Menace croissante des Talibans et de Daech, économie en ruine, situation politique fragile, relations envenimées avec ses voisins indien et afghan, relations perturbées avec Washington, son allié contre le terrorisme. La liste des défis qui attend le Pakistan après les législatives de ce mercredi 25 juillet semble aussi longue que pressante. En fait, ce scrutin représente la seconde transition démocratique d’un gouvernement civil à un autre. Selon les observateurs, le scrutin s’annonce à la fois difficile et peu crédible à cause des accusations d’ingérence de l’armée et des attentats suicides qui endeuillent le pays depuis la semaine dernière.
Pendant la campagne électorale, une série d’attentats revendiqués par les Talibans et Daech a endeuillé plusieurs meetings électoraux, tuant plus de 175 personnes. Le dernier en date a eu lieu dimanche 22 juillet : un attentat suicide a de nouveau frappé le pays, faisant 2 morts et 5 blessés à trois jours du vote, ce qui pourrait jeter ses ombres sur le taux de participation. Environ 106 millions de Pakistanais doivent choisir un successeur au parti PML-N — au pouvoir depuis 2013 — qui espère remporter un nouveau mandat sous son nouveau chef de file, Shahbaz Sharif – frère de l’ex-premier ministre Nawaz Sharif — après la destitution de ce dernier pour corruption il y a un an et son interdiction de toute participation à la vie politique. Le principal rival du PML-N reste le parti Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI), guidé par l’ancien champion de cricket Imran Khan. Si MM. Sharif et Khan semblent les favoris du vote, une troisième formation, le PPP, de Bilawal Bhutto Zardari, fils de l’ex-première ministre assassinée Benazir Bhutto, pourrait être appelé à former une coalition avec le vainqueur.
Or, selon un bon nombre d’experts, ces élections ne feront qu’accroître l’instabilité tant les défis sont nombreux, les plus urgents étant l’économie et l’insécurité. Signe que cette dernière reste la préoccupation majeure d’Islamabad, la ministre pakistanaise des Affaires étrangères s’est rendue dimanche 22 juillet à Kaboul à la tête d’une délégation de 28 responsables pakistanais, afin d’assister à la séance inaugurale de la conférence baptisée « Plan de travail afghanopakistanais pour la paix et la solidarité communes ». Cette conférence, à trois jours des législatives, reflète l’engagement sérieux du gouvernement pakistanais à coordonner ses efforts avec Kaboul afin de mettre fin à leur défi commun : les Talibans et Daech. Sur le plan politique, la tension est aussi de mise. L’ex-premier ministre, Nawaz Sharif, condamné à dix ans de prison pour corruption, accuse les forces armées et la justice pakistanaises d’avoir fait un « putsch silencieux » et d’avoir tout fait pour nuire à son parti en particulier dans son fief du Pendjab, province-clé. « Ma condamnation est une décision politique.
C’est une tentative de m’écarter de la vie politique et pour truquer les élections », s’est insurgé Sharif, qui a relevé le défi à la justice en se rendant la semaine dernière au Pakistan — malgré le verdict prononcé contre lui — afin de faire campagne et sauver son parti. Arrêté à l’aéroport avec sa fille, Sharif a néanmoins délivré un message clair. « L’establishment militaire pakistanais doit se concentrer sur la sécurité, pas sur la politique. Marchez avec moi et changeons la destination du pays », a lancé l’expremier ministre quelques minutes avant son arrestation alors que son frère a affirmé que des centaines de militants de leur parti, le PML-N, avaient été arrêtés pour les empêcher de venir démontrer leur soutien à l’ancien chef du gouvernement.
Beaucoup de Pakistanais pensent ainsi que l’armée et les services de renseignements pakistanais veulent se débarrasser de Sharif, considéré comme un danger pour la sécurité nationale parce qu’il plaide pour un rapprochement avec l’Inde.
Dans ce contexte de tension, le PTI, dirigé par l’ancien champion de cricket Imran Khan, peut, selon les experts, destituer le PML-N. Imran Khan a promis, en cas de sa victoire, l’émergence d’un « nouveau Pakistan autonome, prospère qui servira son peuple », promettant de faire de la lutte contre la corruption sa priorité et de dialoguer avec les groupes insurgés afin d’en finir avec l’insécurité croissante. Outre cette question, il reste que la vie politique pakistanaise n’a jamais été dénuée de crises : depuis l’indépendance du Pakistan en 1974, aucun premier ministre n’a pu arriver au bout de son mandat de 5 ans.
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