Depuis des années, Gaza est une prison à ciel ouvert qui vit à la merci des aides extérieures. Avant la guerre déjà, 80 % de la population palestinienne de la bande de Gaza dépendait de l’aide internationale. Et depuis 2007, elle est soumise à un blocus total « qui a vidé son économie de toute substance », comme le résume la Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED). Aujourd’hui, elle est devenue une terre de ruines. Un désastre humanitaire qui se poursuit et qui s’accentue chaque jour, un symbole de l’impuissance, parfois mêlée de complaisance internationale.
A tel point que le secrétaire général des Nations-Unies, Antonio Guterres, a reconnu que l’inaction du Conseil de sécurité, qui a échoué à faire voter une résolution appelant à un cessez-le-feu humanitaire en raison d’un veto américain, sapait sa crédibilité. « J’ai exhorté le Conseil de sécurité à faire pression pour éviter une catastrophe humanitaire et j’ai réitéré mon appel pour qu’un cessez-le-feu humanitaire soit prononcé. Malheureusement, le Conseil de sécurité n’a pas réussi à le faire, mais cela ne le rend pas moins nécessaire. Je le promets : je ne renoncerai pas », a dit Guterres dimanche 10 décembre aux participants au Forum du Qatar qui rassemble des dirigeants du monde pour discuter de la sécurité collective et d’autres défis.
S’adressant également à la conférence au Qatar, le chef de l’Agence des Nations-Unies pour les réfugiés palestiniens (l’UNRWA), Philippe Lazzarini, a, lui, déclaré que la déshumanisation des Palestiniens a permis à la communauté internationale de tolérer la poursuite des bombardements israéliens sur Gaza, qui ont fait plus de 17 000 morts depuis le 7 octobre. « Il ne fait aucun doute qu’un cessez-le-feu humanitaire est nécessaire si nous voulons mettre fin dès maintenant à cet enfer à Gaza », a dit Lazzarini.
Le « SOS » de l’OMS
De son côté, le conseil exécutif de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a adopté, dimanche 10 décembre, une résolution réclamant une aide humanitaire immédiate pour Gaza. Seuls 14 hôpitaux sur 36 fonctionnent avec une capacité réduite dans le territoire bombardé par Israël, en réponse à l’attaque du Hamas, le 7 octobre. La résolution, proposée par l’Afghanistan, le Maroc, le Qatar et le Yémen, demande d’octroyer des autorisations de sortie aux patients, de fournir des médicaments et du matériel médical pour les civils et de permettre à toute personne privée de liberté d’avoir accès aux soins médicaux.
Avant l’adoption de la résolution, Tedros Adhanom Ghebreyesus, patron de l’OMS, a qualifié de « catastrophiques » les répercussions de la guerre sur la santé à Gaza. Les personnels « font de leur mieux » dans des conditions inimaginables. « Le système de santé du territoire palestinien est en train de s’effondrer. Dans le nord du territoire, sous les bombardements depuis des semaines, il n’y a plus que deux établissements de santé », a-t-il averti.
Depuis la fin de la trêve, de plus en plus de personnes se sont déplacées vers le sud, dans des zones de plus en plus réduites. « La surpopulation, combinée au manque de nourriture, d’eau, d’abris et d’assainissement adéquats, crée les conditions idéales à la propagation des maladies », a ajouté le patron de l’OMS. Il a fait état de signes inquiétants de maladies épidémiques qui risquent de s’aggraver avec la détérioration de la situation et l’arrivée des conditions hivernales. L’OMS a également relevé plus de 449 attaques contre des centres de santé à Gaza et en Cisjordanie occupée et 60 attaques contre des centres de santé en Israël depuis le 7 octobre.
(Photo : AFP)
« Le niveau de souffrance humaine est intolérable. Il est inacceptable que les civils n’aient aucun endroit sûr où aller à Gaza, et avec un siège militaire en place, il n’y a pas non plus de réponse humanitaire adéquate possible à l’heure actuelle », a de son côté déclaré Mirjana Spoljaric, présidente du Comité International de la Croix-Rouge (CICR). « Un très grand nombre de civils a été tué ou mutilé, dont des milliers d’enfants. Les maisons, les hôpitaux et d’autres infrastructures essentielles à la survie de la population civile ont subi des destructions colossales », a pour sa part confirmé Pascal Hundt, responsable des opérations du CICR à Gaza.
Quant à l’Unicef, elle a déploré, par sa directrice régionale pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Adèle Khodr, que Gaza était « l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant ». Près d’un million d’enfants ont été déplacés de force depuis le début du cycle de violence le 7 octobre. « Ils sont désormais poussés de plus en plus au sud, dans des zones minuscules et surpeuplées, sans eau ni nourriture ou protection, ce qui les expose à un risque accru d’infections respiratoires et de maladies d’origine hydrique », a prévenu Mme Khodr, ajoutant que « les restrictions et les difficultés imposées à l’acheminement de l’aide vitale à destination et à travers la bande de Gaza constituent une nouvelle condamnation à mort pour les enfants ».
Bref, toutes les organisations humanitaires présentes témoignent d’une situation catastrophique et affirment que la société civile est au bord de l’effondrement total à Gaza. Les femmes et les enfants dans l’enclave sont les plus touchés en termes de morts et de blessés alors que la population n’a nulle part où aller en sécurité.
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