Vingt-quatre personnes dont dix-huit femmes ont été tuées et plusieurs blessées dans le village de Kuda au nord-est du Nigeria, sept gendarmes ont été tués au camp de Nguagam qui accueille des réfugiés dans le sud-est du Niger : tels sont les bilans des deux dernières attaques criminelles, commises cette semaine par le groupe extrémiste Boko Haram. Le pire était l’attaque de la ville de Bosso (sud-est du Nigeria) le 3 juin, avec un bilan qui a été particulièrement lourd : 26 soldats tués, 112 blessés.
Depuis un an et demi, le groupe extrémiste multiplie ses incursions pas seulement sur le territoire nigérian mais aussi auprès des pays voisins : Niger, Tchad et Cameroun qui sont des cibles de Boko Haram. C’est ainsi qu’une opération majeure de la Force Multinationale Mixte (FMM), retardée depuis plusieurs mois, est annoncée comme imminente. « Le Niger et le Tchad vont lancer, en coordination avec le Nigeria et le Cameroun, une contre-offensive dans les plus brefs délais pour prendre en tenaille Boko Haram », a annoncé jeudi 9 juin le ministre nigérien de la Défense, Hassoumi Massaoudou. Dans le cadre de cette offensive au Niger, « nous préparons dans les plus brefs délais avec le Tchad une opération d’intervention au nord du Nigeria », affirme Massaoudou, en expliquant que l’opération se fera à partir du sud-est du Niger, sous le commandement de la Force multinationale mixte dirigée par le général nigérian Lamidi Adeosun. « Le Niger et le Tchad engageront immédiatement » leurs troupes. Le Nigeria lancera un mouvement à partir du sud de son territoire et « le Cameroun avancera de côté ». L’objectif est « de prendre en tenaille Boko Haram », a détaillé le ministre. Selon lui, l’intérêt stratégique c’est « d’occuper le nord du Nigeria pour protéger nos frontières », a-t-il poursuivi, lors d’une conférence de presse, tout en assurant que « l’autorisation d’occuper » cette zone était « acquise depuis longtemps » auprès d’Abuja.
Tirer les leçons du passé
En mars 2015, les armées du Tchad et du Niger avaient déjà mené une opération conjointe dans cette zone. Plusieurs villes nigérianes avaient alors été reprises à Boko Haram. Les deux forces avaient fini par se retirer, sans être remplacées par celle du Nigeria. Les insurgés étaient alors rapidement revenus dans leurs fiefs du nord-est nigérian, une région d’où ils continuent aujourd’hui de lancer des attaques sanglantes dans les zones frontalières. Il faut donc tirer les leçons du passé, c’est pourquoi cette fois, a prévenu le ministre nigérien de la Défense, « quand nous irons avec l’armée tchadienne, nous ne reviendrons plus ». Pour Hassoumi Massaoudou, il faut donc que les troupes nigériennes et tchadiennes « occupent » le nord du Nigeria, pour former un cordon de protection qui permettra de sécuriser les populations des zones frontalières. « Cela va permettre à nos populations qui sont déplacées dans la zone de revenir dans leurs villages, parce que la guerre sera portée de l’autre côté. Nous aurons ce qu’on appelle une profondeur stratégique », a précisé le ministre nigérien de la Défense. « Quand on était là-bas, il n’y avait pas eu d’attaque au Niger », a-t-il fait valoir.
Cette fois, l’opération sera différente : le Nigeria lancera un mouvement depuis le sud, et le Cameroun depuis le flanc Est pour prendre les insurgés en tenaille. Cette offensive conjointe se fera sous le commandement de la force mixte des pays riverains du lac Tchad dirigée par le général nigérian, Lamidi Adeosun. Massaoudou a par ailleurs rappelé que l’autorisation d’occuper le nord du Nigeria est acquise depuis longtemps à travers divers accords multilatéraux.
Selon l’armée nigériane, Boko Haram a été repoussé plus au nord, autour du lac Tchad. Mais les attaques répétitives démontrent que ce groupe islamiste qui a porté allégeance à l’organisation Etat Islamique (EI) n’a pas perdu de son pouvoir de nuisance. Depuis sept ans, l’insurrection de ce groupe a fait plus de 20 000 morts et 2,6 millions de déplacés.
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