La prise récente, par l’armée fédérale, de plusieurs villes qui étaient aux mains des rebelles fait pencher la balance. (Photo : AFP)
C’est sous l’égide de l’Union Africaine (UA) que se sont ouvertes, lundi 24 octobre en Afrique du Sud, des négociations entre les autorités rebelles du Tigré (nord de l’Ethiopie) et le gouvernement fédéral d’Addis-Abeba. L’objectif de ces négociations, qui suscitent beaucoup d’espoir à l’international, est de tenter de mettre un terme au conflit meurtrier qui oppose, depuis novembre 2020, les forces rebelles tigréennes à l’armée fédérale éthiopienne, appuyée par l’armée érythréenne. De précédents pourparlers, convoqués début octobre en Afrique du Sud par l’UA, avaient fait long feu avant même de commencer. L’UA a récemment mis sur pied une « troïka » de médiation dirigée par l’ancien président nigérian, Olusegun Obasanjo, assisté de l’ex-président kényan, Uhuru Kenyatta, et de l’ancienne vice-présidente sud-africaine, Phumzile Mlambo-Ngcuka.
C’est sans doute la récente défaite des rebelles dans plusieurs localités qui les a poussés à accepter de participer aux pourparlers de paix en Afrique du Sud. Une défaite qui les a aussi poussés à retirer leurs troupes vers les montagnes, suite à la récente intensification des combats au Tigré, pris en tenaille par les forces fédérales éthiopiennes, épaulées au nord par l’armée de l’Erythrée— pays qui borde la frontière nord du Tigré— et au sud par des troupes des régions éthiopiennes voisines.
Avant le début des pourparlers, deux réunions ont été tenues vendredi 21 octobre. La première à huis clos du Conseil de sécurité des Nations-Unies, la deuxième par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA. Lors de cette réunion, le haut représentant de l’UA pour la Corne de l’Afrique, l’ancien président nigérian, Olusegun Obasanjo, qui mène les efforts de médiation, a « informé le Conseil sur le processus de paix pour l’Ethiopie mené par l’UA », a indiqué, sans plus, sur Twitter, l’organe en charge des conflits et questions de sécurité au sein de l’organisation panafricaine.
« Ces réunions démontrent la grande inquiétude de la communauté internationale concernant la situation dans le nord de l’Ethiopie », a indiqué à Washington le porte-parole du département d’Etat, Ned Price, qui a précisé que l’envoyé spécial américain pour la Corne de l’Afrique, Mike Hammer, est depuis plusieurs jours à Addis-Abeba « où il soutient les efforts de l’UA pour lancer les pourparlers ».
Coup dur pour le TPLF
Les forces éthiopiennes et érythréennes se sont notamment emparées la semaine dernière, après plusieurs jours de bombardements, de Shire, une des principales villes du Tigré, peuplée d’environ 100 000 habitants avant la guerre et qui accueillait de nombreux déplacés, ainsi que les localités d’Alamata et de Korem, auparavant contrôlées par les rebelles tigréens. Shire, avec son aéroport et ses liaisons routières avec Mekele, est une ville stratégique, sa perte est un coup dur pour le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Elle est considérée par le premier ministre éthiopien comme un point de ravitaillement pour les rebelles. A moins de 100 km de Shire se trouvent deux autres villes importantes, les villes historiques Axum et Adwa. Le gouvernement fédéral pourrait se diriger vers Axum et Adwa, ce qui lui donnerait alors accès à l’autoroute principale menant à Mekele.
Les combats avaient repris le 24 août dans le nord de l’Ethiopie, mettant fin à cinq mois de trêve et aux maigres espoirs de pourparlers que celle-ci avait suscités. UA, Onu, UE et Etats-Unis, notamment, se sont inquiétés ces derniers jours de l’intensification des combats au Tigré, pris en tenaille par les forces fédérales éthiopiennes, épaulées au nord par l’armée de l’Erythrée.
« Les avancées de l’armée fédérale contre le TPLF au Tigré après deux ans de combat sont essentiellement dues au soutien largement partagé par des puissances mondiales, ainsi que régionales », explique la chercheuse Mona Soliman. « La Russie, la Chine, mais aussi l’Iran et les Emirats arabes unis ont fourni d’importants soutiens militaires et politiques au régime, et ce, pour des raisons stratégiques et surtout économiques », précise-t-elle.
Addis-Abeba crie déjà victoire. Jeudi 20 octobre, le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, déclarait, lors de l’inauguration d’un établissement scolaire, que la guerre allait « se terminer et la paix l’emporter ».
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