146 milliards de L.E. C’est la somme que le gouvernement égyptien va économiser, lorsque les subventions à l’énergie seront annulées si le prix du baril de pétrole reste à 75 dollars. Le ministère des Finances a publié la semaine dernière deux tableaux indiquant les sommes assumées par le budget à cause des subventions à l’énergie. Le premier tableau montre la facture de l’importation des produits pétroliers assumée par le gouvernement pour satisfaire les besoins du marché local. L’autre montre les gains qu’il peut réaliser s’il exporte les quantités de produits pétroliers qu’il met sur le marché local. A noter que le marché égyptien attend la troisième vague de libéralisation des subventions à l’énergie dans le cadre du programme de réforme économique.
La facture totale de l’importation des produits pétroliers s’élève à environ 104 milliards de L.E., la moitié de cette somme étant consacrée à l’importation du gasoil (environ 51 milliards de L.E.). Les bonbonnes de gaz arrivent en deuxième place, avec un total de 26,5 milliards de L.E. L’octane 92, 80 et le mazout représentent, les trois ensemble, environ 25 milliards de L.E. « Il est temps pour que le gouvernement libère les subventions accordées à l’énergie. Il ne peut plus continuer à procurer des produits à des prix inférieurs à leur valeur réelle, surtout si les riches en profitent plus que les pauvres », a expliqué le ministre des Finances, Amr Al-Garhi, suite à la visite de la mission du Fonds Monétaire International (FMI) en mai dernier et aux fuites concernant une hausse prochaine des prix des produits de l’énergie. Il a ajouté: « La suppression des subventions accordées à l’énergie n’est pas un secret. Le gouvernement actuel avait annoncé un plan progressif pour une telle étape dans le cadre du programme de réforme économique, et ce plan sera finalisé en l’espace de deux ans ».
Selon le ministre des Finances, la libéralisation du prix des produits de l’énergie est le facteur-clé de la relance économique et de la réussite des réformes économiques. « Des pays comme le Venezuela sont au seuil de la faillite à cause des subventions accordées à l’énergie. Les subventions continues obligent les pays à arrêter leur production de matières pétrolières », souligne-t-il.
Le déficit budgétaire a souvent été la source majeure de préoccupation du ministère des Finances. Entre 2012-2013 et 2015-2016, il était en moyenne de plus de 12%, avant de baisser à 10,9% en 2016-2017, un niveau toujours élevé. Le gouvernement prévoit un déficit de 9,5% pour l’exercice en cours et de 8,5% l’année prochaine, selon Al-Garhi. Le ministère des Finances prévoit en outre un excédent primaire de 1,7 à 2% en 2018-2019. Il avait déclaré en janvier que le gouvernement était sur la bonne voie pour atteindre l’excédent primaire visé de 0,2% du PIB d’ici à la fin de l’exercice 2017-2018, contre un déficit primaire de 3,5% en 2015-2016 et de 1,8% en 2016-2017.
De nouveaux revenus
La suppression des subventions à l’énergie constitue l’une des mesures importantes pour réduire un tel déficit, surtout avec la fluctuation des prix du pétrole sur le marché international. Selon le ministère du Pétrole, le coût des subventions accordées à l’énergie s’est gonflé avec la dernière hausse du prix du pétrole. Citons à titre d’exemple l’octane 92. Le coût de production de l’octane 92 excède actuellement les 7,5 L.E., alors qu’il est vendu sur le marché local à 5 L.E. Même chose pour l’octane 95, dont le coût de production est de 8,5 L.E., alors que le gouvernement le procure à 6,6 L.E.
C’est ici qu’intervient le deuxième tableau publié par le ministère des Finances pour révéler la valeur de l’opportunité alternative. Selon les chiffres de ce tableau, si le gouvernement exporte les bonbonnes à butagaz, l’octane, le gasoil et le mazout selon les prix internationaux au lieu de les vendre, subventionnés, sur le marché local, il en tirera des revenus d’environ 146 milliards de L.E. Le gasoil à lui seul produira une somme de 58 milliards de L.E. supplémentaires et le mazout une somme d’environ 39 milliards de L.E. « La hausse du prix des octanes est indispensable, surtout si on prend en considération que la grande majorité des personnes possédant des voitures sont de la classe aisée. Les pauvres n’en profitent plus », explique Mohamad Abou-Bacha, analyste économique auprès de la maison de courtage EFG-Hermes. « Il est vrai, poursuit-il, qu’une telle mesure entraînera une vague de hausses des prix, ce qui représente un fardeau sur les classes pauvres, mais les revenus ainsi engendrés pourraient compenser ces hausses à travers les programmes de protection sociale menés par le gouvernement».
Pour sa part, Ahmad Kojok, adjoint du ministre des Finances pour les politiques monétaires, est d’avis que le gouvernement a entrepris des mesures de réforme difficiles, mais longuement attendues. En ce qui concerne la suppression des subventions à l’énergie et son influence sur certains secteurs de production, Kojok déclare: « C’est vrai qu’il y a une influence, mais le programme de réforme inclut un volet social, avec l’augmentation de l’aide financière de 15 à 50 L.E. pour les catégories les plus démunies, en plus de l’augmentation des pensions de retraite ». L’adjoint du ministre des Finances ajoute que les réformes récemment entreprises en Egypte ont valu au pays un taux de croissance de 5% au premier semestre 2017, et ce, pour la première fois depuis 2008, tout en indiquant que 100000 emplois avaient été créés, soit 80% des emplois créés au cours des années 2013, 2014 et 2015.
Pour conclure, Kojok indique que le ministère étudie actuellement une série de mesures en faveur de la classe moyenne également. « Le gouvernement commence à récupérer les fruits des réformes, ce qui nous permettra d’étendre le parapluie des mesures de protection », conclut-il .
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