Menace terroriste, violence intercommunautaire, surtout dans le nord, situation économique critique, polémique autour du fichier électoral, scepticisme de l’opposition. C’est dans ces circonstances que s’est tenu, dimanche 29 juillet, le premier tour de l’élection présidentielle au Mali. Un scrutin qui, malgré tout, s’est déroulé généralement dans le calme, à l’exception de quelques incidents observés dans le nord et dans le centre du pays où le vote n’a pas pu se tenir : dans certains centres électoraux du nord, le matériel a été détruit par des assaillants.
Plus de 8,5 millions de Maliens étaient invités à partager les 24 candidats qui étaient en lice pour ce premier tour dont les résultats devraient être rendus publics ce mercredi. S’ils sont 24, les deux principaux challengers restent, comme en 2013, Ibrahim Boubacar Keita, l’actuel président, candidat à sa succession, et Soumaïla Cissé, le chef de file de l’opposition. Mais d’autres candidats pourraient créer la surprise, comme l’ancien premier ministre, Cheikh Modibo Diarra, ou le riche homme d’affaires Aliou Diallo. Si personne ne l’emporte en ayant la majorité des voix à l’issue de ce premier scrutin, le second tour est prévu pour le dimanche 12 août, le scénario le plus probable.
Le vote s’est fait sous haute surveillance avec plus de 30000 membres des forces de sécurité, nationales et étrangères, qui sont mobilisés, selon le ministère de la Sécurité, sur l’ensemble du territoire, afin de sécuriser les bureaux. En outre, un nombre record d’observateurs de la Communauté Economique Des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de l’Union Africaine (UA), de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et de l’Union Européenne (UE) se sont rendus sur place pour veiller au bon déroulement des opérations. Mais aucune de ces missions n’a couvert l’intégralité du territoire pour des raisons sécuritaires.
En fait, tant pour les Maliens eux-mêmes que pour la communauté internationale, ce scrutin est un test et sa réussite une nécessité, les deux parties craignant l’allongement de la menace djihadiste dans le Sahel via le Mali. Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, qui s’était rendu au Mali fin mai dernier, a « encouragé tous les acteurs politiques maliens à s’engager à faire de ce scrutin un processus pacifique, libre et transparent et à recourir aux institutions prévues à cet effet en cas de litiges », a indiqué son porte-parole la veille du scrutin.
Si les élections de 2013 ont permis de « rétablir l’ordre constitutionnel », celles-ci représentent pour les Maliens le « défi » de prouver que « le processus démocratique est irréversible », avait auparavant affirmé le chef de la mission de l’Onu au Mali (Minusma), Mahamat Saleh Annadif, en soulignant que la situation du pays restait « fragile ». Mais les questions sécuritaires restent centrales. La communauté internationale, présente militairement avec la force française Barkhane, qui a pris le relais de l’opération Serval lancée en 2013 contre les djihadistes, et avec les Casques bleus de l’Onu, attend du vainqueur une relance de l’accord de paix signé en 2015 par le camp gouvernemental et l’ex-rébellion à dominante touareg, dont l’application accumule les retards.
Malgré cet accord, les violences djihadistes ont non seulement persisté, mais se sont propagées du nord vers le centre et le sud du pays, puis au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires. « Cette élection n’est rien d’autre que la poursuite d’un mirage, et nos peuples n’en récolteront que des illusions, comme ils en ont pris l’habitude », a une fois de plus menacé le chef de la principale alliance djihadiste du Sahel, liée à Al-Qaëda, le Touareg malien Iyad Ag Ghaly, dans une vidéo diffusée sur Internet avant le vote.
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