C’est évident. Le numéro un américain Donald Trump hésite encore quant à la politique à suivre avec Pyongyang. Alors que sa tournée en Asie était censée être un « marathon diplomatique », voire une « croisade » qui vise à maximiser les pressions internationales sur la Corée du Nord, à cause de son programme nucléaire, elle n’a fait que mettre à nu les tergiversations d’un président qui oscille entre la politique du bâton et celle de la carotte sur le dossier nord-coréen.
Ainsi, Donald Trump a lancé à Séoul un discours musclé devant l’Assemblée nationale sud-coréenne, où il a appelé le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-Un, à ne jamais sous-estimer la détermination de l’Amérique et à renoncer à son programme nucléaire. Des mots qui se sont vite traduits en acte : des bâtiments de la marine de guerre sud-coréenne se sont joints samedi à trois porte-avions américains dans une démonstration de force inédite à l’adresse de la Corée du Nord. L’exercice conjoint, qui va se poursuivre durant quatre jours, mobilise les porte-avions USS Ronald Reagan, USS Nimitz et USS Theodore Roosevelt, ainsi que sept navires sud-coréens, a précisé le ministère sud-coréen de la Défense. C’est la première fois depuis dix ans que des manoeuvres de ce type mobilisent trois porte-avions. « L’exercice est destiné à renforcer la dissuasion contre les menaces nucléaires et les missiles de la Corée du Nord et à démontrer notre préparation à repousser toute action provocatrice du Nord », a déclaré un porte-parole du ministère sud-coréen de la Défense.
En réponse, le régime de Kim Jong-Un a réagi samedi avec véhémence. « Le président américain se livre à une tournée va-t-en-guerre. Mais, ces avertissements ne pourront jamais nous faire peur ni arrêter nos avancées », a affirmé un porte-parole du ministère nord-coréen des Affaires étrangères. Selon Dr Hicham Mourad, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, ni l’arme des menaces ni celle des sanctions ne va porter ses fruits avec Pyongyang. « Démuni, Pyongyang fait le maximum de pressions sur les Etats-Unis pour s’attirer le plus de gains économiques », affirme l’expert.
Rôle primordial pour Pékin
A la veille des manoeuvres américano-sud-coréennes, le président américain a franchi l’étape la plus importante de sa tournée en se rendant vendredi 10 novembre en Chine, principal soutien économique de la Corée du Nord. S’il a longuement insisté sur ses excellentes relations avec son homologue chinois, Xi Jinping, le président américain a indiqué qu’il attendait davantage de lui sur le dossier nord-coréen. « La Chine peut régler ce problème facilement et rapidement », a-t-il martelé, exhortant son homologue chinois à faire monter la pression sur le régime nord-coréen. Tenant à ne pas lâcher son voisin communiste en dépit des pressions américaines, M. Xi a insisté sur la nécessité de donner la priorité au « dialogue et à la négociation » avec la Corée du Nord. Pourtant, Trump s’est félicité dimanche des progrès accomplis sur le dossier nord-coréen en affirmant que la Chine allait durcir ses sanctions contre Pyongyang.
En fait, selon l’analyste politique, Pékin souffle le chaud et le froid avec Washington, car il est dans une situation embarrassante. « Il ne peut admettre que son voisin communiste possède l’arme nucléaire, mais il ne peut jamais le priver de son soutien pour éviter qu’il ne s’effondre. Cet éventuel effondrement aurait de lourdes conséquences sur la Chine, notamment un exode massif des Nord-Coréens vers la Chine. De plus, permettre l’effondrement de la Corée du Nord ouvrirait la voie à une éventuelle réunification de la péninsule sous domination américaine, ce que Pékin n’accepterait jamais », explique Dr Mourad. C’est probablement pour cette raison, et tant d’autres, que Washington s’est montré en même temps « conciliant » à l’égard de Pyongyang, évoquant pour la première fois des « progrès » et de possibles « négociations » avec Kim Jong-Un. « Les canaux de communication directe entre les Etats-Unis et la Corée du Nord sont ouverts », a déclaré samedi le chef de la diplomatie américaine, Rex Tillerson, qui avait déjà évoqué en septembre ces « canaux de communication », alors que le président américain avait promis, en ce moment, devant l’Assemblée générale de l’Onu, de « détruire totalement » la RPDC. Selon Dr Mourad, les tergiversations de Trump ne sont qu’un reflet de la division de l’Administration américaine sur le dossier nord-coréen. Et sur tant d’autres .
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