Al-Ahram Hebdo : Les pays du Moyen-Orient, y compris l’Egypte, ont pris de nombreuses mesures pour intégrer les PME au secteur formel et stimuler la croissance économique. Comment évaluez-vous ces mesures ?
Nicolas Blancher : Une conclusion-clé de nos travaux est qu’il n’y a pas de solution miracle pour accroître l’inclusion financière des PME de manière significative, sûre et durable. Les approches politiques partielles, qui ont parfois été appliquées, telles que celles reposant uniquement sur des garanties de crédits publics, n’ont pas suffi pour atteindre cet objectif. En revanche, des réformes sont nécessaires, en termes de stabilité macroéconomique et de qualité institutionnelle, d’amélioration de l’environnement des entreprises. Des réformes réglementaires et juridiques spécifiques doivent être mises en place pour soutenir les prêts aux PME, notamment en ce qui concerne la disponibilité des informations de crédit ou le respect des contrats.
Un nombre croissant de pays ont déjà conçu et mis en oeuvre de telles stratégies de réforme. Cela prendra du temps, mais il s’agit là d’une évolution très encourageante, dans laquelle le FMI, de concert avec plusieurs autres organisations régionales et internationales, jouera un rôle important. Plusieurs pays de la région ont mis en oeuvre des stratégies globales d’inclusion financière qui devraient permettre des progrès considérables si elles sont pleinement mises en oeuvre. C’est le cas par exemple en Jordanie, au Liban, au Maroc ou en Arabie saoudite.
L’Egypte a réalisé de grands progrès en matière d’inclusion financière des PME. Les autorités égyptiennes ont récemment formulé une approche et une vision globales pour l’intégration des PME dans le secteur formel et la réalisation d’un capital financier. Les représentants du FMI travaillent sur ce dossier avec les autorités égyptiennes et leur apportent le soutien technique nécessaire.
— Quels sont les principaux défis auxquels sont confrontées les PME ? Et quelle est la recette pour réussir l’inclusion dans la région MENA ?
— Il n’y a pas de solution miracle ni d’approche unique pour réaliser des améliorations significatives de l’inclusion financière des PME. Chaque pays doit définir sa propre stratégie. Il faut identifier et hiérarchiser les domaines de réforme qui, dans chaque pays, constituent les principaux obstacles au financement des PME. Il s’agit en fait de faciliter l’accès au financement, d’investir dans l’éducation et l’infrastructure, de réduire le rôle de l’Etat dans l’économie et d’améliorer l’efficacité du gouvernement. Et plus largement, améliorer le développement économique, l’infrastructure et l’éducation, la gouvernance, la lutte contre la corruption, et finalement, la disponibilité des informations de crédit. L’inclusion est importante pour la relance de l’économie, car les PME représentent 95 % des entreprises de la région MENA et la moitié des emplois.
— Comment l’inclusion des PME dans l’économie formelle peut-elle stimuler la croissance économique ?
— L’inclusion des PME, dans l’économie formelle leur donne un accès potentiel à des financements plus importants, par l’intermédiaire du système bancaire ou de sources de financement alternatives, telles que les marchés des capitaux. Un accès financier accru peut être une source de croissance et de création d’emplois dans la région. L’importance des canaux alternatifs ou de nouveaux financements des PME est aussi à souligner. L’expérience d’autres régions montre que les marchés financiers et, de plus en plus, la fintech, peuvent faciliter l’accès des PME au financement. Là encore, la région a encore beaucoup à faire pour mettre en place l’environnement nécessaire à l’élargissement de ces canaux.
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