la loi n° 72 de l’année 2017 est qu’elle accorde aux investisseurs de nombreuses incitations et garanties en les exonérant notamment des frais d’enregistrement des contrats de fondation d’entreprises. A cela s’ajoutent des facilités de crédits pour 5 ans à partir de la date d’enregistrement. D’autres stimuli sont prévus sous forme d’exonérations fiscales à hauteur de 50 % dans les projets de la catégorie A (regroupant les régions qui ont le plus besoin de développement), et à hauteur de 30 % pour la catégorie B (qui regroupe une palette diversifiée de Petites et Moyennes Entreprises (PME) et de grands projets, ceux de l’énergie renouvelable ou autres). La loi traite sur un pied d’égalité les investisseurs étrangers et égyptiens. Ils ont les mêmes droits et sont égaux devant la loi, qui règle les activités et les responsabilités des appareils relevant du ministère de l’Investissement. Elle organise les modes d’investissement dans les différentes zones industrielles et technologiques et les zones franches et de libre-échange.

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