Le camp du chef de l’Etat sortant, Macky Sall, n’a pas attendu la fin des opérations de dépouillement du premier tour de l’élection présidentielle sénégalaise, tenue dimanche 24 février, pour crier victoire. Son premier ministre, Mahammed Boun Abdallah Dionn, a en effet affirmé dans la nuit, soit quelques heures à peine après la fermeture des bureaux de vote, que Macky Sall avait récolté « au moins 57 % » des suffrages. « Les résultats compilés nous disent aujourd’hui qu’il nous faut féliciter le président Macky Sall pour sa réélection », a-t-il déclaré. Une heure plus tôt pourtant, les deux principaux adversaires du président sortant, Idrissa Seck et Ousmane Sonko, avaient écarté cette possibilité. « A ce stade, un deuxième tour s’annonce », a déclaré le premier. « Dans l’état actuel du dépouillement, aucun candidat, je dis bien aucun candidat, moi y compris, ne peut se proclamer vainqueur de l’élection présidentielle », a ajouté le second, lors d’une conférence de presse commune aux deux opposants. Officiellement, les résultats doivent être proclamés ce vendredi. Un éventuel second tour, (si second tour il y a) se tiendrait le 24 mars, compte tenu des délais légaux de proclamation, de possibles contestations et de la campagne.
En attendant les résultats officiels et définitifs, les déclarations des candidats créent un état de confusion allant à l’encontre de l’atmosphère dans laquelle s’est déroulé le scrutin. « Le scrutin s’est déroulé de manière globalement satisfaisante sur toute l’étendue du territoire national et à l’étranger », a indiqué la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) dans un communiqué diffusé à la fin de la journée de vote. La CENA a estimé que le taux de participation avait dépassé les 42 %. Outre cette bonne affluence, le scrutin— dans lequel le président sortant Macky Sall avait quatre adversaires: Idrissa Seck, Ousmane Sonko, Madické Niang et Issa Sall— s’est déroulé sans heurt. Les forces de l’ordre ont été largement mobilisées et leur intervention rapide a calmé quelques tensions avant qu’elles ne s’amplifient. A noter aussi que peu de retard a été enregistré à l’ouverture des bureaux avec un dispositif complet. Chose rare lors des précédents scrutins.
Fort de la statistique qui a vu tous ses prédécesseurs effectuer au moins deux mandats, Macky Sall, 56 ans, veut donc piloter pour les cinq prochaines années la deuxième phase (2019-2023) de son plan « Sénégal émergent » et même l’emporter dès ce premier tour. Une prouesse réussie pour la dernière fois en 2007 par son ancien mentor, Abdoulaye Wade (2000-2012). Au pouvoir depuis 2012, le chef de l’Etat a concentré son action sur l’économie, pas sur le volet social. Ses concurrents, rescapés du nouveau système de parrainages et des décisions judiciaires qui ont éliminé des rivaux de poids, espèrent bien contrarier ses ambitions, à commencer par l’ancien premier ministre Idrissa Seck, 59 ans, et le député « antisystème » et ex-inspecteur des impôts Ousmane Sonko, 44 ans, qui ont tous deux prophétisé sa chute dès dimanche soir. En outre, pour la première fois depuis 1978, ni le Parti Socialiste (PS) ni le Parti Démocratique Sénégalais (PDS, libéral) d’Abdoulaye Wade ne présentent leur propre candidat. Mais la famille libérale est particulièrement bien représentée, avec Macky Sall, Idrissa Seck et l’ancien ministre Madické Niang, 65 ans, tous les trois issus du PDS. Tous deux élus députés en 2017, Ousmane Sonko, partisan déclaré du patriotisme économique, et le président d’université privée Issa Sall, 63 ans, proche d’un mouvement religieux issu de la puissante confrérie tidiane, sont en revanche de nouveaux venus sur la scène politique nationale .
Lien court: