Qualifié de dernière chance, un plan de paix a été présenté samedi 7 février par la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président français, François Hollande, à la conférence de Munich, après cinq heures de négociations avec le chef du Kremlin, Vladimir Poutine. Les deux responsables ont réussi à obtenir un accord de principe de Poutine. Ce projet, dont les détails restent secrets, consiste essentiellement à mettre en oeuvre le précédent accord de Minsk signé le 20 septembre dernier entre Kiev et les séparatistes pro-russes. Selon un haut responsable du département d’Etat américain, le plan prévoirait d’accorder une plus large autonomie aux régions de l’est de l’Ukraine. Il s’appuierait sur la ligne de front actuelle et prévoirait une zone démilitarisée de 50 à 70 kilomètres de large le long de cette ligne. Cependant, plusieurs questions restent en suspens, comme le statut des territoires conquis par les séparatistes et le contrôle des frontières. « Il n’est pas certain que ce plan de paix aboutisse, mais cela vaut la peine d’essayer », a lancé Angela Merkel, qualifiant les discussions avec Poutine de « constructives et substantielles ». De leur part, les Occidentaux ont accentué la pression sur le chef du Kremlin. « Si nous ne parvenons pas à trouver un accord durable de paix, nous connaissons le scénario à venir: ce sera la guerre», a ainsi mis en garde François Hollande.
Reprise des violences
Malgré ces efforts diplomatiques en cours, l’Ukraine ne semble pas parvenir à sortir du cercle de la violence. Après un cessez-le-feu précaire, les tirs de lance-roquettes Grad ont repris samedi, faisant dix morts à Debaltseve, une ville stratégique dans ce conflit. Noeud ferroviaire entre les villes rebelles de Donetsk et de Lougansk, Debaltseve est, en effet, le théâtre depuis plusieurs semaines de combats violents entre les forces ukrainiennes contrôlant toujours la ville et les séparatistes pro-russes qui l’encerclent. Selon Amnesty international, la plupart des 25000 habitants de Debaltseve ont déjà fui la ville, qui n’abriterait plus que 7000 personnes. Face à cette reprise des violences dans l’est ukrainien, l’Occident a décidé de hausser le ton face à Moscou. Outre l’arme des sanctions qui étranglent l’économie russe, un groupe de sénateurs américains des deux partis ont demandé au président d’augmenter l’aide militaire américaine à l’Ukraine. Les critiques se multiplient à l’égard de l’Administration Obama et sa réticence à livrer à l’armée ukrainienne des munitions et des équipements lourds. Ils réclament une « aide défensive létale », comme des munitions antichars. Pour la première fois, le futur chef du Pentagone, Ashton Carter, s’est dit très enclin, samedi, à envoyer des armes à Kiev pour aider les Ukrainiens à se défendre. Une décision soutenue par le commandant des troupes de l’Otan en Europe, Philip Breedlove, qui a ouvertement défendu l’envoi d’armes à l’Ukraine. Pourtant, le président Obama passe encore en revue toutes les options et prendra sa décision « prochainement », a promis John Kerry, afin notamment de laisser une chance au plan de paix européen. Le porte-parole de la diplomatie russe, Alexandre Loukachevitch, a très vivement mis en garde les Etats-Unis contre cette éventuelle livraison d’armes létales qui porterait un « préjudice colossal aux relations entre la Russie et les Etats-Unis et ne ferait que précipiter la guerre ». Selon plusieurs experts en géopolitique, l’envoi d’armes à Kiev ne ferait que mettre de l’huile sur le feu et encouragerait Moscou à intervenir directement dans l’est ukrainien. « Ce conflit ne peut être réglé militairement. Les progrès dont l’Ukraine a besoin ne peuvent être atteints avec plus d’armes », a mis en garde Angela Merkel. Mais une question demeure: la Russie renoncera-t-elle à l’Ukraine pour éviter d’être isolée sur la scène internationale ? Ou va-t-elle s’accrocher coûte que coûte à son ex-république ? Vladimir Poutine et le président ukrainien, Petro Porochenko, ont en tout cas rendez-vous, ce mercredi à Minsk, avec leurs homologues allemand et français pour essayer de « boucler » ce projet de plan de paix. « Cette réunion aura lieu si les quatre pays se mettent d’accord d’ici là sur un certain nombre de points concernant le plan de paix », a déclaré Poutine .
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