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Mona Soliman : L’Iraq a besoin de prouver sa souveraineté face aux interventions iraniennes

Maha Salem avec agences, Lundi, 31 mai 2021

3 questions à Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques,sur la tension en Iraq suite à l’arrestation d’un leader du Hachd Al-Chaabi, une milice proche de l’Iran.

Al-Ahram Hebdo : Ces derniers mois, il y a eu plusieurs assassinats d’activistes iraqiens, pourquoi maintenant l’arrestation du leader du Hachd Al-Chaabi, Qassem Muslah ?

Dr Mona Soliman: Les services de renseigne­ments de la police ont arrêté, à Bagdad, Qassem Muslah, chef des opérations du Hachd Al-Chaabi dans la région d’Anbar (sud) qui avait donné l’ordre d’assassiner Ehab Al-Ouazni, le 9 mai, et un autre militant, Fahim Al-Taïe, en décembre 2019. Ehab Al-Ouazni dénonçait depuis plusieurs années les groupes armés et la mainmise de l’Iran sur son pays. Il a été abattu devant son domicile à Kerbala, dans le sud du pays. Ce meurtre a provoqué une onde de choc en Iraq, et les autorités étaient obligées de réagir avec force contre l’intervention de l’Iran dans les affaires du pays. Depuis le début de la révolte populaire inédite d’octobre 2019, plus de 70 militants ont été victimes d’assassi­nats ou de tentatives d’assassinat, tandis que des dizaines d’autres ont été enlevés briève­ment. L’Iraq a besoin de prouver sa souverai­neté face aux interventions iraniennes.

— Le premier ministre Moustapha Al-Kazimi est-il en train de marquer ses dis­tances avec l’Iran ?

— Tout d’abord, il faut noter que Kazimi est un responsable hautement patriotique. Il cherche toujours a développé son pays et proté­ger ses intérêts. Il a annoncé à plusieurs reprises qu’il refusait l’intervention iranienne dans les affaires internes de l’Iraq. Il a visité plusieurs pays arabes tout en essayent d’augmenter leurs investissements et coopération économique pour aider son pays. Il a même commencé la reconstruction de plusieurs villes détruites par Daech en coopération avec les pays arabes, surtout ceux du Golfe. Ce rapprochement avec ces pays inquiète l’Iran, qui cherche à l’embar­rasser et à se débarrasser de lui, car il ne suit pas les ordres de Téhéran. Cette attitude augmente la volonté de Kazimi de se démarquer de l’Iran et de s’allier avec d’autres pays arabes. C’est vrai que Kazimi est un chiite, comme la majo­rité des Iraqiens, mais il voit d’un mauvais oeil le rôle de l’Iran dans son pays et veut la contrer.

— Pourquoi donc, malgré cela, le Hachd Al-Chaabi continue d’être puissant ?

— Quand Daech a proclamé un califat dans une partie de l’Iraq en 2014, l’armée iraqienne était faible et ne pouvait affronter seule ce groupe djihadiste. D’où l’idée de former une milice armée puissante, organisée et bien équi­pée. Le Hachd, soutenu et entraîné par l’Iran, a ainsi joué un rôle essentiel dans la lutte contre Daech. Il est ainsi devenu très influent, presque plus fort que les institutions sécuritaires ira­qiennes. L’ancien premier ministre Haider Abadi, un pro-iranien, a trouvé nécessaire d’in­tégrer ces milices à l’armée. Cette milice est devenue un Etat dans l’Etat. Kazimi a voulu freiner cela. Ce qui risque de provoquer entre Bagdad et Téhéran .

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