La tenue du référendum sur les amendements de la Constitution en Mauritanie devrait marquer le début d’une nouvelle phase dans la vie politique du pays. Selon les résultats préliminaires annoncés, le « oui » l’a largement emporté au référendum constitutionnel qui s’était tenu dans un climat tendu, ce qui constitue pour le président Mohamed Ould Abdel-Aziz une nette victoire que l’opposition refuse toutefois de reconnaître.
Les Mauritaniens ont en effet voté samedi lors de ce référendum constitutionnel, prévoyant notamment la suppression du Sénat. Le président Abdel-Aziz est convaincu de remporter « largement », alors qu’une partie de l’opposition avait appelé au boycott du scrutin. La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) n’a pas été en mesure de fournir de chiffres approximatifs du taux de participation, qui est le principal enjeu de cette élection, l’opposition radicale ayant appelé au boycott. « Nous ne sommes pas capables de vous donner un taux de participation à ce stade, cependant (...), c’est une élection réussie », a estimé le directeur des opérations électorales de la Céni, Bedenna Ould Sidi. A la mi-journée, une source proche de la Céni avait indiqué que la participation s’élevait à environ 20 % dans la capitale Nouakchott et à 40 % à l’intérieur du pays. Une forte abstention serait revendiquée comme un succès par l’opposition radicale, qui a accusé vendredi le pouvoir de « préparer une fraude à grande échelle » et averti que des violences pourraient éclater, dont le pouvoir serait, selon elle, seul responsable.
Le vote s’est déroulé à l’issue d’une campagne houleuse émaillée de violences lors de manifestations de l’opposition. « Faisant partie de la région du Sahel qui est toujours sous la menace djihadiste, le président mauritanien veut renforcer ses pouvoirs dans l’objectif de combattre le danger islamiste qui n’a pourtant pas encore touché le pays », explique un diplomate qui a requis l’anonymat.
M. Ould Abdel-Aziz, 60 ans, qui a voté samedi matin dans un bureau de vote de Nouakchott, a déclaré que ces modifications apporteraient « paix, sécurité, stabilité et développement » à son pays. Il a aussi laissé entendre qu’elles ne seraient probablement pas les dernières. « Dans deux ans, voire dix ans, d’autres amendements peuvent intervenir pour adapter notre Constitution à nos réalités », a-t-il déclaré, sans donner plus de précisions, alors qu’une partie de l’opposition le soupçonne de vouloir aller au-delà de son second mandat (le dernier, selon les règles constitutionnelles actuelles). M. Ould Abdel-Aziz a également critiqué l’opposition dite radicale, qui a appelé au boycott du référendum, estimant qu’il ne s’agissait que d’une « infime partie de l’opposition, en état de déliquescence, qui n’existe que sur le papier ou sur les réseaux sociaux ».
Pendant la campagne, cette frange de l’opposition, réunie dans une coalition de huit partis et organisations, a crié au « coup de force » du président, qui avait passé outre au rejet de son projet de révision constitutionnelle par la voie parlementaire en convoquant le référendum. Elaborée en septembre-octobre lors d’un dialogue entre le pouvoir et l’opposition dite modérée, cette révision porte sur le remplacement du Sénat par des Conseils régionaux élus et sur la suppression du médiateur de la République et du Haut conseil islamique. Elle prévoit également une modification du drapeau national, auquel seraient ajoutées deux bandes rouges. Le président fait face à une fronde du Sénat, pourtant majoritairement favorable au pouvoir, qui s’est cabré contre un texte signifiant sa disparition.
L’unique parti de l’opposition appelant à voter non, la Convergence Démocratique Nationale (CDN), a dénoncé une « campagne inégalitaire », le oui bénéficiant de la quasi-totalité du temps d’antenne officiel. Toutes les autres formations en campagne, de la majorité ou de l’opposition modérée, avaient appelé à voter oui.
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