Bien qu’enlisé dans une importante crise politique et économique, le Venezuela a accueilli samedi et dimanche derniers le 17e sommet du Mouvement des Non-Alignés. Le pays a reçu la présidence tournante du sommet pour trois ans, succédant à l’Iran. Dans leur communiqué final, les délégués présents ont appelé à la non-ingérence, à la paix et à la coopération. Des termes banals qui n’apportent pas pour le moment de réelle perspective. Ce même communiqué a également mentionné les inquiétudes du Mouvement quant à la situation de crise interne et à l'isolement international auquel est confronté le Venezuela aujourd’hui.
Outre la crise politique, créée par l’opposition (de droite), qui tente de révoquer le président Nicolas Maduro le plus vite possible, ce dernier a été mis de côté par les pays fondateurs du groupement économique Mercosur qui sont l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. Ces derniers lui ont retiré la présidence tournante du marché commun sud-américain, préférant l’assumer conjointement. Le Venezuela se voit reprocher de n’avoir ratifié, depuis son adhésion au Mercosur en 2012, qu’un nombre restreint de normes juridiques pour le Mercosur. Furieux, Caracas dit refuser cette décision et garder la présidence, donnant lieu à une situation ubuesque pour ce bloc régional fondé en 1991. En recevant le sommet des Non-Alignés dans de telles conditions, M. Maduro veut asseoir sa légitimité internationale et cacher la grave crise interne qui secoue son pays. « Je profite de ce sommet pour dénoncer cette droite pro-impérialiste, agenouillée devant les intérêts de l’empire (les Etats-Unis) », a lancé M. Maduro, qui accuse l’opposition de fomenter un coup d’Etat avec le soutien de Washington. Le pays devra cependant se plier à une telle décision d’ici le 1er novembre, sous peine de se voir exclu du groupement sud-américain. La tenue de ce sommet a, quant à elle, déchaîné la colère de l’opposition qui accuse le gouvernement de dépenser des millions dans cet événement qui, selon elle, ne sert qu’à « se donner une bonne image » et « maquiller » la situation interne. « Ils sont en train de préparer un grand spectacle international où les Vénézuéliens sont totalement oubliés », affirme l’ex-candidat à la présidentielle, Henrique Capriles. Le Venezuela, pétrolier par excellence, dont l’économie a sombré avec la chute des cours du brut, affronte la pire inflation au monde et une pénurie touchant 80 % des aliments et médicaments. Cet effondrement économique a amené, selon l’institut de sondages Datanalisis, plus de 80 % des Vénézuéliens à exiger un changement présidentiel. Le gouvernement de M. Maduro, au pouvoir depuis 2013, dénonce pour sa part une « guerre économique » menée par la droite et les milieux des affaires, qui, selon lui, aggravent les pénuries pour faciliter un coup d’Etat à son encontre.
Unique issue pacifique
Face à cette situation interne qui empire, l’opposition au Venezuela voit dans la révocation du président l’unique issue pacifique à la crise politique et économique qui secoue le pays. L’opposition a manifesté cette semaine pour réclamer le plus vite un référendum révocatoire. Mais la possibilité qu’il survienne en 2016 semble désormais infime, surtout après la déclaration du vice-président, Aristobulo Isturiz, qui a annoncé publiquement : « Cette année, il n’y aura pas de référendum ». Après la frustration provoquée par cette annonce, la coalition de la Table pour l’unité démocratique (MUD, centre droit), majoritaire au Parlement, a appelé le peuple vénézuélien à descendre dans la rue dès mercredi prochain, pour faire pression sur le Conseil National Electoral (CNE) accusé de retarder la publication du calendrier politique à venir pour protéger le président. Ce calendrier est un point crucial de la bataille que mène l’opposition. Car si le référendum a lieu d’ici le 10 janvier 2017 et est couronné de succès, il provoquera des élections anticipées. S’il est organisé plus tard, une éventuelle révocation de Nicolas Maduro n’entraînerait que son remplacement par son vice-président, du même parti, jusqu’à la fin de son mandat en 2019. Mais dans ce cas, les analystes préviennent un risque important d’explosion sociale. Selon Dr Moustapha Kamel, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, la révocation de Maduro reste incertaine car le peuple vénézuélien est divisé. « Le camp pro-Maduro organise des manifestations parallèles à celles de l’opposition. Le président est soutenu par une partie du peuple, surtout les classes pauvres qui ont confiance en lui, car il est le successeur de Chavez, partisan des classes défavorisées. Cette division populaire rend l’avenir du pays particulièrement confus », conclut l’expert .
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