La Russie a lancé ces derniers jours une série de frappes aériennes sur plusieurs villes d’Ukraine. (Photo : AP)
Les armes courent toujours plus vite que la diplomatie. A peine vingt-quatre heures après le premier appel entre Xi Jinping et Volodymyr Zelensky, le plus proche allié et le pire ennemi du Kremlin, Moscou a lancé une série de frappes aériennes sur plusieurs villes d’Ukraine, notamment sa capitale, Kiev. La région de Kherson a été à nouveau bombardée dimanche 30 avril, selon Kiev, alors que les autorités locales installées par la Russie ont de leur côté annoncé que la ville de Nova Kakhovka, également située dans la région de Kherson, avait été privée d’électricité samedi après d’« intenses » tirs d’artillerie ukrainiens.
Dans la nuit du jeudi 27 avril au vendredi 28 avril, une pluie de missiles de croisière russes s’est abattue sur l’Ukraine, touchant des infrastructures civiles dans plusieurs villes du centre et de l’est du pays. A Ouman, une ville de 80 000 habitants dans le centre, un missile s’est abattu sur des habitations, entraînant la mort de 23 personnes, dont plusieurs enfants, et faisant des dizaines de blessés selon le dernier communiqué du ministre ukrainien de l’Intérieur. A Dnipro, une femme et un enfant de 3 ans ont également trouvé la mort à la suite des bombardements de la nuit, ainsi qu’un homme dans la région de Kherson.
Cette attaque de l’armée russe est ainsi la plus meurtrière de l’année. La Russie n’avait pas lancé une attaque d’une telle ampleur depuis le début du mois de mars. Sur Telegram, le président ukrainien a réagi : « Chaque attaque, chaque acte pervers contre notre pays et (notre) peuple rapproche l’Etat terroriste de l’échec et de la punition », avant d’exiger une « riposte » de la part de la communauté internationale.
Quel rôle pour Pékin ?
Le 26 avril, le président ukrainien s’entretenait pour la première fois avec le secrétaire général du Parti communiste chinois, Xi Jinping, le plus proche allié de Vladimir Poutine. La Chine, qui cherche depuis peu à s’affirmer en tant que puissance diplomatique sur la scène internationale, était priée depuis des mois par les puissances européennes d’utiliser sa proximité avec le Kremlin et de se positionner sur l’Ukraine. Lors de cet appel, Xi Jinping avait alors affirmé que la Chine « ne restera pas les bras croisés et n’ajoutera pas de l’huile sur le feu ni ne cherchera à tirer profit de la situation ». Le dirigeant chinois avait également affirmé que « sur la question de la crise en Ukraine, la Chine se tient toujours dans le camp de la paix, sa position centrale est de promouvoir des pourparlers dans ce sens », avant de réitérer personnellement son plan de paix en 12 points. Celui-ci, déjà connu, ne pose qu’une seule ligne rouge concrète aux deux parties, l’utilisation de l’arme nucléaire, et réitère la nécessité de trouver un « règlement politique » au conflit. A cet effet, la Chine a annoncé avoir nommé un envoyé spécial « pour les affaires eurasiennes » qui se rendra en « Ukraine et dans d’autres pays » pour établir le dialogue.
Du côté ukrainien, la réaction s’est faite plus retenue, Volodymyr Zelensky ayant déclaré avoir eu un « long et significatif » entretien avec le président chinois tout en espérant « une impulsion puissante du développement des relations bilatérales » entre les deux pays.
Contre-offensive imminente
L’appel entre Xi Jinping et Volodymyr Zelensky et la vague de frappes aériennes russes qui a suivi interviennent alors que, depuis des semaines, la cadence des frappes ukrainiennes s’accélère et que les enchères autour de la contre-offensive montent.
Samedi 29 avril, en réaction aux bombardements de la veille, l’armée ukrainienne a notamment détruit en quelques heures un dépôt pétrolier à Sébastopol, en Crimée, ainsi que privé d’électricité plusieurs villages russes proches de la frontière avec l’Ukraine, près de Belgorod et de Kherson. Le même jour, lors d’une conférence de presse donnée à Kiev, Oleskyi Reznikov, ministre ukrainien de la Défense, annonçait que « les préparatifs (de la contre-offensive) touchent à leur fin ». « L’équipement a été promis, préparé et partiellement livré. Au sens large, nous sommes prêts », a-t-il ajouté.
Pour la Russie, cette série d’attaques peut vouloir signifier que l’appel de son plus proche allié en faveur de pourparlers avec Kiev n’est aucunement un aveu de faiblesse dissimulé de la part du Kremlin. Quant à la Chine, le timing interroge. Pourquoi jouer maintenant la carte diplomatique, alors que la contre-offensive ukrainienne est sur le point d’être lancée ? Trop tardive pour avoir un quelconque effet sur la situation, mais indispensable de par sa proximité avec le Kremlin, la Chine conforte ainsi un peu plus sa position de puissance diplomatique en s’assurant une place dans de potentielles négociations de paix entre Kiev et Moscou. Officiellement neutre, la Chine n’a toujours ni condamné l’invasion russe, ni réagi aux attaques survenues moins de 24 heures après s’être entretenue avec le président ukrainien.
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