
Le nouveau système va mettre fin au marché noir de la farine.
(Photo : Reuters)
Le gouvernement a décidé de libéraliser le prix de la farine utilisée dans la production du pain subventionné. La décision est entrée en vigueur au 1
er août. Ainsi, les boulangeries produisant le pain subventionné, qu’elles soient publiques ou privées, vont obtenir la farine au prix du marché pour la première fois depuis l’introduction du système des subventions sous Nasser. Selon le nouveau système, le gouvernement va directement subventionner le pain. Au lieu de recevoir de la farine à un prix inférieur à celui du marché, les boulangeries vont recevoir une somme d’argent déterminée sur chaque galette. Avec les nouvelles mesures, le gouvernement entend combattre le marché noir qui fait rage dans le secteur. Améliorer la qualité et rationaliser les subventions aux produits alimentaires. En effet, il arrive que la farine subventionnée soit détournée et vendue sur le marché noir. Selon le ministre de l’Approvisionnement, Ali Messilhi, l’Autorité générale des produits de base subventionnés (
General Authority for Supply Commodities) vendra la farine aux boulangeries à 4 700 L.E. la tonne contre 2 600 L.E. auparavant. Ces prix seront revus tous les trois mois, selon le ministre.
En 2014, le gouvernement avait introduit une modification radicale du système de subvention du pain, limitant les bénéficiaires du pain subventionné aux familles qui détiennent une carte d’approvisionnement. Il a également fixé le nombre de galettes de pains subventionnées à 5 par jour et par personne, alors qu’auparavant, le pain subventionné était distribué à ceux qui le voulaient sans limites. Au-delà de 5 galettes, le pain était vendu au prix fixe de 35 piastres l’unité hors système de subvention. Cette décision visait à limiter les quantités de farine subventionnées distribuées aux boulangeries, et parfois détournées et vendues sur le marché noir. Cependant, le marché noir a persisté, vu la différence considérable entre le prix subventionné et celui du marché. Les propriétaires de deux boulangeries dites touristiques (qui vendent du pain baladi non subventionné), ont avoué à l’Hebdo qu’ils achetaient souvent de la farine subventionnée. « Si je ne mélange pas la farine chère que j’achète aux commerçants à celle distribuée par le gouvernement, je ne pourrai pas fournir le pain à un prix approprié, et je risque de perdre », dit l’un d'eux. « On n’a pas le choix ; si j’augmente le prix de la galette par rapport au pain vendu dans les boulangeries subventionnées, personne ne l’achètera », renchérit l’autre.
Selon le porte-parole du ministère, Mohamad Sweid, les nouvelles mesures doivent aider l’Etat à économiser plus de 5 milliards de L.E., montant gaspillé chaque année à cause de la revente de la farine subventionnée sur le marché noir.
Les boulangeries vont payer plus cher leur farine, mais vont en compensation recevoir plus d’argent directement du gouvernement. « Les boulangeries subventionnées vont recevoir en gros une subvention de 57 pts par galette de pain, dont 14,4 pts pour la farine et le reste pour les autres frais de production », explique Sweid. Le gouvernement dit avoir pris en considération la nouvelle hausse du prix du carburant et des bonbonnes de gaz en plus de celle de la farine. Il a augmenté ses estimations du coût de production de la galette de 35 à 62 piastres, et le citoyen payera toujours 5 piastres. Le prix du pain subventionné reste le même. « Pour nous, cela ne change rien. Appliquer les subventions sur le pain et non sur la farine va seulement permettre à l’Etat de faire plus d’économies », révèle Hosni Sabet, propriétaire d’une boulangerie à Mounira.
Augmentation du pain hors système
Si les bénéficiaires du pain subventionné ne seront pas théoriquement touchés par les nouvelles modifications du système, le prix du pain acheté en dehors du système des subventions va, lui, augmenter. Principalement parce que le marché noir va disparaître. « Nous achetions de la farine subventionnée au marché noir de 3 700 à 4 000 L.E. la tonne, elle couvrait une partie de notre production. Si le prix augmente, le prix de notre pain va augmenter aussi », avoue courageusement le propriétaire d’une boulangerie touristique. L’autre raison est que les commerçants de la farine ont souvent augmenté le prix de la farine libre parallèlement à la hausse des prix de la farine subventionnée et celle du marché noir. Le prix de la galette baladi hors système a augmenté depuis novembre 2016 après la dévaluation de la livre égyptienne et la première hausse des prix du carburant, dont le gaz et les bonbonnes de gaz largement utilisés dans les boulangeries. Le carburant et l’électricité ont augmenté pour la deuxième fois en moins d’un an en juillet. Cette augmentation ne s’est pas encore complètement reflétée sur le prix du pain. « Je vais recevoir la facture d’électricité et de gaz pour le mois de juillet dans quelques jours, si elle augmente, je serai contraint d’augmenter les prix », dit Achraf Saleh, propriétaire d’une boulangerie. Ali Taha, boulanger à Abdine, souligne que les achats ont fortement diminué. « Les gens consomment de moins en moins. J’ai diminué ma production de 12 à seulement 8 sacs de farine par jour », regrette-t-il. Tout comme d’autres propriétaires de boulangeries privées, Taha entend augmenter à nouveau le prix du pain à partir d’août, suite à la hausse du prix de la farine. Il explique que le prix de la galette de pain à 75 piastres passera à une livre.
« Depuis novembre 2016, le prix du pain a augmenté de plus de 65 %, et on parle aujourd’hui d’une nouvelle hausse », dit Rachad Abdou, président du Forum égyptien pour les études économiques et stratégiques, tout en indiquant que plus de 55 % des boulangeries qui vendent du pain non subventionné en Egypte sont privées. Le ministère de l’Approvisionnement étudie la possibilité de diminuer la ration du citoyen de 5 à 4 galettes par jour. En effet, un rapport récemment publié par l’administration générale des études et des recherches auprès du ministère a révélé que le taux de consommation du citoyen varie entre 2,5 et 3,8 galettes par jour. Une autre mesure prévue consiste à compenser les citoyens qui achètent moins que leur ration journalière. « La personne qui n’achète pas sa portion quotidienne obtiendra 10 piastres par galette en compensation, qui seront créditées sur sa carte d’approvisionnement à la place des 5 piastres actuelles », explique Sweid.
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