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Bugdet 2019-2020 : L’Egypte sur la voie de la croissance

Marwa Hussein, Mardi, 30 juillet 2019

Le parlement vient d'approuver le budget 2019-2020, avec l'objectif de réduire le déficit budgétaire et la dette. Le gouvernement prévoit un excédent primaire pour la deuxième année consécutive. Les dépenses consacrées à la santé et à l'éduction augmentent fortement, tandis que des mesures sont prévues pour compenser la réduction des subventions.

Bugdet 2019-2020 : L’Egypte sur la voie de la croissance
Une hausse des investissements publiques par 40 % dans le budget.(Photo : AFP)

Le budget, approuvé par le parlement la semaine pas­sée, a été établi selon l’ob­jectif optimiste de réaliser un taux de croissance de 6 % en 2019-2020, contre 5,6 % pour l’exer­cice 2018-2019, qui s’est terminé fin juin. Sur le moyen terme, le gouver­nement aspire à un taux de crois­sance annuel de 6,5 à 7 %. Le taux de croissance prévu dans le budget est réalisable, selon plusieurs banques d’investissement. Beltone comme Pharos prévoient en effet un taux de croissance de 5,8 % pour 2019-2020, très proche de celui prévu par le gou­vernement. « Ce taux de croissance est possible si la construction des méga-projets et des infrastructures se poursuit au même rythme et que le flux d’investissements dans le secteur pétrolier et gazier reste important », indique Alia Mamdouh, économiste en chef auprès de la banque d’inves­tissement Beltone.

Le gouvernement table aussi sur la hausse des Investissements Directs Etrangers (IDE). « Jusqu’à présent, les IDE n’ont pas augmenté autant que prévu, mais il est prévu qu’ils reprennent pour plusieurs raisons », souligne Ahmed Al-Safty, professeur associé à l’Université américaine du Caire et directeur général du Centre de recherche Delta. Il évoque l’amé­lioration des infrastructures, la baisse prévue des taux d’intérêt élevés au cours des deux dernières années et l’autorisation des investissements dans le secteur de l’électricité. « Le gouvernement compte permettre aux étrangers d’investir dans le domaine de l’électricité en vendant des parts dans les compagnies d’électricité de l’Etat ».

Le risque principal susceptible de menacer la hausse des IDE et la réa­lisation du taux de croissance prévu est lié à la situation de l’économie mondiale. Dans le budget, le gouver­nement note que la croissance de l’économie mondiale s’établira à 3,3 % en 2019, contre 3,6 % l’année passée. « Les rapports mondiaux indiquent la présence de plusieurs risques menaçant l’économie mon­diale, ce qui pourrait affecter les perspectives de croissance écono­mique », souligne le gouvernement dans le budget, mentionnant le diffé­rend commercial entre les Etats-Unis et la Chine ainsi que le Brexit, deux facteurs qui pourraient affecter le commerce international.

Se basant sur ces estimations du taux de croissance, le gouvernement prévoit une hausse des revenus de 16 % en 2019-2010, qui devraient atteindre 1 100 milliards de L.E. Les taxes et les impôts représentent la part principale des revenus. Il est prévu qu’ils augmentent de 12,7 % par rapport à l’année précédente, pour atteindre 857 milliards de L.E. « Le gouvernement cherche à élargir la base des contribuables et à moderniser la collecte des impôts. Il est probable que l’automatisation du système raccourcisse les délais de paiement par les contribuables », indique Doha Abdel-Hamid, experte en évaluation des politiques publiques. Elle ajoute que le gouver­nement espère que la réussite du programme de réforme économique aura pour effet d’augmenter les Investissements directs étrangers et, par conséquent, les impôts.

Depuis 2014-2015, le niveau de hausse des taxes et des impôts dans le budget était élevé, en conséquence de l’imposition de nouvelles taxes, notamment de celle sur la valeur ajoutée (TVA) en 2016, ainsi que de l’application de la loi sur l’impôt foncier et de celle sur les gains capi­taux. Les taxes avaient crû de 36 % et 21 % en 2017-2018 et 2018-2019 respectivement. En fait, les impôts, en tant que part du PIB, devraient légèrement reculer, soit à 13,9 % en 2019-2020 et à 14,5 % en 2018-2019. « Le niveau de hausse des impôts est un peu optimiste, vu que le gouvernement ne prévoit pas l’im­position de nouvelles taxes. Cependant, il espère élargir la base des contribuables, ce qui, bien sûr, se répercutera sur les revenus », estime Alia Mamdouh.

Réforme administrative

Pour augmenter les recettes fis­cales, le gouvernement table sur un programme de réforme administra­tive, d’automatisation de la collecte des impôts et des taxes et de simpli­fication des procédures de collecte des impôts, selon une nouvelle loi, ainsi que sur la réduction des exemp­tions fiscales. « Ces mesures vont permettre d’élargir la base des contribuables et l’automatisation permettra la collecte des taxes et de l’impôt à temps », prévoit Al-Safty. Le gouvernement cherche en outre à accroître les recettes non fiscales, qui doivent passer de 218 à 274 mil­liards de L.E. Les sources les plus importantes sont le Canal de Suez, qui devra transférer au Trésor 36 milliards de L.E., et les autres orga­nismes économiques de l’Etat, qui devront générer un surplus de 20,7 milliards de L.E.

Les entreprises du secteur public des affaires sont censées transférer au Trésor 4,8 milliards de recettes, tandis que 8 milliards sont prévus en provenance du programme d’in­troduction en Bourse de sociétés étatiques, déjà lancé.

Au niveau des dépenses, le gou­vernement a pour objectif principal de réduire les subventions à l’éner­gie, afin de contenir le déficit. Il est prévu que les dépenses atteignent 1 600 milliards de L.E. (95,8 mil­liards de dollars), contre 1 400 milliards de L.E. pour l’exercice en cours, soit une hausse de seule­ment 11,1 %. « Le budget 2019-2020 reflète la continuation de la stratégie de contenir la croissance des dépenses et de réorganiser les priorités en matière de dépenses publiques, afin de garantir une meilleure utilisation », indique le budget. En chiffres absolus, les subventions à l’énergie sont la position qui sera considérablement coupée. Ainsi, les subventions aux carburants devraient baisser à 52,963 milliards de L.E. (3,18 mil­liards de dollars), contre 89,75 milliards de L.E. pour l’exercice en cours. Tandis que celles de l’élec­tricité vont passer de 16 à 4 mil­liards de L.E. (voir encadré). Les subventions aux produits alimen­taires doivent en revanche aug­menter de 3 milliards de L.E., pour passer à 89 milliards de L.E.

Les salaires et les rémunérations des fonctionnaires passeront, eux, de 270 à 301 milliards de L.E. Cela inclut la hausse du salaire et de la pension de retraite minimum de 1 200 L.E. et 750 L.E. à 2 000 L.E. et 900 L.E. respectivement ainsi qu’une prime allant de 7 % à 10 % pour les fonctionnaires. Au total, les salaires dans le budget vont augmenter de 30,5 milliards de L.E. et les pensions de retraite de 28,5 milliards. Malgré cette hausse d’environ 60 milliards de L.E., cette position dans le budget va augmenter de seulement 31 %, vu la politique adoptée par le gouver­nement de réduire le nombre de fonctionnaires publics. « Il n’y aura ni nouveaux recrutements, ni prolongement de service pour ceux qui atteignent l’âge de la retraite », explique Al-Safty.

Au moment où les salaires aug­mentent de 11,5 % en un an, les investissements publics prévus pour 2019-2020 sont de 211 mil­liards de L.E., contre 148 mil­liards prévus l’année dernière, soit une hausse de 42 %. Les investis­sements les plus importants se trouvent dans les domaines de la construction et du transport. Les investissements dans l’infrastruc­ture sont en effet une source prin­cipale pour attirer les investisse­ments privés et de l’industrie. « Il faut que le gouvernement prenne en considération des projets à rendement élevé comme la pétro­chimie. Les projets liés aux pro­fessions manuelles peuvent être profitables, créateurs d’emplois et non coûteux », souligne Doha Abdel-Hamid. Elle assure aussi que le retour à l’adoption d’un budget de performance, suspendu depuis plusieurs années, mais sti­pulé dans le nouveau budget, est important, vu qu’il vise à amélio­rer et à rationaliser la performance des ministères et organismes publics. Selon le budget de perfor­mance, les dépenses de chaque entité sont définies comme effi­caces ou non, selon les résultats réalisés. Des investissements de près de 136 milliards de L.E. sont prévus dans le domaine de la construction de bâtiments et autres.

Réduire le déficit et la dette

L’objectif principal du gouvernement, comme indiqué dans le budget, est de réduire le déficit budgétaire par rapport au Produit Intérieur Brut (PIB), c’est-à-dire de réduire la différence entre les dépenses et les revenus ainsi que la dette publique. Un objectif affiché depuis plusieurs années, mais qui semble finalement réalisable. Dans le budget 2019-2020, le ministère des Finances vise un déficit budgétaire de 7,2 %, contre 8,4 % prévu pour l’année financière qui s’est terminée le 30 juin 2019. Il aspire aussi à réduire la dette publique à 89 % du PIB, contre 92,5 % prévu en 2018-2019. L’objectif affiché du gouvernement est d’amener la dette publique à 80 % du PIB d’ici fin juin 2022.

La baisse du déficit est notamment possible grâce à la baisse des subventions à l’énergie, allouées aux carburants ainsi qu’à l’électricité, conformément au programme de financement signé en novembre 2016 avec le Fonds Monétaire International (FMI).

Afin d’achever la consolidation requise, le ministère des Finances poursuit sa politique consistant à réduire l’écart entre les dépenses et les revenus étatiques. Il a pu réduire régulièrement l’écart entre les dépenses et les revenus par rapport au PIB, qui était de 12 % en 2013-2014 et qui est chiffré à 7 % dans le budget 2019-2020. Les dépenses, qui représentaient près de 33 % du PIB à l’époque, devraient être ramenées à 21,4 %, alors que les revenus devraient baisser de 25,6 % à 18,4 % du PIB. Pour atteindre ce résultat, le taux de croissance annuel des dépenses doit être infé­rieur à celui des revenus, contrairement à la situa­tion dans un passé récent, où l’inverse était la norme. En 2019-2020, il est prévu que les recettes augmentent de 16,2 % et les dépenses de 11,5 %.

Le ministre des Finances a réussi à transformer le déficit primaire (déficit-surplus avant l’addition du service de la dette) en surplus primaire pour la première fois en 2018-2019. L’objectif est de réa­liser un surplus primaire de 2 % annuellement sur le moyen terme.

Baisse du service de la dette : Un défi

« La réduction de la dette à 80 % du PIB en 2020-2021 exige la réalisation d’un surplus pri­maire annuel de 2 % sur le moyen terme, car cela signifie être capable de payer une partie du ser­vice de la dette sans nouvel endettement et, par la suite, rendre la dette soutenable », explique Ahmed Al-Safty, professeur associé à l’Université américaine du Caire. L’objectif du gouvernement dans le budget 2018-2019 était d’amener la dette publique à 91% du PIB, un objectif très optimiste, qui n’a pas été réalisé. La dette a effectivement été réduite de 97 % du PIB en 2017-2018 à 92,5 %. « L’objectif était trop optimiste, il n’a pas été réa­lisé à cause de la hausse des taux d’intérêt, qui auraient dû baisser, mais avec l’amélioration de la performance économique et financière, les taux d’intérêt sur la dette vont très probablement bais­ser », assure Al-Safty.

La hausse des taux d’intérêt a eu pour consé­quence une augmentation du service de la dette, la position la plus élevée parmi les dépenses, soit 36 %. Il est prévu que le service de la dette atteigne 569 milliards de L.E. en 2019-2020, contre 541 milliards de L.E. l’année précédente. Cependant, il a baissé en tant que part du PIB de 10,3 à 9,2 %. « La baisse du service de la dette est un défi important, la restructuration prévue de la dette selon l’Euro Clearance donne de l’espoir, mais il faudra réduire l’endettement à court terme pour contenir le service de la dette », souligne Alia Mamdouh, économiste en chef auprès de Beltone.

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