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Sommet de l’UA : Le continent face aux défis d’avenir

Sabah Sabet avec agences, Mercredi, 31 janvier 2018

Le 30e Sommet de l’Union Africaine (UA), tenu cette semaine à Addis-Abeba, s’est penché sur la corruption en Afrique, la lutte contre le terrorisme et les crises régionales. Une réforme de l’institution est à l’ordre du jour.

Sommet de l’UA

Lutte contre la corruption, intégration, libre circulation des personnes, migration, terrorisme, paix et sécurité. Tels étaient les dossiers discutés par les dirigeants africains lors du 30e Sommet de l’Union Africaine (UA), tenu à Addis-Abeba, en Ethiopie, les 28 et 29 janvier. Le sommet était organisé sous le thème : « Gagner la lutte contre la corruption : un chemin durable vers la transformation de l’Afrique ». En effet, la corruption ronge le continent depuis des années. Actuellement, plusieurs chefs d’Etat en sont accusés, notamment le Sud-Africain Jacob Zuma. Mais au-delà des dirigeants, le problème touche une grande partie des Africains dans toutes les strates de la société. C’est ce qui ressort du dernier index sur la perception de la corruption, réalisé par l’ONG Transparency International. Selon Amira Abdel-Halim, experte des questions africaines au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, la lutte contre la corruption est une affaire de priorité pour le continent, certains pays africains comme la Somalie, le Soudan du Sud ou encore le Kenya sont en tête des pays les plus corrompus au monde. « Les richesses de l’Afrique sont gâchées par certains responsables corrompus », indique l’experte. Bien que l’UA ait adopté, en 2003, une convention sur la prévention et la lutte contre la corruption, le phénomène s’aggrave jour après jour.

Dans son rapport 2016 sur le sujet, la Commission économique pour l’Afrique explique que « l’absence de bonne gouvernance » engendre « des institutions faibles, un équilibre inefficace des pouvoirs, des cadres juridiques et réglementaires insuffisants et des mécanismes d’exécution peu efficaces ». Autant de facteurs qui favorisent la corruption. En s’intéressant à ce thème, l’UA s’engage donc dans une lutte déjà amorcée par plusieurs dirigeants. Le président ghanéen, Nana Akufo- Addo, a par exemple lancé, début janvier, un projet de loi portant sur la création d’un Bureau du procureur spécial (OSP), un organisme chargé d’enquêter sur les affaires de corruption et qui peut viser les fonctionnaires et les hommes politiques. Outre la corruption, les crises au Soudan du Sud, au Congo-Kinshasa et au Mali retiennent tout particulièrement l’attention des dirigeants africains. Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, avait exhorté les membres du Conseil de sécurité de l’Onu, notamment les Etats-Unis de Donald Trump, à donner les moyens financiers nécessaires au G5 Sahel.

Terrorisme et migration clandestine

Les fléaux que sont le terrorisme et l’immigration étaient eux aussi à l’ordre du jour des discussions. Dans son discours devant le sommet, Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’UA, a déclaré que le terrorisme continuait de faire des ravages dans le bassin du Lac Tchad, le Sahel et la Corne de l’Afrique. Il a exhorté tous les Etats membres de l’UA, ainsi que d’autres acteurs concernés, « à unir leurs efforts pour trouver des réponses à ces crises et réaliser l’objectif de faire taire les armes à l’horizon 2020 ». Quant à la question de la migration, Mahamat a évoqué des tendances migratoires dangereuses, encourageant les dirigeants africains à créer des opportunités dans le but de mettre fin à la migration clandestine. Autre question abordée par les chefs d’Etat, celle des élections 2018. Cette année, pas moins de 18 scrutins électoraux se dérouleront sur le continent. Parmi eux, celui du Zimbabwe et de la République Démocratique du Congo (RDC). Les dirigeants africains ont souligné que l’UA déploierait tous ses efforts pour garantir des élections libres, justes, crédibles et qui ne soient pas entachées de violence. Le bon déroulement d’élections libres sous son égide est une opportunité pour l’institution d’agrandir son influence, tout en prouvant son efficacité.

Zone de libre-échange

Les questions d’ordre économique et financier ont pris une bonne partie des discussions lors du sommet. En premier lieu, celle de la création d’une zone de libreéchange continentale incluant les 54 Etats, qui abolirait les barrières tarifaires et douanières entre les pays et permettrait à 1,2 milliard de consommateurs de renforcer la compétitivité africaine. Le projet, évoqué pour la première fois en 2012 lors de la 18e session ordinaire de la Conférence de l’UA, devait à l’origine être mis sur pied en 2017. La libéralisation du ciel — l’Open Sky africain — est l’un des douze projets prioritaires de l’agenda 2063 de l’UA. 23 pays du continent y ont déjà donné leur accord. Enfin, la réforme de l’organisation ellemême et de ses sources de financement était à l’ordre du jour. En juillet 2016, le chef d’Etat rwandais, Paul Kagamé, avait été mandaté par l’Assemblée des Etats de l’UA de leur soumettre des propositions de mesures pour rendre l’institution panafricaine plus efficace et plus autonome sur le plan budgétaire. La commission mise en place à cet effet par le président rwandais réunit des experts reconnus en la matière, comme l’ancien président de la Banque africaine de développement, Donald Kaberuka, ou Carlos Lopes, ancien secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique. Elle a remis son rapport il y a un an. Ses propositions vont de l’application d’une taxe de 0,2 % sur les produits non africains importés en Afrique à une meilleure division des compétences entre l’UA et les organisations régionales, en passant par un audit du travail des commissions et la suppression d’un sommet sur deux qu’effectue l’UA aujourd’hui. Ces mesures ont été validées par l’Assemblée des chefs d’Etat lors du sommet de janvier 2017. Le rapport du bureau de suivi de l’application des réformes, mis en place par le président de la Commission de l’UA, a été remis aux chefs d’Etats africains réunis en sommet. Plus de 80 % des programmes de l’organisation panafricaine sont assurés par ses partenaires occidentaux. « 60 % du financement de l’UA viennent hors d’Afrique, les Etats- Unis et l’Union européenne présentant les deux principales sources de financement. Cela cause un problème de dépendance de l’organisation », explique Abdel-Halim. A côté du financement étranger, 5 grands pays africains financent l’UA, mais certains ne versent pas régulièrement leurs contributions. « Finalement, il faut que l’UA cherche à créer des propres projets, ce qui lui permettra de financer ses programmes sans devoir dépendre de ses partenaires occidentaux », conclut Amira Abdel-Halim.

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