Le bilan de la double attaque est de 8 morts et 80 blessés.
(Photo : AFP)
Bien que la communauté internationale, avec à sa tête la France, se soit mobilisée pour combattre le terrorisme dans la région du Sahel africain, la menace est toujours aussi pesante. Une double attaque a eu lieu vendredi 2 mars au Burkina Faso, la première devant l’ambassade de France, la deuxième devant le siège de l’état-major. Huit membres des forces de l’ordre burkinabé ont été tués, 2 gendarmes devant l’ambassade de France et 6 militaires au niveau de l’état-major, et 80 personnes ont été blessées. Le lendemain de l’attaque, les djihadistes du Groupe pour le Soutien de l’Islam et des Musulmans (GSIM), dirigé par le Touareg malien Iyad Ag Ghaly, ont revendiqué les attaques d'Ouagadougou en affirmant avoir agi en représailles à une opération française au Mali, selon un message parvenu samedi 3 mars à l’agence privée mauritanienne
Al-Akhbar. En fait, un proche d'Iyad Ag Ghaly, un ex-colonel de l’armée malienne nommé Malick Ag Wanasnat, avait été tué lors d’un raid des forces françaises au Mali, mené le 14 février, près de la frontière algérienne, avait annoncé l’armée malienne.
Le Burkina Faso est, depuis 2015, la cible d’attaques djihadistes, qui ont déjà frappé sa capitale. C’est la troisième fois en deux ans que ce pays est victime d’attaques visant des cibles fréquentées par les Occidentaux.
Mais, selon des spécialistes, jamais les attaques n’ont atteint un tel niveau d’organisation. « Le mode opératoire des attaques évolue crescendo. Après des cibles molles, comme des hôtels et restaurants, cette attaque a visé des cibles dures, des symboles forts », a jugé un consultant burkinabé en sécurité, Paul Koalaga, cité par l’AFP. « Une attaque très organisée, très minutée, avec une grande clarté dans les objectifs: cela désigne certains des groupes qu’on connaît bien dans la région », a de son côté déclaré une source diplomatique française à l’AFP. Et d’ajouter : « Je crois qu’il n’y a pas de précédent. On a déjà eu des précédents avec des voitures piégées qui ont explosé devant des ambassades— Tripoli, Nouakchott— mais pas cela». « Taper comme ça, en pleine capitale, à Ouagadougou, ce sont des représailles, une vraie stratégie pour dire: On vous touche là où vous ne nous attendez pas », explique sur France-Info, Antoine Glaser, journaliste et écrivain spécialiste de l’Afrique. Il estime que « c’est un message envoyé aux autorités burkinabé et françaises ».
Le G5 Sahel visé
Selon le ministre burkinabé de la Sécurité, Clément Sawadogo, l’attentat visait peut-être « une réunion militaire de la force multinationale antidjihadiste du G5 Sahel (Mali, Burkina, Niger, Tchad et Mauritanie), qui devait se tenir dans une salle dévastée par l’explosion d’une voiture piégée. Cette réunion entre le chef d’état-major et des officiers a été tenue dans une autre salle au dernier moment, évitant un carnage ». En effet, cette double attaque intervient au moment où Emmanuel Macron est en train de faire pression sur le G5 Sahel pour organiser des offensives aux trois frontières du Mali, du Niger et du Burkina Faso. La France, pays qui a de grands intérêts économiques dans le continent, notamment dans la région du Sahel, est l’un des principaux initiateurs du G5 Sahel, créé en 2017.
« Les attaques à Ouagadougou sont la conséquence du soutien français au G5 Sahel qui lutte contre les groupes djihadistes », explique Amira Abdel-Halim, spécialiste de l’Afrique au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, en ajoutant que « les Européens ont laissé la France se charger de la lutte antiterroriste au Sahel ». Elle explique aussi que la montée en puissance du G5 Sahel inquiète les groupes terroristes: « C’est pourquoi ils ont recours à des attaques qui font du bruit pour dire qu’ils existent et que leur capacité de nuisance est entière ».
« Nous allons tout faire pour que le G5 Sahel ne s’installe pas » dans cette zone, a ainsi assuré le 15 janvier à l’AFP un porte-parole de Daech dans le Grand Sahara. Un rapport remis à l’Onu vendredi 2 mars est lui aussi venu souligner la recrudescence des actions terroristes au Mali, avec un risque de propagation dans les pays frontaliers. Selon ce rapport, la montée en puissance du G5 Sahel va de pair avec des « menaces terroristes croissantes de Daech dans le Grand Sahara et d’Ansar Al-Islam », notamment dans la région frontalière entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger.
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