
Signés en 1993, les accords d'Oslo prévoient la proclamation d'un Etat palestinien le 4 mai 1999.
(Photo:AP)
Le 30 mai prochain, c’est la date fixée pour la tenue, à Paris, d’une conférence internationale qui rassemblera les ministres des Affaires étrangères d’une vingtaine de pays, dont les membres du Quartet (Etats-Unis, Russie, Union européenne, Onu) et des représentants de la Ligue arabe. Objectif : s’accorder sur un calendrier et des objectifs généraux, avant l’organisation d’une autre réunion entre chefs d’Etat et de gouvernement, au deuxième semestre de 2016. Et ce n’est que lors de cette future conférence que Palestiniens et Israéliens seront conviés à la table des discussions.
Pour l’heure donc, le seul point positif est que l’on rouvre enfin le dossier israélo-palestinien. A part cela, rien. En effet, cela fait plus de cinq ans que ce qui a toujours été considéré comme la question-clé du Moyen-Orient est relégué au deuxième plan, voire jeté aux oubliettes. Et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, l’avènement des « Printemps arabes » et surtout les crises aiguës qui s’ensuivirent en Syrie, en Libye et au Yémen et qui restent des plaies ouvertes. Celles-ci ont détourné l’attention vers elles, au détriment de la question palestinienne, qui souffre d’un déplorable statu quo. Ensuite, la position israélienne elle-même, ou, plus précisément celle du premier ministre de droite Benyamin Netanyahu, dont l’intransigeance laisse clairement entrevoir qu’il n’a aucune intention de paix. Et enfin, la désaffection du dossier du processus de paix par ses principaux parrains, à savoir les Etats-Unis et la Russie.
Et c’est justement dans le contexte de ce dernier facteur qu’intervient l’initiative française : Paris tente de sortir du patronage traditionnel et surtout infructueux des Etats-Unis dans les négociations israélo-palestiniennes, d’autant plus que depuis 2014 et l’échec du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, aucune initiative politique n’a été relancée.
Paris s’active donc à faire bouger les choses. En prélude à la conférence de Paris, d’ici au 30 mai, le Quartet devrait rendre un rapport sur la situation sur le terrain et dessiner des pistes pour la préservation d’une solution à deux Etats. Une réunion technique entre diplomates devrait se tenir quelques jours avant la conférence de Paris pour s’accorder sur les termes du communiqué final. Et surtout, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, qui a pris la relève de son prédécesseur, Laurent Fabius, à l’origine de cette initiative, pourrait se rendre en Israël et dans les territoires occupés. L’information n’a pas été confirmée, mais la date du 13 mai est déjà avancée. Car pour l’heure, les Israéliens restent réservés quant à l’initiative française.
Scepticisme
Et c’est là l’une des raisons du scepticisme qui prévaut malgré les efforts français. Déjà, le chef de la Diplomatie française a précisé que les discussions internationales repartiront « sur la base de l’initiative de paix arabe de 2002 ». Lancée par l’Arabie saoudite, cette initiative prévoyait « un retrait intégral d’Israël de tous les territoires arabes occupés depuis 1967 en application des résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité, telles que confirmées par la Conférence de Madrid de 1991, et du principe terre contre paix », elle demandait aussi qu’Israël accepte l’avènement « d’un Etat palestinien indépendant et souverain avec pour capitale Jérusalem-Est », en contrepartie de l’établissement par les Etats arabes de « relations normales dans le contexte d’une paix globale avec Israël ».
Or, cette initiative avait alors été rejetée par Israël. Et l’on imagine mal que le gouvernement Netanyahu, peuplé de faucons, s’y rallie aujourd’hui. En effet, avec un gouvernement de droite et d’extrême droite, les Israéliens n’ont jamais été, depuis plus de deux décennies, aussi peu favorables à une entente avec les Palestiniens. Pire encore, concrètement parlant, la colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est qui se poursuit inexorablement sans que la communauté internationale puisse faire quoi que ce soit pour la stopper, crée sur le terrain une situation de fait qui, chaque jour, affaiblit l’option des deux Etats (voir encadré).
Côté palestinien, la situation est différente, mais ne prête pas non plus à l’optimisme. D’abord, en raison des divisions entre le Fatah du président Mahmoud Abbas, maître de la Cisjordanie, et le Hamas, qui contrôle toujours la bande de Gaza. Ensuite et surtout, à cause de la faiblesse actuelle de Mahmoud Abbas, dont la popularité est en baisse. Avec des tensions grandissantes au sein de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), entre le Fatah et les autres factions palestiniennes, le président palestinien est accusé par ses détracteurs de tenter de plus en plus d’affaiblir ses opposants et de les réduire au silence. L’immobilisme quant au processus de paix, doublé de dissensions interpalestiniennes, a ainsi favorisé l’émergence d’un climat général de désespoir auprès de la génération post-Oslo, qui ne voit d’autre option que « l’Intifada des couteaux ».
A tout cela s’ajoute un dernier facteur non moins déterminant : l’initiative française intervient à un moment où les Etats-Unis, en pleine campagne électorale pour les présidentielles de novembre 2016, ne peuvent ni ne veulent s’impliquer dans le dossier israélo-palestinien. Ce n’est sûrement pas en fin de mandat et après huit années d’impuissance sur ce dossier que le président américain, Barack Obama, risque de faire le moindre effort.
Face à ce tableau, l’initiative française semble vouée à l’échec et on imagine mal comment elle pourra remettre sur les rails le processus de paix aujourd’hui mort. Un processus, qui, faut-il le rappeler, était censé aboutir à la proclamation d’un Etat palestinien indépendant le 4 mai 1999. C’est-à-dire, il y a exactement 17 ans ….
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