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Karim Abdelaziz : Le facteur principal ayant contribué à rendre l’énergie solaire compétitive est la baisse des subventions à l’énergie

Marwa Hussein, Mardi, 07 mai 2019

Dans un entretien accordé à Al-Ahram Hebdo, Karim Abdelaziz, directeur des opérations auprès de l’entreprise SolarizEgypt, revient sur la production de l'énergie solaire en Egypte et indique les secteurs industriels les plus intéressés par cette technologie.

Karim Abdelaziz

Al-Ahram Hebdo : Quels sont les secteurs indus­triels qui peuvent être intéressés par l’énergie solaire ?

Karim Abdelaziz : Le secteur du ciment vient en tête, et nous avons déjà des contrats dans ce secteur. De même que celui du fer et de l’acier, vu que les usines occupent de larges superficies et que le secteur est un fort consommateur d’électricité. Le sec­teur du développement immobilier est lui aussi très intéressé par l’éner­gie solaire, d’autant plus que les tarifs d’électricité pour ce secteur sont éle­vés. Le secteur du développement industriel et les différentes industries en général sont alimentés par des lignes de moyenne tension, qui repré­sentent l’un des tarifs élevés en matière d’électricité en Egypte.

SolarizEgypt a signé, en jan­vier, un accord avec l’entreprise Arabian Cement Company (ACC), qui produit environ 10 % de la production locale de ciment, en vue d’établir une centrale d’énergie solaire SPV (solaire photovol­taïque) dans son usine dans le gou­vernorat de Suez. Pensez-vous que d’autres entreprises du secteur sui­vront ?

— Le secteur du ciment est un sec­teur très vital, qui peut avoir recours à l’énergie solaire, car d’habitude, les cimentiers sont localisés dans des zones où le niveau de luminosité solaire est fort. C’est un secteur sur lequel nous nous concentrerons dans l’avenir proche. En plus, les coûts de l’énergie sont importants pour le sec­teur, donc, si une entreprise de ciment utilise une telle technologie, elle peut économiser des sommes importantes et vendre la tonne de ciment à des prix plus compétitifs, ce qui contribue à réduire l’inflation sur le marché local d’une part, et permet d’être compétitif sur le marché international d’une autre part.

— Quand est-ce que la produc­tion d’énergie, dans le cadre de ce projet, commencera-t-elle ?

— Le début est prévu au cours du deuxième trimestre 2019.

— Combien une entreprise peut-elle économiser en utilisant cette technologie, comparée aux sources d’énergie conventionnelles ?

— Cela dépend de plusieurs fac­teurs, dont le taux de change de la livre égyptienne face au dollar lors de la signature de l’accord, le degré de luminosité solaire ainsi que les tarifs d’électricité payés par l’entreprise, mais en tout cas, il faut que le coût soit compétitif avec celui de l’électri­cité conventionnelle, car si le coût est le même ou plus cher, il n’y aura pas de motivation pour que les entreprises utilisent cette technologie.

— Comment est calculée la fac­ture de l’électricité des entreprises qui utilisent l’énergie solaire ?

— Les entreprises effectuent un échange commercial avec le minis­tère de l’Electricité. Lorsque la pro­duction d’énergie solaire est plus éle­vée que les besoins de l’entreprise, l’énergie supplémentaire produite est soustraite du compteur et sa facture diminue en conséquence. Sans cette connexion au réseau national de transmission d’électricité, il faudrait que la production d’électricité de l’entreprise coïncide avec ses besoins en électricité. Actuellement, en théo­rie, une entreprise connectée au réseau peut couvrir jusqu’à 80 %, voire 100 % de ses besoins en électri­cité, car le soir, elle peut utiliser l’énergie qu’elle produit pendant la journée étant donné que le réseau national sert de source de stockage d’énergie.

— Quelles sont les réglementa­tions gouvernementales les plus importantes permettant aux entre­prises privées de produire de l’énergie ?

— Premièrement, la loi sur la pri­vatisation de l’électricité, qui permet aux entreprises privées de vendre de l’électricité à d’autres entreprises pri­vées. L’Organisme régulateur de l’électricité fournit la licence aux entreprises pour produire de l’électri­cité. La compagnie d’électricité doit donner son approbation. Finalement, l’Autorité de l’énergie nouvelle et renouvelable donne une autorisation de production d’électricité liée au volume du projet. Finalement, l’Agence des affaires environnemen­tales doit consulter et approuver l’ef­fet sur l’environnement des projets. L’Etat est intéressé à encourager les énergies renouvelables.

— L’énergie solaire était plus chère que les sources tradition­nelles d’énergie. Qu’est-ce qui lui a permis de devenir compétitive ?

— Nous utilisons toujours la même technologie, soit la photovoltage (PV), dont l’efficacité augmente petit à petit, rendant les coûts plus écono­miques. Le facteur principal ayant contribué à rendre l’énergie solaire compétitive est la baisse des subven­tions à l’énergie. Le consommateur paie actuellement un prix plus proche du coût réel de la production de l’élec­tricité, ce qui a permis à l’énergie solaire d’être concurrentielle par rap­port à l’énergie conventionnelle, qui était largement subventionnée, alors que l’énergie solaire ne l’était pas.

— Avant les nouvelles décou­vertes gazières en Egypte, lorsque le pays souffrait de pénurie de gaz naturel, des entreprises de produc­tion de ciment ont choisi de rempla­cer le gaz par le charbon. Ne s’agit-il pas d’une contradiction avec l’énergie solaire ?

— Certains équipements utilisés dans les cimentiers dépendent du gaz naturel, tandis que d’autres consom­ment de l’électricité. Le charbon peut se substituer au gaz naturel, mais les besoins en électricité restent les mêmes ; c’est eux que l’énergie solaire couvre.

Renforcer les énergies renouvelables

L’Egypte prévoit une transition des sources d’énergie non renouvelables vers les sources d’énergie renouve­lables. L’objectif du gouvernement est de porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2022, et à 42 % d’ici 2035. Actuellement, la part de l’énergie solaire dans le mix énergétique est de 8 %, alors que celle de l’énergie éolienne est de 1 %. En 2015, les travaux de construction du méga-complexe solaire de Benban, situé dans le village de Benban, à l’ouest d’Assouan, ont commencé. Le complexe devrait produire 2 000 MW, soit 90 % de la production du Haut-Barrage. 32 compagnies égyptiennes et étrangères investissent dans ce méga-complexe, d’un coût de 4 milliards de dollars. A ce jour, la capacité installée totale du pays en énergies renouvelables s’élève à 3,7 gigawatts (GW), dont 2,8 GW d’énergie hydroélectrique et environ 0,9 GW d’énergie solaire et éolienne. Toujours en 2015, le projet des parcs éoliens de Gabal Al-Zeit a été inauguré. Il comprend 3 parcs éoliens composés de 300 éoliennes d’une capacité totale de 580 MW. Il est construit dans la région la plus venteuse d’Egypte. En 2014, le nom du ministère de l’Electricité a été modifié en ministère de l’Electricité et de l’Energie renouvelable, symbolisant la nouvelle orientation du gouvernement.

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