Al-Ahram Hebdo :
L’économie égyptienne est confrontée à des difficultés réelles : crise du taux de change, déficit du budget ... Le tableau est-il si sombre ?
Hazem A
l-Beblawi : Personne ne peut nier que l’économie égyptienne soit confrontée à un bon nombre de défis et de difficultés. Pour autant le tableau n’est pas noir, il y a de nombreuses raisons d’être optimiste, si le gouvernement prend au sérieux les mesures de réforme économique. Il est temps, par exemple, de réformer le système fiscal. Ce dernier est fragile en Egypte. Les taxes récupérées en Egypte ne dépassent pas les 15 % du total du PIB. Un taux très bas par rapport au taux moyen de 35 %. Le gouvernement ne récupère donc même pas 20 % de ses droits fiscaux, et ce sont malheureusement, les riches qui échappent au système fiscal. De même, pourquoi le gouvernement tarde-t-il à poursuivre le plan de la libéralisation de l’énergie avec la suppression des subventions ? Le gouvernement a fait le premier pas, le plus difficile, et devrait continuer sur sa lancée. Il est temps que le gouvernement commence à adopter un programme progressif pour la libéralisation de ce secteur. Ce programme est dur mais indispensable. Et la baisse des prix du pétrole facilite la mission. L’Egypte a le potentiel pour progresser, mais cela ne se réalisera que si le gouvernement décide de faire face sérieusement aux questions épineuses.
— Mais la suppression des subventions à l’énergie n’engendrera-t-elle pas une hausse des prix qui pèsera sur les classes pauvres ?
— Oui, sûrement. Et pour être honnête, les ressources du gouvernement sont limitées et le fait de réaliser la justice sociale et de récompenser les classes les plus modestes par les subventions est une tâche difficile actuellement. Nul pays n’a réalisé la relance économique sans en payer le prix. La relance économique est un travail dur et nécessite des mesures d’austérité pendant une certaine période, avant de se remettre sur la bonne voie.
— Le lourd fardeau de la dette, qui représente actuellement 90 % du PIB, ne représente-t-il pas un défi à la relance économique ...
— Le fait d’emprunter pour financer les besoins de l’Etat et les projets de relance en soi est un moyen essentiel pour réaliser la croissance économique. Or, si la dette dépasse les limites internationales normales, elle deviendra un danger qui crée la confusion et menace la croissance économique. Le taux international moyen est de 60 %. Cela ne veut pas dire que l’Egypte risque une crise. Car elle pourra facilement oeuvrer à réduire ce pourcentage par l’investissement et ses retombées. Si elle ne réussit pas la tâche, c’est là le danger.
— Des rumeurs affirment que le gouvernement a l’intention d’obtenir un crédit du FMI qui assure l’absence de tractations. Qu’en est-il réellement ?
— Tout Etat qui a la volonté de réformer ne peut pas rater l’occasion de coopérer avec les institutions financières, surtout le FMI. Les responsables égyptiens et les responsables du FMI se sont mis d’accord sur les moyens de réformer l’économie égyptienne. Le gouvernement ne refuse pas de coopérer avec les institutions financières, mais il cherche un programme qui va de pair avec ses besoins et intérêts économiques. Un programme, dont les conditions sont compatibles avec la situation de l’Etat. Un Etat ne manque aucune option de financement que si elle ne va pas de pair avec ses politiques et ses nécessités. L’Egypte possède son propre programme de réformes et a besoin de coopérer avec les institutions de financement pour l’exécuter. Et à cet égard, les responsables gouvernementaux ont discuté avec les responsables du fonds de leur programme, et ces derniers l’ont apprécié. A noter que le FMI est une institution de financement et n’oblige pas le pays à exécuter certaines mesures. Ce climat d’entente entre l’institution mondiale et l’Egypte semble propice pour qu’elle bénéficie d’un prêt du FMI i.
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