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Devises étrangères : Sortie de crise ou endettement ?

Névine Kamel, Mardi, 28 février 2017

Bien que le gouvernement mise sur une hausse des réserves en devises étrangères comme indice de relance économique, de nombreux experts craignent que cette tendance n’entraîne une accumulation des dettes extérieures.

Devises étrangères : Sortie de crise ou endettement ?
La BCE prévoit une hausse continue des réserves en devises étrangères le mois prochain.

Les réserves égyptiennes en devises étran­gères ont adopté une courbe ascendante au cours des quatre derniers mois. La Banque Centrale d’Egypte (BCE) a indiqué début février que les réserves de change du pays ont atteint 26,4 milliards de dollars en janvier, contre 24,26 en décembre et 23 milliards en novembre. Selon les experts, cette tendance s’explique par la baisse du prix du dollar au cours de ces deux dernières semaines. Pour d’autres, l’endettement est la raison de cette augmentation des réserves en devises étrangères.

C’est une nouvelle étape dans le plan de réforme économique entrepris par le gouverne­ment égyptien. Ce plan a été marqué par des décisions telles que le flottement de la L.E., la suppression des subventions pour l’énergie et l’application de la Taxe de la Valeur Ajoutée (TVA). Cette réforme a permis à l’Egypte d’ob­tenir un prêt triennal de 12 milliards de dollars auprès du Fonds Monétaire International (FMI). La première tranche, de 2,75 milliards de dol­lars, a été versée en novembre et en janvier, une délégation du FMI s’est rendue au Caire pour préparer le décaissement du deuxième verse­ment prévu en mars, d’un montant de 1,25 mil­liard de dollars. Seulement, pour se voir accor­der ce prêt, le gouvernement a dû effectuer plu­sieurs crédits bilatéraux visant à combler un fossé de 8 milliards de dollars.

Outre ces financements, l’Egypte a vendu des obligations en dollars d’une valeur de 4 milliards de dollars. Or, « cela n’est pas suffisant pour assurer les réserves nécessaires qui permettront de stabiliser le marché du change dans le pays », explique Hani Farahat, économiste de la banque d’investissement égyptienne CI Capital. Et d’ajouter : « L’une des priorités du moment est d’augmenter les Investissements Directs à l’Etranger (IDE) que reçoit l’Egypte ». Au cours de l’année fiscale qui s’est terminée en juin 2016, le pays n’a perçu que 6,8 milliards de dollars en IDE, contre 13,2 milliards de dollars huit ans plus tôt. Une observation qui pousse Farahat à affirmer que « la reprise économique de l’Egypte va prendre du temps ». Une idée partagée par Amr Adli, économiste du centre Carnegie pour le Moyen-Orient, qui explique que « l’un des défis de l’Egypte est de parvenir à diversifier ses sources de devises étrangères ».

Innover pour éviter l’endettement
Le gouvernement égyptien avait traditionnel­lement recours aux transferts d’argent des tra­vailleurs installés à l’étranger, aux revenus du Canal de Suez, mais aussi à ceux du tourisme. Seulement, Adli estime que ce dernier secteur « s’est avéré très précaire et on ne peut plus vraiment compter dessus ». Selon lui, le milieu des affaires doit s’efforcer de développer les industries locales, malgré les difficultés et les obstacles auxquels se heurtent les petites et moyennes entreprises. « Les mesures écono­miques déjà adoptées n’ont résolu que 40 % des problèmes. Les investisseurs souffrent continuel­lement des procédures bureaucratiques, de la corruption. Ils espèrent plus de réformes struc­turelles. Autrement la valeur de la dette exté­rieure continuera de gonfler », explique l’éco­nomiste.

De son côté, Tareq Amer, gouverneur de la BCE, estime que la hausse des réserves en devises étrangères n’est pas un dû, contraire­ment aux avis de nombreux experts. « La BCE a pu rembourser des engagements écono­miques d’une valeur de 71 milliards de dollars, depuis ma nomination fin 2015. Je n’ai bien entendu pas sollicité les emprunts du gouverne­ment pour couvrir la totalité d’une telle somme au cours de cette période. Les décisions et la supervision de la BCE sur le marché parallèle ont considérablement contribué à obtenir des dollars ». Le gouverneur de la BCE révèle par ailleurs que la dette extérieure s’élève actuelle­ment à un montant de 60 milliards de dollars, et « sa plus importante augmentation a été enre­gistrée sous le gouvernement des Frères musul­mans », affirme-t-il, précisant qu’au cours de la dernière année, la facture de la dette extérieure n’a pas dépassé les 15 milliards de dollars. L’Egypte avait environ 36 milliards de dollars de réserve avant la révolution de 2011 qui a marqué le début d’une période d’instabilité politique, effrayant les touristes et les investis­seurs étrangers.

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