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Difficiles tentatives d’apaisement au Soudan

Sabah Sabet , Mercredi, 03 janvier 2024

La rencontre initialement prévue le 29 décembre entre Al-Burhan et Hemetia été annulée. Elle devrait se tenir courant janvier. En attendant, aucun répit n’est observé dans la guerre au Soudan.

Difficiles tentatives d’apaisement au Soudan
Selon l’ONU, le Soudan a besoin d’une aide d’urgence de plus de 75 millions de dollars pour faire face à la crise alimentaire actuelle. (Photo : AP)

« Une action urgente est nécessaire pour stopper l’aggravation du conflit au Soudan, où les crises humanitaire et sanitaire empirent du fait d’un nouveau déplacement de centaines de milliers de personnes, principalement des femmes et des enfants ». Sur X, vendredi 29 décembre, le directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, tire la sonnette d’alarme sur la situation au Soudan, théâtre d’un conflit entre l’armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR).

Une déclaration qui intervient alors qu’une rencontre-clé, perçue comme une lueur et initialement prévue le 29 décembre à Djibouti entre le dirigeant de l’armée, Abdel-Fattah Al-Burhan, et le chef des FSR, Mohamed Hamdan Daglo, dit Hemeti, a été annulée. Dans un communiqué, le ministère soudanais des Affaires étrangères a précisé que Djibouti avait informé que Hemeti ne pourrait pas se rendre pour des raisons techniques et qu’une tentative de coordination serait faite pour organiser la réunion en janvier. Le ministère soudanais a souligné qu’Al-Burhan avait officiellement exprimé son accord pour la tenue de la réunion, tout en accusant la direction des FSR de « tergiverser et de ne pas agir rationnellement, montrant peu de volonté d’arrêter la destruction du Soudan et de son peuple ».

De son côté, Hemeti a achevé dimanche 31 décembre une tournée en Afrique de l’Est, comprenant l’Ouganda, l’Ethiopie et Djibouti. Au coeur des discussions, les efforts de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (Igad) — dont l’Ouganda et l’Ethiopie sont membres, et dont Djibouti occupe la présidence, pour amener à la table des négociations les deux hommes. Une tournée mal vue par Al-Burhane, qui, dans un discours prononcé dimanche 31 décembre à l’occasion de la fête nationale du Soudan, a appelé certains pays anonymes de la région, sans les nommer, à cesser de s’ingérer dans les affaires soudanaises et à soutenir les FSR, selon l’agence de presse soudanaise (SUNA). Dans son discours, Al-Burhan a dit qu’il n’existe que la seule voie pour une sortie de crise, le retrait des FSR de l’Etat d’Al-Jazira et du reste des villes du Soudan comme cela a été convenu dans la Déclaration de Djeddah, ainsi que la restitution de tous les biens des citoyens et du gouvernement pillés. Ce qui, de fait, éloigne les perspectives de paix.

En fait, deux initiatives concurrentes ont été proposées pour réunir les dirigeants militaires soudanais. L’une soutenue par l’IGAD, l’autre par l’ancien premier ministre Abdullah Hamdouk. La semaine dernière, Hemeti avait déclaré son accord pour rencontrer Al-Burhan en vertu de l’initiative de Hamdouk, sans faire référence à l’invitation de l’IGAD.

Autant d’efforts qui peinent à aboutir. Selon les analystes, ce report était attendu compte tenu de la situation sur le terrain. « La guerre se poursuit et il n’existe pas de volonté réelle de négocier, surtout de la part de Hemeti, dont les forces se sont emparées de la majeure partie de l’Etat d’Al-Jazira et de sa capitale, Wad Madani, au sud et continuent leur percée vers d’autres territoires. Donc, Hemeti n’acceptera sans doute pas de se retirer de ces territoires lors des négociations », explique Amany El-Taweel, spécialiste des affaires africaines et du Soudan au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. L’analyste précise que l’IGAD allait proposer l’idée de l’Union africaine d’intervenir par le biais de forces africaines, ce qui est rejeté par Al-Burhan.

Lourd bilan humanitaire

En outre, les appels à armer la population qui se sont multipliés ces derniers jours avec l’avancée des paramilitaires vers le sud font planer le spectre d’une guerre civile totale. En effet, effrayés par les violences contre les civils dont sont accusées les FSR, des citoyens ont lancé une campagne « de résistance populaire armée » dans d’autres Etats, ceux du Nil blanc, du Nil, de Gedaref, du Nord, de Kassala et de la mer Rouge. Dans les zones qu’elles ont conquises, les FSR ont, de leur côté, exigé des habitants qu’ils fournissent des volontaires afin de les armer pour « protéger leur territoire ».

Déclenché à la mi-avril dans diverses régions du Soudan, le conflit a déjà provoqué un lourd bilan humanitaire. Plus de 12 000 Soudanais ont perdu la vie et des milliers ont été blessés. L’Onu estime qu’au moins 7,1 millions de personnes ont été déplacées. L’Organisation internationale pour les migrations a également souligné que près de 300 000 personnes ont fui les combats dans l’Etat d’Al-Jazira suite à l’invasion des FSR le 18 décembre dernier. Cet Etat accueille également des milliers de personnes fuyant les affrontements à Khartoum. La situation est particulièrement critique au Darfour (ouest), la région la plus touchée par les combats avec la capitale Khartoum et le Kordofan (sud).

Selon l’Onu, le Soudan a besoin d’une aide d’urgence de plus de 75 millions de dollars pour faire face à la crise alimentaire actuelle. Raison pour laquelle le Conseil de sécurité a appelé la semaine dernière les parties au conflit à cesser immédiatement les hostilités et à s’engager en faveur d’une solution négociée. En vain.

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