L'abstention a atteint un taux record de 24,95 `%.
(Photo:AFP)
Sans véritable surprise, les Français ont choisi — sans doute sans grande conviction —, Emmanuel Macron (66 % des voix) au deuxième tour de la présidentielle qui s’est tenu dimanche 7 mai et qui l’a opposé à la canditate de l’extrême droite, Marine Le Pen (34 %). Et c’est justement la présence de celle-ci au second tour qui lui a assuré l’arrivée à l’Elysée. En effet, Emmanuel Macron peut se réjouir d’être, à 39 ans, le plus jeune président de l’histoire de France, il peut se réjouir d’être l’un des plus jeunes chefs d’Etat de la planète, il peut se réjouir de son ascension rapide et fulgurante — Macron était encore inconnu il y a quelques années et son mouvement En Marche ! n’a été créé qu’en avril 2016 —, mais il doit surtout s’inquiéter pour l’avenir. Car s’il a remporté une large victoire, il n’a pas reçu «
un blanc-seing » de la part des électeurs français : l’extrême droite a en effet tout de même réalisé une prouesse, avec le score le plus élevé de son histoire, l’abstention a atteint un taux record (24,95 %, la plus forte abstention depuis 1969), et enfin, l’élection a vu un nombre historique de votes blancs et nuls (un peu plus de 4 millions), plus d’un Français sur trois a refusé de choisir entre lui et Marine Le Pen. Autant de signes d’une insatisfaction à l’égard du nouveau président français, malgré ses 66 %. C’est dire que pour Emmanuel Macron, le plus dur reste à venir.
La première tâche, difficile, de président élu est donc la recherche d’une majorité. Dès le lendemain de l’élection, Emmanuel Macron s’est attelé à la composition de son gouvernement pour mener la difficile bataille des élections législatives de juin dans une France profondément divisée. « Je me battrai de toutes mes forces contre les divisions qui nous minent », a lancé Macron, en promettant de ne céder en « rien à la peur » ni « à la division ». Le président élu doit dévoiler dans les prochains jours le nom de son premier ministre et la composition du futur gouvernement avant de solliciter une majorité aux élections législatives (11 et 18 juin), afin de mettre en oeuvre son programme. D’ores et déjà, il promet de dépasser les partis traditionnels, de droite comme de gauche, pour créer une nouvelle majorité au centre aux législatives. Mission difficile : le chef de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon (19,58 % au premier tour de la présidentielle) a lancé dimanche un appel à ses 7 millions d’électeurs du premier tour à se « fédérer » pour les législatives de juin afin de s’opposer à Emmanuel Macron, « nouveau monarque présidentiel ». Par ailleurs, des personnalités de gauche et de droite comptent se présenter aux prochaines législatives. Cette situation inédite rebat durablement les cartes, et pour gouverner, le président français élu va devoir faire cohabiter des personnalités aux sensibilités parfois disparates.
La deuxième tâche est plus classique et a été une priorité : comme ses prédécesseurs, Macron sera jugé à l’aune de l’emploi, dans un pays plombé par un chômage endémique, 10 %, contre 3,9 % en Allemagne et 8 % en moyenne dans l’Union européenne.
Un novice en politique internationale
Macron est également attendu sur des chantiers qui lui sont encore inconnus, notamment en politique étrangère. Emmanuel Macron va entrer à l’Elysée à un moment où le monde apparaît bien plus dangereux et instable qu’il y a quelques années, avec une présidence américaine imprévisible, une Russie ambitieuse et conquérante, un terrorisme islamique qui ne désarme pas et un Proche-Orient en feu. Or, mise à part l’Europe — il se déclare en premier lieu pro-européen —, Macron n’a pas toujours clarifié, pendant la campagne électorale, sa vision de la politique étrangère de la France, 5e puissance mondiale et membre permanent du Conseil de sécurité de l’Onu. Sans véritable expérience internationale, le président français élu doit d’emblée se confronter aux dossiers les plus explosifs, du Brexit à la crise migratoire en passant par la Syrie ou la lutte antiterroriste. A ce sujet, il a d’ores et déjà promis que la lutte contre le terrorisme constituerait une des priorités de son action, et s’est dit déterminé à avoir une « collaboration forte » avec Washington, sans pour autant donner de détails sur sa stratégie future. Cité par l’AFP, pour le général Jean-Paul Paloméros, ancien chef d’état-major de l’armée de l’air, qui a conseillé le candidat Macron, l’engagement militaire français au Sahel comme au Moyen-Orient devrait se poursuivre « sous sa forme actuelle ». 6 500 hommes sont engagés dans des opérations extérieures, principalement au Sahel (opération Barkhane), en Iraq et en Syrie contre le groupe Etat islamique (Chammal).
Au sujet de la Syrie, Macron a joué pendant la campagne à l’exercice de la corde raide entre « il faut parler à des éléments du régime de Bachar car la lutte contre le terrorisme est notre priorité absolue », — quitte à ne pas faire de son départ un préalable — et « Bachar ne peut pas rester au pouvoir » après la dernière attaque à l’arme chimique. Selon lui, la crise syrienne ne peut être réglée par l’Iran et la Russie uniquement. Politiquement, c’est « un échec complet » contraire au multilatéralisme, avait-il déclaré. Ce qui a conforté Emmanuel Macron dans sa volonté de prendre des distances vis-à-vis de la Russie.
Ainsi, selon les prévisions, ses prises de position sur les grands sujets vont s’inscrire dans la continuité de la politique étrangère menée par son prédécesseur, Macron n’ayant annoncé aucun changement de cap majeur dans la diplomatie française, « en continuant le travail dans les alliances ».
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