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Israël : Encore plus à droite, encore plus extrémiste

Abir Taleb , (avec Agences) , Mercredi, 30 novembre 2022

Alors que le Likoud de Benyamin Netanyahu a signé ses premiers accords de coalition avec l’extrême droite, Israël s’apprête à avoir son gouvernement le plus extrémiste de son histoire. Un arrêt de mort du processus de paix.

Israël : Encore plus à droite, encore plus extrémiste
(Photo : AP)

Le chef du Likoud, Benyamin Netanyahu, premier ministre désigné, poursuit les négociations avec les partis d’extrême droite HaTzionout HaDatit, Otzma Yehudit et Noam, et les partis ultra-orthodoxes Shas et Yahadout HaTorah pour former le 37e gouvernement israélien. Si les négociations ne sont toujours pas achevées, le ton est donné. Le Likoud de Benyamin Netanyahu, qui revient aux commandes, a signé cette semaine deux accords de coalition avec l’extrême droite. L’un avec le parti Noam, dont l’unique député, Avi Maoz, sera nommé ministre adjoint au sein du cabinet du premier ministre. L’accord donnera à ce parti d’extrême droite le contrôle d’un organe gouvernemental responsable de l’immigration juive, à un moment où certains responsables font pression pour réécrire les règles qui permettent de devenir un citoyen israélien. L’accord avec le Noam est le deuxième de cinq accords de ce type attendus sur la voie de la formation du gouvernement le plus à droite et le plus religieux d’Israël à ce jour. Selon les détails publiés par un porte-parole du parti Likoud, les parties ont accepté la demande de Noam de former une autorité au sein du bureau du premier ministre pour se concentrer sur l’identité juive nationale.

Un autre accord conclu a été avec le parti Otzma Yehudit (Force juive), qui attribue à Itamar Ben-Gvir, chef de file d’Otzma Yehudit, le poste de ministre de la Sécurité publique et un siège au cabinet de sécurité israélien. Le ministère de la Sécurité nationale est un nouveau poste aux prérogatives élargies qui chapeautera les divers services de police en Israël et aussi en Cisjordanie.

«  Nous avons fait un grand pas vers un accord complet de coalition, vers la formation d’un gouvernement complet, complètement de droite », a commenté dans un communiqué Itamar Ben-Gvir. C’est tout dire. Car, ne l’oublions pas, le nouveau ministre de la Sécurité publique a été condamné en 2007 pour incitation raciste contre les Arabes et soutien au terrorisme. Colon vivant en Cisjordanie occupée, farouche opposant à la création d’un Etat palestinien, il dit qu’il ne revendique plus l’expulsion de l’ensemble des Palestiniens, mais seulement de ceux qu’il qualifie de « traîtres » ou de « terroristes ».

Mais ce n’est pas tout. Le virage à droite prend désormais de dangereuses proportions en Israël. Deuxième exemple: le chef spirituel du parti Hatzionout HaDatit (14 sièges au parlement) a indiqué qu’il était favorable à la transformation d’Israël en Etat qui serait gouverné par la loi religieuse. « Il n’y a aucun problème à mettre en place un Etat halakhique (basé sur la loi juive). Comment les droits individuels pourraient-ils en souffrir? Je ne comprends pas où est le problème. Nous parlons d’un Etat juif », a dit le rabbin Chaim Druckman dans un entretien accordé au quotidien israélien Yisrael Hayom. Ce dernier souhaite que le nouveau gouvernement « permette aux juifs de s’implanter partout où c’est possible » et qu’il annexe également les colonies juives en Cisjordanie. « Cette terre est la terre d’Israël et sur la terre d’Israël, les juifs doivent être autorisés à s’implanter partout », a-t-il tout simplement déclaré.

Troisième exemple: dans ses discussions avec le Likoud pour la formation d’un gouvernement, le leader du parti Hatzionout HaDatit, Bezalel Smotrich, pressenti pour être le futur ministre des Finances, exige que l’administration civile, qui gère certains aspects des affaires civiles dans près de 60% de la Cisjordanie, passe du ministre de la Défense à celui des Finances, ce qui équivaut à une « annexion de facto » du territoire par Israël, selon l’organisation militante de gauche La Paix maintenant. Pour Smotrich en effet, il s’agit d’un moyen de faire avancer son programme d’expansion des colonies juives en Cisjordanie et de contrecarrer les aspirations palestiniennes à un Etat indépendant sur le territoire.

« Déclaration de guerre »

Parallèlement à ces déclarations choc, le Likoud a publié la semaine dernière une liste partielle, mais détaillée des mesures qu’il prévoit de mettre en oeuvre au sein du prochain gouvernement, réaffirmant notamment son soutien à la colonisation.

Bien que les pourparlers aient été retardés ces derniers jours en raison de querelles sur les postes ministériels, les partis devraient finalement tous parvenir à un accord dans les semaines à venir et former une coalition dont l’idéologie est relativement cohérente, et qui signe l’arrêt de mort du processus de paix. Pour le premier ministre palestinien, Mohammed Ishtaye, ces négociations se font au détriment du peuple palestinien et de ses droits légitimes. Elles sont « basées sur qui construit plus de colonies, qui veut faciliter plus de tirs sur les Palestiniens, et qui veut confisquer plus de terres palestiniennes », a déclaré M. Ishtaye, ajoutant que le gouvernement israélien se préparait à « déclarer une guerre contre (les Palestiniens) dirigée par des colons extrémistes ». Le premier ministre palestinien a également appelé la communauté internationale à exercer davantage de pression sur le gouvernement israélien, selon le communiqué. Alors que le président palestinien, Mahmoud Abbas, a appelé samedi à soutenir une résistance douce, pacifique et populaire contre Israël en Cisjordanie jusqu’à ce que la Palestine atteigne ses objectifs.

Mais les espoirs que la Palestine atteigne ses objectifs sont minimes d’autant plus que la communauté internationale a, depuis des années, délaissé le processus de paix. Aujourd’hui et plus que jamais, avec un pouvoir israélien extrémiste et un immobilisme international, les Palestiniens voient disparaître leur rêve légitime de créer un Etat indépendant sur les frontières de 1967, comme le préconisent les accords signés dans le cadre du processus de paix.

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