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Entre Washington et Pékin, un timide dégel

Ines Eissa , Jeudi, 23 novembre 2023

Joe Biden et Xi Jinping tentent de réduire les tensions entre les deux puissances. Mais un monde sépare les déclarations de bonne volonté et les actes concrets.

Entre Washington et Pékin, un timide dégel
La rencontre Xi Jinping-Biden, la deuxième depuis l’arrivée au pouvoir de Biden, s’est tenue en marge du sommet de l’Apec. (Photo : AFP)

Un rapprochement, mais des différences encore marquées. Telle est la conclusion de la rencontre tenue le 15 novembre entre le président américain, Joe Biden, et son homologue chinois, Xi Jinping. C’est dans le cadre du sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec), tenu à San Francisco aux Etats-Unis, que les deux hommes se sont rencontrés. D’ailleurs, à San Francisco, tous les regards étaient tournés vers cette rencontre, point d’orgue du sommet de l’Apec. Depuis l’élection de Joe Biden il y a trois ans, c’est la deuxième fois seulement que les deux dirigeants se rencontrent. L’objectif de cette réunion était d’éviter que la relation entre la Chine et les Etats-Unis, particulièrement tendue ces derniers mois, ne dégénère en conflit ouvert.

Les deux dirigeants ont discuté durant quatre heures et ont confirmé le réchauffement des relations entre les deux superpuissances, arguant qu’ils doivent se parler « directement et immédiatement » en cas de crise. A l’issue de leur rencontre, les deux dirigeants se sont mis d’accord sur deux points : la lutte contre le trafic d’ingrédients nécessaires à la fabrication de fentanyl, une drogue qui fait des ravages aux Etats-Unis, et la reprise des communications entre les armées chinoise et américaine. Ils ont aussi abordé une série de sujets contentieux, dont la guerre en Ukraine, celle entre Israël et le Hamas, ainsi que les élections à Taïwan en début d’année prochaine.

Bien que le sommet se soit tenu en marge du Sommet de l’Apec, le but de cette rencontre bilatérale était de valider le rapprochement entre les deux pays. L’objectif a été rempli si l’on en croit les dirigeants. Joe Biden s’est d’abord félicité d’avoir participé aux discussions « les plus constructives et les plus productives que nous avons eues ». Les deux dirigeants ont convenu de « maintenir les lignes de communication ouvertes, y compris entre le président Xi et moi-même, a affirmé le président américain. Lui et moi avons convenu que chacun d’entre nous pouvait décrocher son téléphone, appeler directement, et qu’il serait entendu immédiatement ».

Dans le même contexte, le président américain avait appelé, au début de la réunion, à gérer la rivalité entre les deux Etats de manière « responsable », pour « s’assurer qu’elle ne dégénère pas en conflit ». Dans ce sens, les deux dirigeants ont acté la reprise des « communications militaires de haut niveau sur la base de l’égalité et du respect », a ajouté l’agence de presse Chine nouvelle. « Quel que soit le stade de développement que nous pourrions atteindre, nous ne rechercherons jamais l’hégémonie ou l’expansion, et n’imposerons jamais notre volonté aux autres », a déclaré Xi Jinping.

« Les relations entre les deux pays ont connu des crises pendant la présidence de Donald Trump qui avait opté pour une politique de confrontation. Le sommet de la semaine dernière marque un changement de direction de la part de l’Administration démocrate, connue pour ses positions plus modérées », explique un diplomate qui a requis l’anonymat.

Sur les plans économique et commercial, la Chine, dont l’économie s’essouffle, a appelé les Etats-Unis à réduire leurs actions concernant les contrôles des exportations chinoises, les investissements et les sanctions unilatérales qui « nuisent gravement aux intérêts légitimes » de Pékin, a rapporté l’agence de presse nationale Chine nouvelle. Les deux pays se sont engagés à mener de nouvelles discussions commerciales en 2024 dans le but de trouver des solutions à leurs divergences. Les Etats-Unis limitent l’exportation de semi-conducteurs sophistiqués vers la Chine afin d’éviter qu’ils soient utilisés à des fins militaires. Les deux dirigeants auraient accepté de poursuivre le dialogue sur l’intelligence artificielle sans qu’un accord ait été trouvé sur le sujet.

Divergence majeure sur Taïwan

De son côté, Xi Jinping souhaitait avant tout discuter de Taïwan, ainsi que des sanctions américaines, selon les médias d’Etat chinois. Xi Jinping, pour qui une réunification de la Chine et de Taïwan « sera réalisée » car « inévitable », a exhorté son homologue américain, Joe Biden, à mettre fin à l’ingérence des Etats-Unis. « Les Etats-Unis se doivent de traduire leur position contre l’indépendance de Taïwan en actions concrètes, cesser d’armer Taïwan et soutenir la réunification pacifique de la Chine », a déclaré le leader chinois, selon un compte-rendu transmis par le ministère chinois des Affaires étrangères.

De son côté, Joe Biden a demandé le respect du processus électoral à Taïwan. Il a fait part de la « détermination » de Washington « à faire respecter la paix et la stabilité » sur l’île. Il a confirmé la ligne volontairement ambiguë des Etats-Unis : pas de soutien à l’indépendance mais refus d’une prise de contrôle par la force.

Autre sujet de friction : Joe Biden a maintenu ses propos sur son homologue, qu’il assimile à « un dictateur ». Une déclaration qui n’a pas manqué de faire réagir Pékin, qui a jugé cette description « extrêmement erronée », la qualifiant de « manipulation politique irresponsable », selon la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning.

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