Réunis au Caire, Sameh Shoukry, Ayman Safadi et Stéphane Séjourné, les chefs de la diplomatie égyptienne, jordanienne et française, ont souligné un double objectif : le soulagement humanitaire immédiat à Gaza, avec la fin des hostilités israéliennes, et la recherche d’une solution politique au conflit par l’adoption de la formule à deux Etats. Dans le document final de la réunion et lors de leur conférence de presse, les trois responsables ont affiché une unité de vue. Ils ont condamné les violations du droit humanitaire international et mis en garde contre les conséquences désastreuses de la guerre sur la situation humanitaire à Gaza, engendrées et encouragées par Israël.
C’est un changement de position important pour la France qui avait, dès le début du conflit, affiché son soutien à Israël, à l’instar des Etats-Unis et du Royaume-Uni. Mais, cette fois, Séjourné a rejoint ses homologues arabes pour s’opposer à toute attaque israélienne contre la ville de Rafah où environ 1,4 million de Palestiniens ont trouvé refuge.
Les ministres étaient unanimes à demander la mise en oeuvre des mesures provisoires réclamées par la Cour internationale de justice et à saluer le rôle crucial joué par l’UNRWA que Tel-Aviv tente de discréditer visant ainsi à mettre fin au droit de retour des réfugiés palestiniens.
La seule fausse note était la condamnation du Hamas par le ministre français, une allusion qui n’a pas trouvé d’écho chez les ministres arabes. « Nous n’accepterons pas la position américaine qui cherche à comparer la résistance palestinienne à Boko Haram, par exemple », a expliqué un diplomate arabe.
Mais Séjourné, dont le pays cherche à présenter une nouvelle résolution à l’ONU « pour restaurer un horizon politique », veut, à l’instar des pays arabes, faire avancer la solution à deux Etats. « La solution à deux Etats reste le chemin le plus viable vers une résolution globale du conflit », a-t-il dit.
Les pays arabes travaillent sur un projet de résolution visant à reconnaître la Palestine comme membre à part entière de l’ONU, explique le représentant de la Ligue arabe à l’ONU, Maged Abdel-Fattah, dans un entretien à l’Hebdo. Il n’est pas clair si Paris entend soutenir une telle approche ou simplement plaide pour un retour du processus de paix sur la base des accords ou résolutions précédents.
Lors de la conférence de presse conjointe, Séjourné a réitéré la décision du Quai d’Orsay d’étendre des sanctions sur les colons israéliens impliqués dans des violences contre les Palestiniens ; il s’agit pour l’instant de 28 colons. Il a promis de pousser pour engager des mesures au niveau européen. Il n’a cependant expliqué quel sera le sort ni des colons franco-israéliens, ni des soldats à double nationalité qui combattent aux côtés de l’armée israélienne à Gaza. Il ne s’est pas prononcé non plus sur la livraison d’armes qui s’est effectuée en octobre peu après le déclenchement de la guerre. Le ministre jordanien, lui, était explicite, affirmant que « la position de la France a beaucoup évolué » et a appelé à la cessation de la fourniture d’armes à Israël, exhortant la communauté internationale à adopter une résolution contraignante du Conseil de sécurité en vertu du chapitre VII de la Charte de l’ONU. Sameh Shoukry a aussi insisté sur « la responsabilité de la communauté internationale » d’arrêter « les crimes de guerre à Gaza ». « Il est de notre responsabilité collective d’agir rapidement pour prévenir de nouvelles souffrances et répondre aux besoins humanitaires urgents », a-t-il déclaré, alors que l’appel à un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza résonnait dans les déclarations des ministres.
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