Al-Ahram Hebdo : L’instabilité politique se prolonge en Egypte depuis la révolution. Quel en est l’impact sur les résultats financiers de votre groupe ?
Tor Hatlo-Johansen : La situation a été très difficile pour Jotun pendant l’année de la révolution en raison de la forte récession ayant frappé l’économie. Malheureusement, la société n’a pas pu réaliser d’importants profits (ndlr, sans vouloir donner des chiffres précis de son budget). Mais nous avons évité les pertes grâce à notre gestion et nos stratégies. Nous avons ainsi été obligés de licencier plus de 10 % de nos 500 employés en vue de réduire nos dépenses. Toutefois, Jotun a repris ses activités de production en 2012, le chiffre d’affaires s’est amélioré et nous avons embauché de nouveaux employés. L’année dernière, nous avons inauguré 4 nouvelles succursales au Caire qui fournissent les produits Jotun partout dans le pays.
— Etes-vous optimiste quant au climat des investissements dans le pays ?
— Oui, nous sommes très optimistes malgré l’ambiguïté de la vision politique et économique. Car Jotun a conclu de nouveaux partenariats qui lui permettent de s’étendre sur le marché. Tout d’abord, Jotun fournit en peinture, depuis l’année passée, la phase 1 du nouveau méga-projet de luxe Hyde Park dans le Nouveau Caire. Il comprend 1 500 villas, 4 tours résidentielles et 4 centres commerciaux. De plus, Jotun a signé le 14 février dernier un partenariat avec la nouvelle cité de divertissements pour enfants, Kidzania, qui sera inaugurée au Caire en avril prochain. Nous fournirons la peinture nécessaire lors des travaux. De même, nous prévoyons lancer de nouveaux investissements dans la recherche et la publicité ainsi que le développement de produits de peinture.
— Comment évaluez-vous la structure actuelle du marché égyptien des peintures ? Et quels sont vos concurrents ?
— Le marché des peintures en Egypte est très grand et varié, il comprend plus de 10 concurrents. Mais Jotun, ainsi que 2 autres sociétés, font partie des plus grandes en matière de parts de marché ainsi que de qualité de production. Les produits de ces 3 sociétés sont haut de gamme et s’adressent essentiellement aux consommateurs de la catégorie A. 3 autres sociétés sont de taille moyenne et s’adressent uniquement à la catégorie B. Tandis que la production des 4 dernières qui appartiennent au bas de gamme est destinée à la catégorie C.
— Quelle sera la réaction de Jotun si le gouvernement décide d’un impôt sur les sociétés à 25 % au lieu de 20 % actuellement ?
— Il n’y aura d’autre choix que payer. Jotun existe depuis 1984 sur le marché égyptien et domine une part importante du marché à travers l’injection d’investissements depuis plus de 25 ans. Si envahir ce marché n’avait encore été qu’une idée, on aurait dû la changer et s’orienter vers d’autres marchés plus attractifs. De plus, Jotun International, qui existe dans plus de 70 pays de par le monde, paie ce même taux d’impôt très élevé atteignant parfois 50 % des revenus, dans plusieurs pays. Nous existons déjà sur le marché égyptien et nous ne pensons pas en sortir.
— Quel a été l’impact de la dépréciation de la L.E. sur le prix de vos produits et sur vos exportations ?
— La dévaluation de la monnaie nationale contre le dollar a beaucoup nui à notre société, puisqu’elle a conduit à accroître le prix des matières premières que nous importons de l’étranger. Cette hausse des prix mènera à une hausse supplémentaire du prix de 10 à 20 % du produit final. Et incontestablement, cette hausse du prix baissera le pouvoir d’achat chez les clients qui peinent déjà à supporter les hausses continuelles des prix. Quant aux exportations, Jotun, qui considère l’Egypte comme un point d’exportation vers les autres pays du monde arabe, s’est trouvée en difficulté vu les troubles en Libye, en Syrie et en Tunisie. Cette instabilité a énormément touché nos exportations, affectant ainsi nos ventes. Mais la société récupérera bientôt sa position de leader sur le marché libyen et espère que la situation s’améliorera sur les deux autres marchés.
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