Aucune date limite n'a été fixée pour les discussions.
(Photo:Reuters)
Après 8 ans de guerre, des représentants du gouvernement syrien et de l’opposition se sont assis face à face deux jours durant à Genève, les 30 et 31 octobre. Il s’agit des premières réunions du comité chargé de réviser la Constitution en Syrie. Ce Comité constitutionnel est composé de 150 membres, répartis à égalité entre le gouvernement du président Bachar Al-Assad, les différentes factions de l’opposition et des représentants de la société civile. Cette première session plénière a abouti à la formation d’un comité restreint de 45 membres, répartis à égalité entre les trois composantes (régime, opposition et société civile), ce sont ces 45 membres qui vont entrer dans le détail des discussions sur la Constitution. Aucune date limite n’a été fixée pour ces négociations. L’objectif est de parvenir à un consensus sur toutes les questions soulevées et tout changement devra être adopté par au moins 75% des voix, afin de garantir qu’aucune partie ne dicte ses choix au camp adverse, ce qui risque de compliquer le processus.
A l’issue de la première réunion plénière de ce comité, l’émissaire spécial de l’Onu pour la Syrie, Geir Pedersen, s’est notamment dit « très impressionné » par le fait que les 150 Syriens aient accepté pour la première fois de s’asseoir ensemble, reconnaissant tout de même « qu’après huit ans et demi de conflit, il existe de profondes différences, beaucoup de suspicion, un manque de confiance ».
Profondes divergences
Les divergences sont en effet grandes : le régime veut des discussions qui portent uniquement sur l’actuelle Constitution adoptée en 2012, l’opposition, elle, réclame une nouvelle Constitution. Selon Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques à l’Université du Caire, « le chemin est long et difficile, on ne s’attend pas à un règlement rapide. Le régime syrien a accepté ces négociations, car il veut un soutien politique de la communauté internationale et des aides financières pour la reconstruction. Il souhaite aussi la levée des sanctions ».
Or, ajoute Dr Mona Soliman, le régime, qui s’engage dans ces discussions avec une position de force vu ses avancées sur le terrain, n’est pas près de faire des concessions. « Il peut tout à fait s’en désengager à tout moment », dit-elle. Le chef de la délégation gouvernementale, Ahmad Kuzbari, a d’ailleurs déclaré que « son gouvernement accueillera à bras ouverts ceux qui ont des opinions proches de notre groupe. Mais nous ne rencontrerons pas ceux qui sont trop éloignés de nos principes nationaux ». En revanche, le chef de la délégation de l’opposition, Hadi Al-Bahra, a souligné que pour construire la confiance, le plus important est de mettre en place un cessez-le-feu permanent, de libérer les détenus et de retrouver les disparus. Deux discours bien différents donc ...
Approuvée par référendum en février 2012, la Constitution en vigueur, soumise par les autorités dans le cadre de réformes visant à apaiser les manifestations pro-démocratie en 2011, a mis théoriquement fin à la suprématie du parti Baas, au pouvoir depuis 1963. Le texte consacre le principe du pluralisme politique et introduit un nouveau régime présidentiel. Il prévoit que le chef de l’Etat soit directement élu au suffrage universel pour un mandat de sept ans, renouvelable une fois, mais aussi qu’il reste à la tête du Conseil supérieur de la magistrature et qu’il puisse soumettre toute loi au vote de l’assemblée.
Mais tout candidat à la présidentielle doit résider en Syrie depuis au moins dix ans. « L’opposition exige l’annulation de cette clause, car nombre d’entre eux vivent à l’étranger depuis des années. Si les discussions achoppent sur ce point, ils risquent de claquer la porte du comité », explique Dr Mona, tout en ajoutant que l’opposition réclame une séparation complète des pouvoirs et la levée de l’immunité quasi absolue dont jouit le chef de l’Etat.
Le vrai enjeu est la durée des travaux de ce comité, car personne ne donne un calendrier fixe. Les négociations peuvent prendre des années avant d’aboutir. « Sans une pression de la communauté internationale sur les différentes parties, les travaux du comité seront infinis », conclut Dr Mona.
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