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La France déboussolée

Abir Taleb , Vendredi, 05 juillet 2024

Après l’arrivée, pour la première fois, de l’extrême droite en tête du premier tour des législatives françaises, la France se prépare à des lendemains incertains.

La France déboussolée

Au pire, la France sera gouvernée par l’extrême droite, au mieux, elle sera ingouvernable. C’est le constat qui ressort du premier tour des législatives françaises tenues dimanche 30 juin. Le Rassemblement National (RN), parti d’extrême droite dirigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella, s’est hissé à la première place au premier tour des élections législatives anticipées. Le RN a obtenu 33,1 % des suffrages exprimés, contre 27,99 % pour le Nouveau Front populaire, une alliance de gauche, et 20 % pour le camp présidentiel, lourdement sanctionné par les Français : elle était arrivée en tête lors du premier tour des élections législatives 2022. La participation, elle, s’est élevée à 64,99 %, soit 17,5 points de plus qu’au premier tour des législatives 2022 (47,51 %.). Un record depuis 2002.

Le RN pulvérise ainsi son record de voix, toutes élections confondues, obtenues lors d’un premier tour, jusqu’alors détenu par Marine Le Pen lors de la présidentielle de 2022. Un séisme politique prévu, après la dissolution du parlement et la convocation, par le président français, Emmanuel Marcon, d’élections anticipées après une lourde défaite aux élections européennes du 9 juin dernier. Celui-ci espérait inverser la tendance et replacer son parti centriste en tête. Un pari raté. Les résultats du scrutin du dimanche 30 juin sont sans appel.

Un verdict lourd de conséquences. La première question qui se pose désormais est de savoir si la formation d’extrême droite sera en mesure de décrocher une majorité absolue au second tour. Les jours qui viennent vont être marqués par de nombreuses tractations. L’équation du second tour est encore compliquée par les accords qui peuvent transformer en duels un grand nombre de triangulaires (lorsque les électeurs d’une circonscription sont amenés à choisir non pas entre deux, mais entre trois candidats). Et la nouvelle configuration du parlement français sera en partie conditionnée par les désistements de candidats au second tour, notamment pour faire barrage au RN.

Alors que certains instituts de sondages n’écartent pas la possibilité que le RN et ses alliés atteignent 289 sièges, synonyme de majorité absolue, d’autres jugent éloignée une telle probabilité. Or, dans les deux cas, la France se prépare à des jours difficiles. Dans le premier cas, la France connaîtra une cohabitation d’un nouveau genre jusqu’à la présidentielle de 2027, entre un président centriste discrédité par son peuple et un premier ministre et un parlement de l’extrême droite qui, malgré sa fulgurante ascension, reste mal perçue par une large tranche de Français. Dans le deuxième cas, si le RN n’obtient pas de majorité absolue — et c’est la probabilité la plus grande —, il devra entreprendre de difficiles tractations pour un gouvernement de coalition. La France se trouvera donc avec un parlement sans majorité qui a du mal à faire passer les lois et une coalition gouvernementale fragile qui aura certainement du mal à diriger la France. Et ce, jusqu’à 2027 et la présidentielle qui pourra ou hisser Marine Le Pen à la tête de la France, ou éloigner l’extrême droite du pouvoir.

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