Après plusieurs tentatives pour un rapprochement entre les différents groupes rivaux au Mali, l’ex-rébellion à dominante touareg du nord et une coalition armée alliée au gouvernement sont tombées d’accord cette semaine pour cohabiter pacifiquement à Kidal, bastion des insurgés où les pro-régimes sont récemment entrés sans heurts. Des centaines de membres de la Plateforme, coalition de groupes armés soutenant le gouvernement malien, sont en effet entrés sans violences le 2 février à Kidal (extrême nord-est), sous contrôle de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA, ex-rébellion). La Plateforme et la CMA avaient assuré agir en bonne intelligence, sans toutefois lever des craintes de violences entre leurs hommes.
Ces deux groupes se sont dans le passé affrontés en dépit de leur signature, en mai-juin 2015, de l’accord de paix au Mali conclu après des mois de négociations à Alger. Les combats ont cependant cessé depuis la conclusion de « pactes d’honneur » entre les belligérants le 16 octobre 2015, au terme de trois semaines de rencontres à Anéfis, près de Kidal. Samedi dernier, des représentants de la Plateforme et de la CMA se sont réunis à Kidal et, à l’issue « de longs débats », les deux parties ont notamment « réaffirmé leur engagement à résoudre tout différend entre elles par la voie du dialogue », selon leur communiqué commun reçu dimanche par l’AFP. Le texte est aussi signé par le général El Hadj Ag Gamou, officier touareg loyaliste de l’armée réputé proche de la Plateforme, et Mohamad Ag Najim, un chef militaire de l’ex-rébellion.Alghabass Ag Intalla, chef d’une des principales composantes de la CMA, avait réclamé le 3 février le retrait de la Plateforme de Kidal, en attendant les discussions avec leurs responsables, pour éviter tout risque de reprise des hostilités.« La Plateforme allégera son dispositif militaire présent à Kidal », indique le communiqué commun, précisant que « les deux parties restent fermement attachées à l’accord de paix et de réconciliation au Mal », et que des éléments de la Plateforme « intégreront les commission chargées de la gestion de la ville ».
Cet accord intervient dans un moment où l’instabilité existe toujours au Mali, surtout au nord. Les djihadistes hostiles à tout compromis sont toujours restés actifs, multipliant les attentats. Samedi dernier, le groupe Aqmi (Al-Qaëda au Maghreb islamique) a revendiqué l’attaque contre une mission de l’Onu à Tombouctou, dans le nord du Mali. L’assaut lancé sur une base de policiers nigérians de la mission de l’Onu a coûté la vie à un militaire malien, ainsi qu’à au moins quatre assaillants, selon les autorités maliennes. Dans un communiqué diffusé par l’agence privée mauritanienne Al-Akhbar, Aqmi a affirmé que l’attaque avait été menée par trois djihadistes, tous tués, et qu’elle a laissé « plusieurs soldats » morts « et d’autres blessés ». Ce n’est pas la première fois que ces groupes s’en prennent à l’Onu. En novembre dernier, ils avaient attaqué à la roquette un camp de l’Onu à Kidal, faisant trois morts : deux soldats guinéens de l’Onu et un civil. Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de djihadistes liés à Al-Qaëda. En janvier 2013, la France a lancé l’opération Serval destinée à combattre ces groupes et reprendre le contrôle du nord.
Si les forces françaises et africaines ont maintenu le contrôle de quelques villes, des zones entières échappent encore à leur contrôle. Selon Ali Bakr, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques d’Al-Ahram (CEPS) et spécialiste des mouvements djihadistes, la France a pu disperser et chasser ses groupes du nord, mais elle n’a pu mettre fin à leur existence. « Les groupes se sont échappés dans l’immense zone désertique et dans des pays voisins comme le Niger et le Nigeria. Là-bas, ils reprennent leur entraînement et obtiennent leur subvention militaire pour retourner et poursuivre leurs combats », indique Bakr. Il pense que malgré les efforts internationaux pour arriver à un accord de paix entre les différents groupes, la stabilité ne prendra pas facilement sa voie au Mali, car « plusieurs groupes sont liés à Al-Qaëda qui rejette toutes sortes d’accord de paix », conclut-il.
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