C’est dans une ambiance électrique chargée d’échanges musclés et d’accusations mutuelles que s’est tenu, lundi dernier, à six semaines de l’élection présidentielle américaine, le premier débat présidentiel entre la Démocrate Hillary Clinton et le Républicain Donald Trump. Un débat très attendu et très suivi. En effet, si les débats présidentiels de ce genre ont toujours revêtu une grande importance, celui-ci, de par sa particularité, a bien plus attiré l’attention : c’est la première fois que l’élection présidentielle américaine oppose une femme à un candidat aussi controversé que Trump. Pour les deux candidats à la Maison Blanche, l’objectif était double dans ce premier débat tant attendu et tant suivi. Il s’agissait d’abord de tout faire pour s’affirmer comme ayant tous les attributs pour devenir président des Etats-Unis. Il s’agissait aussi et surtout de convaincre et séduire les électeurs indécis ou peu motivés qui, comme dans toute élection, peuvent faire la différence le jour du scrutin. Sur ces deux plans, l’ancienne secrétaire d’Etat et ancienne première dame a marqué plus de points que son rival. En effet, l’une des raisons de la suprématie de Clinton est qu’elle est hyper-expérimentée en matière de débats, mais aussi plus généralement de politique, contrairement au milliardaire controversé, considéré comme un néophyte au caractère imprévisible.
Ainsi, les observateurs s’accordent à dire que Clinton, forte de son passé de politicienne chevronnée, est sortie victorieuse, tout comme les sondages la placent au-dessus de Trump. Cela dit, l’issue des élections reste encore complètement imprévisible, les dernières semaines risquant de changer les tendances.
Pendant 90 minutes, les deux rivaux se sont affrontés sur leur vision de l’avenir, l’économie, la sécurité, la politique étrangère et d’autres sujets comme la feuille d’impôt de Donald Trump ou les emails d’Hillary Clinton. Pendant 90 minutes surtout, les deux candidats se sont bombardés de critiques. Et Trump de décrire Clinton comme une « politicienne typique ». « Des discours, pas d’action. Vous avez fait ça pendant 30 ans, pourquoi commencez-vous à penser à ces solutions maintenant ? ». Ou encore de fustiger : « Elle n’a pas l’énergie (...) Pour être président de ce pays, vous avez besoin d’une énergie phénoménale ». Réponse de Clinton : « Quand il aura voyagé dans 112 pays et négocié un accord de paix, un cessez-le-feu, la libération de dissidents (...) ou même qu’il aura passé 11 heures à témoigner devant une commission au Congrès, il pourra me parler d’énergie ». Ainsi, tout au long du débat, Clinton a su renvoyer la balle et rendre les attaques de son adversaire coup pour coup. Avec assurance et défi, elle a déclaré : « Vous me critiquez pour m’être préparée à ce débat, vous savez à quoi d’autre je me suis préparée ? A être présidente ». Et de poursuivre : « Donald, vous vivez dans un monde à part ». « Il cache quelque chose (...) Peut-être qu’il n’est pas aussi riche qu’il le dit », rappelant que tous les candidats à la Maison Blanche depuis 40 ans avaient diffusé leurs déclarations d’impôts. L’ancienne chef de la diplomatie a aussi accusé son rival d’avoir bâti sa carrière politique sur un « mensonge raciste » mettant en doute la nationalité américaine du président Barack Obama.
Un échange de diatribes
Ainsi, le premier débat Clinton/Trump s’est transformé en simple échange de diatribes, de critiques et d’accusations. Même les questions de fond, celles qui devraient théoriquement former le fond de la campagne électorale, ont été abordées dans ce même esprit. Au sujet de la politique étrangère par exemple, notamment proche-orientale, Trump a déclaré : « Si vous regardez le Moyen-Orient, c’est le chaos total, dans une large mesure sous votre direction. (…) Vous parlez de l’Etat Islamique (EI), mais vous étiez là et vous étiez secrétaire d’Etat alors que le groupe n’en était qu’à ses balbutiements. Maintenant il est présent dans plus de 30 pays, et vous allez les arrêter ? Je ne le pense pas (…). Elle vous explique comment combattre l’EI sur son site Internet (...). Vous dites à l’ennemi tout ce que vous voulez faire. Pas étonnant que vous ayez combattu l’Etat islamique toute votre vie adulte ». Réponse de Clinton : « Donald ne veut pas révéler son plan secret pour lutter contre l’EI. Le seul secret, c’est qu’il n’a pas de plan ».
Conclusion, si le premier débat a balayé un grand nombre de sujets, de l’économie à la sécurité nationale en passant par les questions raciales, il aura surtout été un débat décousu, souvent acrimonieux, et dominé par les critiques mutuelles. Le prochain débat aura lieu le 9 octobre à St. Louis (Missouri), il restera alors moins d’un mois avant le scrutin. Certes, dans la culture démocratique américaine, ces débats revêtent une grande importance, il n’en demeure pas moins que ce n’est pas seulement sur eux que chaque candidat compte pour faire pencher la balance en sa faveur. D’ici au jour J, ce sera sur les mêmes arguments que chaque partie insistera : Donald Trump misant sur ses coups de théâtre et profitant d’une peur généralisée du terrorisme, Hillary Clinton comptant sur le soutien de tous ceux qui scandent « Tout sauf Trump ».
Elections américaines, mode d’emploi
Selon la Constitution américaine, l’« Election Day » (jour de l’élection) se tient le mardi qui suit le premier lundi de novembre (donc au plus tôt le 2 novembre, au plus tard le 8). Cette année, c’est le 8 novembre prochain que se tiendra l’élection présidentielle américaine, ou, plus précisément, la première étape du scrutin. En effet, le 8 novembre est la date du scrutin des électeurs citoyens : l’élection présidentielle étant un scrutin indirect, les citoyens américains ne votent pas directement pour l’un des deux candidats, mais élisent un collège de grands électeurs « Electoral College » qui eux voteront pour l’un des deux. Ces grands électeurs affichent publiquement leurs convictions et leur choix de vote bien avant le vote. Le résultat du scrutin du 8 novembre permettra donc de déduire qui sera le prochain président américain, même si ce n’est pas officiel. Mais en réalité, ce n’est que le 19 décembre que le scrutin des grands électeurs aura lieu, et c’est à l’issue de ce vote que sera officiellement élu le 45e président des Etats-Unis. Ensuite, c’est le 20 janvier suivant l’élection présidentielle (parfois le 21 janvier si le 20 tombe un dimanche), qu’a lieu l’« Inauguration Day », journée durant laquelle le nouveau président prête serment et devient officiellement président des Etats-Unis. Aussi, le mode de scrutin américain est à un seul tour. Les électeurs ne se prononcent qu’une seule fois, les grands électeurs se contentent uniquement de répercuter le vote des électeurs.
En outre, les procédures de mise en candidature aux Etats-Unis diffèrent de celles de la plupart des autres régimes démocratiques. Des élections primaires dans les deux principaux partis commencent en janvier de l’année électorale. Et le candidat de chaque parti est officiellement nommé lors de la convention de ce dernier, qui se tient généralement en été, c’est-à-dire, à quelques mois des présidentielles. Enfin, la vie politique américaine étant bipolaire, le président appartient à l’un des deux partis principaux : le Parti républicain et le Parti démocrate.
Trump courtise le lobby juif
Une présidence Trump reconnaîtra Jérusalem comme capitale indivisible de l’Etat d’Israël. C’est ce qu’a déclaré dimanche dernier le candidat républicain à la Maison Blanche, lors d’une rencontre avec le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, à New York, selon sa campagne. Cette rencontre privée de plus d’une heure s’est tenue chez M. Trump, dans la tour Trump à New York, a précisé sa campagne, et a permis d’aborder « de nombreux sujets importants pour les deux pays ». « M. Trump a reconnu que Jérusalem est la capitale éternelle du peuple juif depuis plus de 3 000 ans, et que les Etats-Unis, sous une administration Trump, accepteront finalement le mandat de longue date du Congrès de reconnaître Jérusalem comme la capitale indivisible de l’Etat d’Israël », a précisé la campagne du candidat républicain dans un communiqué. « M. Trump a reconnu qu’Israël et ses citoyens ont souffert beaucoup trop longtemps sur les lignes de front du terrorisme islamique. Il s’est dit d’accord avec le premier ministre Netanyahu que le peuple israélien veut une paix juste et durable avec ses voisins, mais que cette paix ne viendra que lorsque les Palestiniens renonceront à la haine et la violence et accepteront l’Etat d’Israël comme un Etat juif », ajoute aussi le communiqué. Une façon pour Trump de courtiser une partie importante de l’électorat, à savoir, le lobby juif. Une façon aussi de confirmer une fois de plus que la politique proche-orientale de Washington est basée sur un soutien inconditionnel à Israël, tout compte fait, aussi bien du côté des Républicains que des Démocrates.
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