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Iran : l’optimisme toujours de mise

Maha Al-Cherbini avec agences, Mardi, 22 octobre 2013

A l'issue de la rencontre de Genève conclue sur une note positive, Téhéran et les six grandes puissances ont décidé de se rencontrer à nouveau les 7 et 8 novembre dans la même ville. Il s'agira d'étudier aussi une offre confidentielle présentée par Téhéran.

Iran
Ces sourires aboutiront-ils à une solution concrète à la crise lors de la réunion de novembre ? Photos : Reuters

Les efforts déployés pour résoudre la crise qui oppose la communauté internatio­nale à Téhéran au sujet des activités nucléaires de ce dernier, donnent lieu à de petits succès. Même si la réunion qui a rassemblé, les 15 et 16 octobre, Téhéran et le groupe dit « 5+1 » (regroupant les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l’Allemagne) à Genève n’a pas abouti à des résultats tan­gibles, elle a pavé le chemin à une autre rencontre plus importante, les 7 et 8 novembre, qui discutera d’une solution concrète à la crise.

Dans leur déclaration finale, les Six ont fait part de leur « optimisme mesuré » et ont évoqué, pour la pre­mière fois depuis dix ans, une impor­tante contribution de Téhéran. Selon les experts, l’existence d’un commu­niqué commun, événement rare dans les négociations entre Téhéran et les grandes puissances, témoigne du changement d’attitude iranien depuis l’élection à la présidence du modéré Hassan Rohani, partisan d’un ton plus mesuré envers l’Occident que son prédécesseur Mahmoud Ahmadinejad. Signes de cette nou­velle atmosphère : pour la première fois, les discussions se sont déroulées en anglais, et la délégation améri­caine, dirigée par la secrétaire d’Etat adjointe aux affaires politiques, Wendy Sherman, est venue accompa­gnée des responsables des sanctions économiques contre l’Iran. Cette pré­sence est perçue comme un signe d’ouverture de Washington.

Conséquence de ces évolutions, la réunion de Genève a rencontré un écho positif chez les protagonistes et dans le monde. Côté iranien, le ministre des Affaires étrangères, Javad Zarif, a affirmé qu’elle a appor­té l’espoir « d’une nouvelle phase dans les relations » entre son pays et la communauté internationale. Le ministre a pourtant rappelé que l’Iran « ne renoncerait pas à ses droits nucléaires ». Enthousiaste, Catherine Ashton, haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères, a déclaré que les discus­sions de Genève étaient les plus détaillées que le groupe ait eues depuis longtemps avec les Iraniens. Elle a indiqué que des spécialistes des questions nucléaires et scientifiques et des sanctions se réuniraient avant la prochaine rencontre pour étudier les détails des propositions ira­niennes, encore confidentielles, et préparer les mesures qu’ils comptent prendre pour récompenser les ouver­tures iraniennes. Selon les analystes, la tenue d’une telle réunion avant les pourparlers de novembre montre le sérieux des promesses de l’Occident qui allégera les sanctions contre l’Iran.

Des propositions encore secrètes

Pour l’heure, les deux délégations n’ont pas divulgué la nature des propositions iraniennes. Selon les analystes, les deux parties ne veu­lent pas donner de précisions afin de ne pas provoquer de réactions à Téhéran, où les durs du régime sui­vent avec scepticisme les ouvertures iraniennes, et à Washington, où les « faucons » restent méfiants vis-à-vis de la République islamique. Le négociateur iranien, Abbas Araghchi, s’est contenté d’indiquer que l’Iran a présenté un plan en deux phases : une première phase, qui doit durer six mois, permettrait de rétablir la confiance, et une phase finale comprendrait l’application par l’Iran des mesures de vérifica­tion de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), pour faire la transparence sur son pro­gramme nucléaire, en échange de la levée des sanctions.

En outre, des sources diploma­tiques ont affirmé que Téhéran offrait de réduire ses opérations d’enrichissement d’uranium et de transformer une partie de son stock actuel d’uranium enrichi à 20 % en oxyde d’uranium destiné au fonc­tionnement des réacteurs civils. L’Iran pourrait également accorder aux inspecteurs de l’AIEA un accès plus large à ses sites nucléaires, acceptant même le principe d’ins­pection surprise de ses sites nucléaires, réclamé avec insistance par Washington. « Le guide, Ali Khamenei, qui a la haute main sur le nucléaire, a enfin réalisé que la poli­tique de la confrontation ne profitera jamais à son pays, pénalisé par les sanctions. C’est pourquoi il soutient la politique d’ouverture du président Rohani », explique Mohamed Abbas, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.

Entre prudence et scepticisme

Malgré l’optimisme général, une question s’impose : quelle solution peut-on attendre de la réunion du mois prochain, alors que les posi­tions des deux parties restent large­ment inconciliables ? Les Six veu­lent obtenir la suspension de l’enri­chissement d’uranium par l’Iran, mais Téhéran ne cesse d’affirmer qu’il ne cédera pas d’un iota sur ses droits nucléaires. C’est pourquoi certains diplomates restent prudents quant aux progrès qui pourraient être enregistrés lors des prochains pour­parlers. Depuis dix ans, les pourpar­lers entre Téhéran et l’Occident connaissent des hauts et des bas : le régime iranien n’a cessé de souffler le chaud et le froid. De quoi semer le doute sur l’éventualité d’une solu­tion définitive à une crise chronique.

Sceptique, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a estimé samedi qu’il était « trop tôt pour tirer des conclusions, d’autant que ce que nous avons connu de la part de l’Iran depuis quelques années nous incite à une ouverture pru­dente », ajoutant : « Il y a depuis l’élection de Hassan Rohani un changement de ton incontestable ». De même, la Russie, alliée tradition­nelle de Téhéran, a déclaré qu’il n’y avait « pas de raisons d’applaudir » les négociations de Genève, qui auraient pu donner lieu à davantage de progrès. « Les résultats sont meilleurs que ceux d’Almaty en février, a commenté le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, mais cela ne garantit pas les progrès ultérieurs ».

Etonnamment, les Etats-Unis ont été les plus encourageants, et ont salué « l’approche plus sérieuse » qu’autrefois de l’Iran dans les discus­sions. A Washington, la porte-parole du Département d’Etat, Jen Psaki, est apparue optimiste : « Pour la pre­mière fois, notre équipe a eu des dis­cussions très détaillées, s’est-elle félicitée. Mais malgré les signaux positifs, personne ne doit s’attendre à une percée du jour au lendemain. Ce sont des problèmes très compliqués ». La porte-parole américaine a ajouté qu’elle plaçait de grands espoirs dans la réunion de novembre. Une ren­contre qui, de fait, constituera un test de crédibilité, pour Téhéran comme pour le groupe des Six.

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