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Venezuela, l’impasse

Maha Al-Cherbini avec agences, Lundi, 08 mai 2017

L'opposition poursuit sa mobilisation populaire et maintient la pression sur le président socialiste Nicolas Maduro, qui a fait un nouveau faux pas en appelant à modifier la Constitution pour s'accrocher au pouvoir.

Malgré un bilan lourd (36 morts et plus de 700 blessés) en un peu plus d’un mois, la pression de l’opposition vénézuélienne se maintient toujours pour exiger le départ du président socialiste Nicolas Maduro avant la fin de son mandat en décembre 2018. Déterminée à ne pas relâcher la pression, l’opposition a organisé samedi une marche de femmes vêtues de blanc, qui ont défilé jusqu’au siège du ministère de l’Intérieur et de la Justice, dans le centre de Caracas, pour dénoncer la répression qui sévit depuis le début de la vague des manifestations début avril. « Le régime est en train de tomber. Il n’a pas de force et il est en train de montrer son pire visage en utilisant les armes », a lancé Lilian Tintori, l’épouse du leader d’opposition Leopoldo Lopez. En fait, la détermination de l’opposition a encore été démontrée vendredi avec la destruction d’une statue de l’ancien président Hugo Chavez, au pouvoir de 1999 jusqu’à son décès en 2013, dans la ville de Rosario de Perija, dans l’ouest du pays. Les manifestants, principalement des étudiants, ont brûlé la statue, puis l’ont arrachée de son piédestal avant de la réduire en morceaux. A Caracas comme dans d’autres villes, de graves batailles ont opposé, vendredi, des milliers d’étudiants et les forces de l’ordre avec des gaz lacrymogènes, cocktails Molotov et jets de pierres. Ces manifestations anti-Maduro quasi quotidiennes surviennent alors que le pays pétrolier a sombré avec la chute des cours du brut : le mécontentement populaire atteint un niveau historique, avec huit habitants sur dix souhaitant le départ immédiat de Maduro. Lançant un nouveau défi au pouvoir, le parlement vénézuélien, contrôlé par l’opposition, a présenté à l’Organisation des Etats Américains (OEA), à Washington, son refus de quitter l’organisation, contrairement à ce qu’a décidé le président.

En effet, les manifestations de cette semaine étaient principalement motivées par un nouveau faux pas du président qui s’attache bec et ongles au pouvoir. Sous forte pression populaire, Maduro a remis la semaine dernière au Conseil national électoral un décret convoquant l’assemblée constituante qui aura pour mission de rédiger une nouvelle Constitution afin de remplacer celle de 1999. Selon lui, l’élection des 500 membres de cette assemblée, dont la moitié seront élus ou désignés par différents secteurs de la société, se fera dans les prochaines semaines. Si M. Maduro n’a pas encore détaillé les changements qu’il souhaitait introduire dans la Constitution, ses adversaires redoutent le pire. Pour l’opposition, c’est une manière pour le clan présidentiel de « consolider le coup d’Etat » fomenté, selon elle, fin mars, quand la Cour suprême s’est brièvement arrogé les pouvoirs du parlement, avant de renoncer face au tollé diplomatique. Cette décision avait été l’étincelle qui avait déclenché les protestations. L’assemblée constituante pourrait, en effet, bousculer le calendrier électoral : des municipales sont programmées pour 2017, avant la présidentielle de fin 2018. « C’est une tactique dilatoire trompeuse pour échapper à la pression du peuple qui demande des élections », estime l’avocat constitutionnaliste Juan Manuel Rafalli.

Selon l’opposition, le gouvernement ne peut pas gagner les élections, c’est pourquoi il veut démonter la manière dont elles sont organisées. Toute échéance électorale est, en effet, risquée pour le chef de l’Etat dont 80 % de la population souhaitent un départ immédiat.

Selon plusieurs analystes, le président a fait un nouveau faux pas en tentant de changer la Constitution : il ne fait qu’aggraver la crise politique qui suscite déjà une inquiétude croissante dans la communauté internationale. Alors que le Brésil a dénoncé un « coup d’Etat », l’Espagne, l’Argentine et les Etats-Unis se sont aussi montrés critiques, des sénateurs américains, Républicains et Démocrates, déposant une proposition de loi codifiant des sanctions contre le Venezuela.

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