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Israël : Netanyahu dans de beaux draps

Sabah Sabet avec agences, Mercredi, 12 août 2020

Avec des manifestations régulières contre la situation socioéconomique, une coalition au pouvoir qui risque de voler en éclat et le spectre d’élections anticipées ainsi que le procès pour corruption dont il fait l’objet, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, fait face à une multitude de crises.

Israël : Netanyahu dans de beaux draps
Des manifestations ont lieu depuis plusieurs semaines contre la politique de Netanyahu. (Photo : AFP)

Le mouvement anti-Netanya­hu prend de plus en plus d’ampleur en Israël. Dénonçant la corruption et la mauvaise gestion des différentes crises que traverse le pays, des milliers d’Is­raéliens ont à nouveau manifesté, samedi 8 août, contre le premier ministre, Benyamin Netanyahu. Des rassemblements qui ont eu lieu aux quatre coins du pays, qui demandent sa démission et qui se tiennent régulière­ment depuis deux mois. Les manifes­tants sont, en effet, en colère contre la politique économique du gouverne­ment, alors qu’Israël connaît actuelle­ment une crise économique sans précé­dent, ajoutée à la mauvaise gestion de la pandémie de Covid-19. Israël s’est d’abord vanté de sa gestion de la pan­démie, avec un nombre relativement bas de cas de malades. Mais au fur et à mesure du déconfinement, décidé fin avril pour remettre l’économie sur les rails, les cas d’infection se sont multi­pliés, forçant le gouvernement à impo­ser de nouvelles restrictions. Or, l’éco­nomie n’a pas redémarré comme espé­ré. « L’échec du gouvernement de Netanyahu à traiter les conséquences de la pandémie ainsi que son incapa­cité de résoudre la crise économique et ses effets sur la société comme le chô­mage et la récession sont les princi­paux motifs de ce mouvement populaire de contestation », explique Dr Tareq Fahmi, professeur de sciences poli­tiques à l’Université américaine du Caire. En effet, le taux de chômage a dépassé les 20 % ces derniers mois contre 3,4 % en février. Autre motif, les protestataires crient leur ras-le-bol contre Netanyahu, inculpé en novembre 2019 pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires, une pre­mière pour un chef de gouvernement israélien en cours de mandat.

Face à la colère qui monte, Netanyahu, au pouvoir sans disconti­nuer depuis 2009, a accusé, samedi 8 août, certaines chaînes de télévision israéliennes de « faire de la propa­gande aux manifestants gauchistes anarchistes », en couvrant largement leurs rassemblements. « Ils essayent désespérément d’intoxiquer le public, afin de faire tomber un premier ministre de droite fort », a affirmé le Likoud, le parti de M. Netanyahu, dans un tweet, retweeté par Netanyahu.

Crise au sein de la coalition

A la fronde populaire s’ajoute une tension au sein de la coalition au pou­voir entre le Likoud, parti du premier ministre, et la formation Bleu et Blanc menée par Benny Gantz. Des échanges d’accusations au sein de la coalition ont fusé, samedi 8 août, suite à la décision inhabituelle d’annuler la réunion heb­domadaire du conseil ministériel pré­vue dimanche 9 août, faute d’accord sur l’ordre du jour. Alors que le Likoud et le Bleu et Blanc ont convenu d’adop­ter un budget biennal dans le cadre de leur accord de coalition, le chef du gouvernement fait pression pour un budget valable pour les cinq prochains mois, citant l’incertitude économique liée à la pandémie de coronavirus. Le Likoud a accusé Bleu et Blanc dans un communiqué d’avoir refusé d’approu­ver un point de l’ordre du jour concer­nant une proposition de projet d’aide économique de 8,5 milliards de she­kels. « La réunion du cabinet n’aura pas lieu en raison du refus de Bleu et Blanc d’approuver un plan d’assis­tance économique du gouvernement, préconisé par le premier ministre et le ministre des Finances », a déclaré le parti, en signalant que le plan d’assis­tance économique pourrait créer envi­ron 10 000 nouveaux emplois, et que le Likoud appelait Bleu et Blanc à ne pas empêcher le transfert de fonds aux citoyens, en pleine crise économique liée au coronavirus. La liste centriste a, de son côté, accusé le parti de Benyamin Netanyahu de ne pas adhérer à l’accord de coalition. « Ce n’est pas la première fois que le Likoud ne respecte pas ses engagements, et toute autre excuse est un mensonge éhonté au public israé­lien », a déclaré Bleu et Blanc dans un communiqué.

« Les discussions autour du budget constituent un important point de désaccord qui a mis en évidence la crise qui s’accroît au sein de la coali­tion, à tel point qu’elle risque de voler en éclat », explique Dr Fahmi. Donc, si aucun budget n’est adopté avant le 25 août, de nouvelles élections seront automatiquement déclenchées. « Avec l’ampleur que prend cette crise, la tenue des élections anticipées est le scénario le plus probable », estime-t-il.

Face à cet ensemble de crises qu’af­fronte Netanyahu, ce dernier n’a d’autres solutions que de provoquer des conflits régionaux avec ses ennemis. C’est pourquoi, selon les spécialistes, les dernières semaines ont été mar­quées par une nouvelle montée des tensions avec le Hezbollah à la fron­tière avec le Liban, mais aussi dans le Golan syrien. Focaliser sur l’ennemi extérieur, à savoir l’Iran et ses alliés, une façon habituelle pour Tel-Aviv de détourner l’attention des crises internes. Pour autant, selon l’analyste, la situa­tion n’est pas près de se calmer. « Soutenues par certains généraux et par la gauche, les manifestations vont se poursuivre. Tout comme les ten­sions avec l’Iran et ses alliés », conclut Dr Fahmi.

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