C’est la première fois que le président cubain, Raul Castro, s’exprime à la tribune des Nations-Unies. Intervenant quelques semaines à peine à la suite de la réconciliation entre son pays et les Etats-Unis, le chef de l’Etat cubain a trouvé l’occasion pour exiger la levée de l’embargo économique et commercial américain qui, selon lui, demeurait l’obstacle numéro un au développement de son pays.
« L’embargo est l’obstacle principal au développement économique de notre pays. L’embargo économique, commercial et financier contre Cuba persiste depuis plus d’un demi-siècle, causant des dommages et des privations au peuple cubain et il touche d’autres Etats étant donné sa portée extraterritoriale, il nuit aux intérêts des Américains et des entreprises américaines », a ainsi plaidé le numéro un cubain à l’Onu. « Une telle politique est rejetée par 188 Etats membres de l’Onu, qui demandent qu’elle prenne fin », a continué Raul Castro, âgé de 84 ans.
Ce n’est pas la première fois qu’un dirigeant cubain, ou Raul Castro lui-même, demande la levée de cet embargo. Mais l’occasion, avec un discours devant l’Assemblée générale dans le cadre d’un sommet mondial sur le développement, était particulièrement solennelle. Pressant l’Assemblée générale de l’Onu à résoudre le problème de son pays, Castro a rappelé que chaque année depuis plus de 20 ans, les 193 membres de l’Assemblée réclament à une écrasante majorité la levée de l’embargo par une résolution non contraignante que Washington choisit d’ignorer à chaque fois. Cuba, qui évalue à 121 milliards de dollars le tort qu’a causé l’embargo à son économie, déploie des efforts cette fois pour que l’Assemblée générale annuelle en cours adopte une nouvelle résolution demandant sa levée.
Pourtant, les Etats-Unis ont déjà levé une partie des restrictions pesant sur les sociétés américaines qui veulent commercer avec Cuba, tout en facilitant les déplacements entre les deux pays, dernière initiative en date pour alléger l’embargo imposé à l’île communiste. Les nouvelles réglementations concernent notamment les secteurs du tourisme, des télécommunications, des services Internet et des banques. Autrement dit, elles autorisent les sociétés américaines à se doter de filiales cubaines, par exemple via des co-entreprises avec des firmes locales. Les compagnies aériennes et maritimes qui desservent l’île pourraient, en outre, se faire livrer des pièces et du matériel, ce qui améliorerait la sécurité des voyageurs, et les restrictions concernant l’exportation des logiciels informatiques seraient assouplies. « Il s’agit du développement le plus important depuis des décennies en matière de réglementation des échanges avec Cuba et des investissements », a affirmé à l’AFP John Kavulich, directeur du Conseil économique et commercial américano-cubain.
Hostilité du Congrès
Cela dit, cet allégement considéré comme un rapprochement historique entre les deux pays ne met pas un terme à l’embargo. Sa levée totale ne peut être décidée que par le Congrès, dont la majorité reste hostile au rapprochement avec La Havane. Et, aux Etats-Unis, les avis divergent. « Une relation plus forte et ouverte entre les Etats-Unis et Cuba est susceptible de créer des opportunités économiques pour les Américains comme les Cubains », déclare le secrétaire au Trésor, Jack Lew, dans un communiqué, en ajoutant qu’« en allégeant davantage ces sanctions, les Etats-Unis contribuent à soutenir les efforts du peuple cubain pour parvenir à la liberté politique et économique nécessaire pour construire un Cuba démocratique, prospère et stable ».
Mais la normalisation progressive des relations entre Washington et La Havane, engagée en décembre 2014, suscite de fortes résistances aux Etats-Unis, notamment au sein de la communauté cubaine exilée et du Congrès à majorité républicaine. Le premier tête-à-tête entre le président cubain, Raul Castro, et son homologue américain, Barack Obama, avait eu lieu au mois d’avril, à Panama, en marge du Sommet des Amériques. Les Etats-Unis et Cuba ont repris des relations diplomatiques le 20 juillet et ont rouvert, alors, des ambassades après plus d’un demi-siècle d’animosité.
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