En déployant, le 5 décembre dernier, 1 600 militaires dans son ancienne colonie, le président français François Hollande avait prédit une mission rapide en Centrafrique et demandé à ses troupes de désarmer les belligérants afin de maintenir la paix et la stabilité. Trois mois plus tard, le désarmement reste un vaste chantier et l’opération Sangaris soutenue par une force africaine (Misca) composée de 6 000 hommes n’a pas pu arrêter les violences, attisées par les vengeances, qui perdurent entre chrétiens et musulmans, et le pays reste secoué par des cruautés quotidiennes.
Face à cette situation, la France a décidé de maintenir sa présence en Centrafrique. Et le président français s’est à nouveau rendu à Bangui vendredi dernier, où il s’est entretenu avec la présidente de transition, Catherine Samba Panza. Hollande a déclaré que l’enjeu pour stabiliser la Centrafrique, en proie à des violences intercommunautaires, était d’« établir un Etat » dans un pays où l’administration est paralysée et a disparu de régions entières. « Maintenant l’enjeu, ce n’est même pas de rétablir, mais d’établir l’Etat » et pour cela « il faut commencer par payer les fonctionnaires ». « Il faut éviter qu’il y ait la moindre tentation de partition à l’est de la Centrafrique », a déclaré le chef de l’Etat français dans une allocution devant les militaires français de l’opération Sangaris, dont les effectifs ont été portés à 2 000 hommes. Car le but principal de cette visite était surtout de remonter le moral des soldats français. Hollande a salué l’action des soldats français qui ont « sauvé des milliers de vie ».
En effet, à l’issue d’un débat au cours duquel le gouvernement français a souligné l’urgence de passer le relais aux Nations-Unies, le Parlement français a autorisé, mardi 25 février, à une large majorité la prolongation au-delà de quatre mois de l’opération militaire française Sangaris en Centrafrique. Certains groupes parlementaires ont pourtant exprimé des tiraillements et des doutes, sur les risques d’enlisement et l’insuffisance du dispositif français. Ainsi, ils réclamaient notamment un passage de relais accéléré à une force de maintien de la paix des Nations-Unies.
« Rien n’a été réglé, le pays est toujours à feu et à sang », avait résumé un député de l’opposition de droite, Eric Woerth. « Nos efforts ont commencé à porter leurs fruits. L’embrasement généralisé qui menaçait a été évité », a de son côté estimé le premier ministre français Jean-Marc Ayrault.
Or, sur le terrain, la situation humanitaire est catastrophique en RCA, surtout pour les musulmans qui s’exposent à des massacres par des groupes armés (anti-balaka). Des dizaines de milliers de musulmans ont fui vers le nord. Le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations-Unies (HCR) a lancé un cri d’alarme à propos de 15 000 personnes au moins, essentiellement des musulmans, encerclées par des groupes armés en 18 lieux différents dans le nord-ouest et le sud-ouest du pays.
« Il y a un grand risque d’attaques et ils ont besoin d’urgence d’une meilleure sécurité », a déclaré à Genève Adrian Edwards, porte-parole du HCR. « Les atrocités sont devenues fréquentes », a-t-il souligné, et « le nombre des troupes est largement insuffisant en considérant la taille du pays et la gravité de la crise » .
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