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RCA : Les anti-balaka de retour sur scène

Sabah Sabet avec agences, Mercredi, 15 octobre 2014

Bangui est de nouveau en proie à la violence. Ni la force internationale, ni le nouveau gouvernement n’ont pu faire baisser la tension qui reste vive au pays.

RCA
Les violences intercommunautaires ont causé la mort de nombreux réfugiés. (Photo : Reuters)

Des tirs d’armes lourdes et légères entendus dans les quartiers nord, des incidents éclatés, l’aéroport de la capitale fermé, des milliers de personnes fuient leurs foyers, grève des chauf­feurs de taxis qui protestent contre la mort d’un des leurs, tué mercredi dernier, laissent la capi­tale paralysée : telle est la scène à Bangui, la capitale de la Centrafrique, un pays qui souffre depuis décembre 2013 de violence interconfes­sionnelle et politique.

Bangui est le théâtre de violents affrontements depuis la semaine dernière, les violences inter­communautaires ont causé dans un premier bilan 10 morts et une vingtaine de blessés. Des incidents ont encore fait deux morts, alors que les forces nationales et internationales, fran­çaises, européennes, onusiennes, étaient déployées dans la ville depuis le déclenchement de violence. Les accrochages les plus sérieux ont eu lieu dans le quartier de Boy-rabe, dans le nord de la ville, un fief de milices anti-balaka. Ces miliciens qui s’étaient rendus tristement célèbres par leur chasse aux musulmans au début de l’année ont édifié des barricades et ont affronté des hommes, notamment burundais, de la Minusca, la force de maintien de la paix des Nations-Unies. La tension est devenue plus vive après la mort jeudi dernier d’un casque bleu dans une embuscade contre un convoi de la Minusca. L’attaque a également fait neuf bles­sés, dont un grave. C’est la première fois qu’un soldat de la force onusienne soit tué depuis le début de son déploiement, le 15 septembre. Environ 2000 militaires français sont déployés dans le cadre de l’opération Sangaris, aux côtés des 6700 hommes de la Minusca, la Mission de l’Onu en République centrafricaine. Lancée le 5 décembre 2013, l’opération Sangaris vise à rétablir un niveau de sécurité minimal en République centrafricaine et à accompagner la montée en puissance progressive de la mission onusienne.

Ces violences ont provoqué l’exode d’au moins 3500 habitants de la capitale, selon le gouvernement centrafricain. Pour leur part, les anti-balaka ont réclamé la démission de la prési­dente de transition, Catherine Samba Panza, et ont indiqué « avoir suspendu la participation au gouvernement de leurs deux ministres », chargés de l’environnement et du tourisme. Mais lors d’une rencontre samedi avec la présidente, des responsables des anti-balaka ont annoncé qu’ils n’exigent plus directement la démission de la présidente, mais ils réclament celle du gouver­nement, la libération de leurs responsables actuellement sous les verrous, l’arrêt de la traque de leurs hommes, la réintégration de leurs membres qui ont été révoqués de la fonction publique et l’application de l’accord de fin des hostilités signé à Brazzaville en juillet.

Mme Montaigne, porte-parole de la prési­dente, a qualifié ces revendications de « demandes difficiles pour la transition ». De son côté, le ministre de la Défense, Aristide Sokambi, a exhorté les militaires à regagner leurs casernes, où ils sont censés être consignés depuis vendredi. « Il a été constaté avec amer­tume que des hommes en arme et arborant la tenue militaire se livrent à des actes de barbarie sur la paisible population de Bangui. A cet effet, le chef d’état-major des armées, les autorités militaires et moi-même, adressons une sévère mise en garde à l’endroit de tous ceux des élé­ments des FACA (Forces armées centrafri­caines) qui se révéleraient comme étant les auteurs des actions constatées », a-t-il souligné, les menaçant de sanctions. Outre les anciens soldats, des hommes appartenant à des groupes armés portent également des treillis. La justice a parallèlement annoncé l’ouverture d’une enquête sur ces violences. « Les événements de ces derniers jours ont entraîné des pertes en vies humaines. (...) Toutes ces graves violations des droits humains ne sauraient rester impunies », a déclaré dans un communiqué Ghislain Grézenguet, le procureur de Bangui, appelant la population à coopérer avec la justice.

Selon certains observateurs, il s’agit d’un mouvement concerté des anti-balaka, outrés d’avoir vu le pouvoir leur échapper après l’éviction des rebelles, majoritairement musul­mans, de la Séléka fin 2013. Et ils auraient forgé une alliance de circonstance avec des éléments de la Séléka. Des diplomates en poste à Bangui disent d’ailleurs craindre une attaque de la capitale par un rassemblement d’anti-balaka.

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