Que peut-on attendre de la nouvelle Administration américaine envers l’Afrique de l’Est ? Quels sont les nouveaux alliés de Washington, ses rivaux au continent et dans cette zone? Quel sera l’impact d’éventuels changements sur la région? Autant de questions qui ont été discutées par un groupe d’experts de politiques et d’intellectuels lors d’un webinaire organisé le mardi 9 mars par la Fondation Kemett Boutros-Ghali. « Ce webinaire s’inscrit dans le cadre d’une série d’activités que la Fondation organise en reconnaissance et conviction de la vision du Dr Boutros Boutros-Ghali sur la nécessité de prêter attention au continent africain », a indiqué l’ambassadrice Leila Ahmed Bahaa El-Din, directrice exécutive de la Fondation à l’ouverture du séminaire. « Bien que l’Afrique de l’Est, une zone extrêmement pauvre, souffre d’une série de conflits, de crises et de l’ingérence de différentes parties étrangères, elle jouit d’une importance stratégique, surtout pour le commerce mondial, et d’une richesse en ressources naturelles, c’est pourquoi elle est au coeur des intérêts internationaux », explique Mohamad Fayeq, président du Conseil des droits de l’homme, et l'un des participants au webinaire. Ce dernier a insisté sur un point de convergence entre les puissances internationales au sujet de cette région: la nécessité de sécuriser la navigation en mer Rouge. « C’est la pierre angulaire de la concurrence régionale et internationale, par où passent 20% du commerce mondial et 30% du gaz liquéfié » ; un emplacement extrêmement important du point de vue stratégique, explique Amr Moussa, ancien secrétaire général de la Ligue arabe et ancien ministre égyptien des Affaires étrangères. Selon lui, si le nouveau président américain n’a pas dévoilé sa politique envers cette région, la vision selon laquelle Washington compte se désengager de l’Afrique en faveur de l’Asie ne s’applique pas à la Corne de l’Afrique, justement en raison de son importance dans le bras de fer opposant Washington à Pékin. « La priorité de Washington dans cette région est d’affronter la Chine dans des domaines stratégiques et de développement », explique Moussa, en ajoutant que la politique américaine prend conscience de l’importance de cette région. « On prévoit donc d’importants projets américains », estime Moussa. En fait, la Chine est l’une des puissances les plus impliquées en Afrique, surtout avec son projet « La Ceinture et la Route ». En outre, l’existence de bases militaires américaines, chinoises, turques et d’autres accentuent la concurrence entre les grandes puissances dans cette zone. Selon Moussa, cette concurrence peut être une source de crises et non de stabilité « comme c’est le cas au Proche-Orient », dit-il, espérant que les Africains sauront s’en distancier.
Pour Dr Amani Abou-Zeid, commissaire de l’Union africaine pour les infrastructures, l’énergie, l’informatique et le tourisme, il existe une nouvelle orientation américaine envers le continent. « Washington cherche à nouveau à travailler avec l’Union africaine. De plus, le président américain envisage de nommer un envoyé spécial pour la Corne de l’Afrique », indique-t-elle, en ajoutant que le président Joe Biden a adressé un discours au récent sommet africain, dans lequel il a souligné l’intérêt de son Administration pour les institutions démocratiques, les droits de l’homme, les femmes, l’intégration des personnes souffrant d’un handicap et des différentes ethnies.
Abou-Zeid estime en outre que la cybersécurité, l’économie numérique et le développement sont les questions-clés sur lesquelles tous les pays africains doivent travailler. « Il est nécessaire d’accorder une attention particulière à la cybersécurité, en particulier dans les relations de l’Union africaine avec la Chine, et dans les questions des méga-données ». Aussi, d’après elle, si cette région enregistre des taux de développement impressionnants, elle nécessite un examen et une étude des conditions économiques dans la période à venir. « Les besoins de la région sont importants, mais les conflits internes et les conflits entre les pays entravent le vrai développement. Or, ce processus de développement est d’autant plus nécessaire qu’il est urgent de redistribuer les richesses de manière plus équitable », conclut-elle .
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