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Nouvelles mesures pour réduire le déficit budgétaire

Marwa Hussein, Lundi, 11 juin 2018

Un projet de loi prévoyant de nouvelles taxes sur différents services étatiques et sur les lignes de téléphone portable a été approuvé par le parlement. Objectif : augmenter les recettes étatiques. Il sera accompagné de mesures sociales pour compenser l’effet sur les classes les plus démunies.

Nouvelles mesures pour réduire le déficit budgétaire
Une nouvelle taxe a été imposée sur l’achat d’une nouvelle ligne de portable. (Photo : Reuters)

Le gouvernement égyptien vient d’imposer de nouvelles taxes sur des licences et des services variés. Le 5 juin, le parlement a approuvé un projet de loi qui modifie les taxes existantes et en impose plusieurs nouvelles sur des licences et services, notamment sur l’achat de nouvelles lignes de téléphone portable ou d’automobiles, l’obtention du permis de conduire et de port d’armes, ainsi que sur les permis de résidence pour les étrangers. Il s’agit de modifications de la loi dite de développement des ressources de l’Etat qui, comme son nom l’indique, impose des frais sur différents services, notamment publics, afin d’accroître les revenus étatiques.

Ainsi, tout acheteur d’une nouvelle ligne de téléphone portable devra dorénavant payer une taxe de 50 L.E. Les détenteurs d’un abonnement de téléphone portable devront, quant à eux, payer une taxe mensuelle de 10 L.E. La plupart des frais existants ont été décuplés. Ainsi, les frais d’obtention d’un permis de conduire ont passé de 20 à 300 L.E., alors que les taxes appliquées sur les cartes grises pour les nouvelles automobiles sont calculées en pourcentage: elles s’élèvent à 0,5% du prix du véhicule pour une voiture personnelle de moins de 1 030 cc, contre une somme fixe de 116 L.E. auparavant (voir tableau).

Pour atténuer l’effet de ces nouvelles taxes et d’autres mesures prises dans le cadre de la réforme économique, le gouvernement a annoncé une augmentation des salaires et des pensions, alors que les Egyptiens se préparent à faire face à une hausse des prix des carburants. Le parlement a ainsi décidé, le 3 juin, d’augmenter les pensions de retraite de 15%, la hausse minimale étant de 125 L.E. et la pension minimale de 750 L.E. Une prime mensuelle de 7% pour les fonctionnaires soumis à la loi sur la fonction publique et de 10 % pour les autres fonctionnaires a en outre été instaurée, la prime minimale étant de 65 L.E. Selon Chérif Ismaïl, ancien premier ministre, 9 millions de personnes vont bénéficier de la hausse des pensions et 6 millions de fonctionnaires vont connaître une augmentation de salaire.

La hausse des salaires ainsi que celle des prix des carburants et de l’électricité prendront effet en juillet prochain, mois qui marque le début de l’année fiscale en Egypte. « Cela aidera les classes défavorisées à faire face à toute augmentation des prix des services résultant du programme de réforme économique », avait déclaré Ismaïl. Mohamad Abou-Basha, économiste en chef auprès d’EFG-Hermes, estime que les mesures sociales annoncées peuvent alléger les répercussions des mesures sur les classes les plus pauvres, mais non sur la classe moyenne. « La hausse des salaires et des pensions et l’augmentation préalable des subventions aux produits alimentaires peuvent réduire les pressions financières sur les classes les plus démunies, mais elles sont moins significatives pour la classe moyenne, qui utilise moins souvent les transports publics ou les cartes de subventions », explique l’économiste. Il ajoute que si l’inflation était de 22 % en moyenne l’année passée, elle doit être considérée comme étant plus élevée pour les citoyens de la classe moyenne, qui envoient leurs enfants dans des écoles privées et se déplacent en voiture privée.Par l’imposition des taxes sur les licences et les permis, le gouvernement entend augmenter les recettes étatiques et réduire le déficit budgétaire. Selon le ministre des Finances, Amr Al-Garhi, ces mesures combinées rapporteront 7 milliards de L.E. par an au Trésor. Le plan global du ministère des Finances est d’augmenter les recettes fiscales de 131 % en quatre ans. S’adressant au parlement, Al-Garhi a déclaré que le gouvernement visait à augmenter les recettes fiscales à 1400 milliards de L.E. (78 milliards de dollars) pour l’exercice 2021-22, contre 604 milliards de L.E. (34 milliards de dollars) en 2017-18, tout en réduisant le déficit budgétaire, au cours du même exercice, à moins de 4% du Produit Intérieur Brut (PIB). Le ministre a ajouté que le gouvernement visait le cap des 770 milliards de L.E. (43 milliards de dollars) de recettes fiscales au cours de l’exercice 2018-19, contre 300 milliards de L.E. (17 milliards de dollars) pour l’exercice 2014-2015.

Contrôler le déficit budgétaire

La commission du plan et du budget du parlement a en outre approuvé l’imposition d’une taxe sur la vente de biens immobiliers et de terrains hérités. Proposée par la députée Mervat Alexan, membre de la commission, l’idée a été bien accueillie par les responsables du ministère des Finances, qui l’ont approuvée. Certains parlementaires ont cependant exigé que les villages ne soient pas soumis à cette taxe, vu l’absence de spéculation sur l’immobilier dans les zones rurales.

Le parlement a aussi approuvé, le 5 juin, des modifications relatives à l’impôt sur le revenu, également dans un effort d’alléger l’effet des réformes économiques sur les classes les plus défavorisées. Ainsi, les revenus annuels inférieurs à 8000 L.E., contre 7200 L.E actuellement, seront exonérés de cet impôt. Des exonérations moins importantes ont aussi été annoncées pour les deux tranches de revenus suivantes. « Il est difficile d’augmenter l’impôt sur les revenus plus élevés avant d’avoir réformé le système de collecte des impôts et réduit le paiement en espèces, et ce, afin de ne pas encourager l’évasion fiscale, comme avant 2005, lorsque l’impôt maximum était de 40 % », explique Abou-Basha, ajoutant que la solution optimale pour augmenter les recettes sans imposer de fardeau supplémentaire aux plus démunis serait d’élargir la base des contribuables, surtout parmi les personnes qui exercent des professions libérales, dont une grande partie ne paie presque pas d’impôts. L’économiste rappelle que le gouvernement a imposé, en 2014, des taxes sur les dividendes de 5 à 10%, un revenu non taxé auparavant.

L’imposition des nouvelles taxes sur les licences et services étatiques fait partie d’une série de mesures entreprises au cours des deux derniers mois et visant à augmenter les recettes et réduire les dépenses, afin de contrôler le déficit budgétaire. Ainsi, le gouvernement a augmenté, le mois passé, les prix des billets de métro de 50 à 250%, tout en liant le prix du billet à la longueur du trajet. Selon ce nouveau système, les billets du métro coûtent de 3 à 7 L.E., contre 2 L.E. pour l’ensemble des trajets auparavant. Début juin, le prix de l’eau potable a augmenté de 46,5% ; il s’agissait de la deuxième hausse en moins d’un an. Il est prévu que les prix des carburants et de l’électricité augmentent eux aussi à la fin du mois, et ce, dans le cadre d’un plan de restructuration des subventions à l’énergie. Ces mesures et les aides sociales qui les accompagnent ont été approuvées par le parlement dans le cadre des discussions relatives au budget 2018-2019, qui entrera en vigueur le 1er juillet. Il prévoit un déficit budgétaire de 8,4%, contre un déficit prévu de 9,4 % pour l’exercice en cours. Les recettes étatiques pour l’exercice à venir sont budgétées à 989 milliards de L.E. et les dépenses à 1420 milliards. Le budget doit être approuvé par le président de la République avant son entrée en vigueur.

Les nouvelles taxes

Lignes de téléphone portable

50 L.E. lors de l’achat d’une nouvelle ligne de téléphone portable.

10 L.E. sur la facture mensuelle des abonnements de téléphone portable.

Carte grise pour un nouveau véhicule

0,5% de la valeur du véhicule pour une voiture d’une puissance inférieure à 1330 cc.

2 % de la valeur du véhicule pour une voiture d’une puissance inférieure à 1630 cc.

2,25% de la valeur du véhicule pour une voiture d’une puissance inférieure à 2030 cc.

2,5% de la valeur du véhicule pour une voiture d’une puissance supérieure à 2030 cc.

Carte grise pour une voiture d’occasion

225 L.E. pour les voitures d’une puissance inférieure à 1 030 cc, contre 116 L.E. auparavant.

350 L.E. pour les voitures d’une puissance inférieure à 1 330 cc, contre 143 L.E. auparavant.

750 L.E. pour les voitures d’une puissance inférieure à 1 630 cc, contre 175 L.E. auparavant.

De 800 à 3000 L.E. pour les voitures d’une puissance inférieure à 2030 cc, contre 200 à 1000 L.E. auparavant.

L’ancienne loi ne faisait pas de distinction entre nouvelle voiture et voiture d’occasion.

Permis de conduire

300 L.E. pour le permis de conduire d’une voiture privée, contre 20 L.E. auparavant.

200 L.E. pour le permis de conduire professionnel, contre 9,60 L.E. auparavant.

100 L.E. pour le permis d’instructeur de conduite pour voitures et motos, au lieu de 9 L.E.

50 L.E. pour le permis de conduite d’un tracteur agricole, contre 9 L.E. auparavant.

100 L.E. pour renouveler un permis endommagé ou perdu, contre 4,40 L.E. auparavant.

Permis de port d’armes

2 500 L.E. pour le permis de port d’une arme à feu, contre 50 L.E. auparavant.

1 000 L.E. pour le renouvellement du permis de port d’armes, contre 25 L.E. auparavant.

Passeports

200 L.E. pour un nouveau passeport ainsi que pour le renouvellement d’un passeport, contre 54,40 L.E. auparavant.

Permis de séjour pour les étrangers et embauche d’étrangers

Une amende de 500 L.E. pour les étrangers qui renouvellent leur permis de séjour en retard ou qui changent leur adresse de résidence sans en avertir les autorités, contre 20 L.E. auparavant.

Une amende de 500 L.E. pour les employeurs qui ne déclarent pas l’embauche d’étrangers ou embauchent des étrangers sans permis de travail.

Demande de la nationalité égyptienne

10000 L.E. pour la demande de la nationalité égyptienne, contre 50 L.E. auparavant.

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