Al-Ahram Hebdo : Ces élections étaient attendues depuis longtemps, mais suffisent-elles à sortir le Liban de la crise ?
Dr Rabha Allam : L’échéance électorale au Liban est certainement une étape importante, sinon cruciale, pour sortir le pays du passage difficile vécu depuis plus de deux ans. Néanmoins, ce n’est sûrement pas la garantie de retrouver la stabilité politique et économique du pays, puisqu’il faudra former un gouvernement qui devra avoir la confiance du nouveau parlement. Ceci ne sera pas une tâche facile vu la polarisation extrême qui marquera les formations politiques issues des élections. En fait, les divergences entre les clans politiques liées à la situation politique et économique sont énormes. Rappelons aussi que les nouveaux élus devraient se mettre d’accord sur un nouveau président dans un délai de quelques mois. Une tâche qui a toujours été très compliquée au Liban.
— Quels sont les dangers du vide sunnite ? Plus de puissance au Hezbollah ne va-t-il pas exacerber les tensions ?
— Le système électoral au Liban ne permet en aucun cas l’absence des forces politiques sunnites, puisque les électeurs ont toujours le choix entre des listes composées de candidats qui représentent toutes les confessions. Dans ce contexte, le boycott du Courant du Futur, présidé par l’ancien premier ministre, Saad Hariri, ne serait, à mon sens, qu’une tactique politique basée sur des calculs qui se projettent sur le long terme. En tout état de cause, les sunnites seront représentés au parlement avec le nombre exigé par la loi électorale et la Constitution libanaise. S’agissant de l’influence du Hezbollah, nous sommes encore loin de songer à un certain affaiblissement de son rôle dominant dans la vie politique libanaise.
— Certains prédisaient que le gouvernement allait annoncer la faillite du Liban après les législatives, qu’en est-il ?
— Je pense que la déclaration de faillite ne sera pas une option pour le nouveau gouvernement. Si la faillite d’un pays est définie par le défaut de paiement des dettes, alors, la faillite du Liban est déjà consommée depuis 2020. Le débat entre les candidats et les forces politiques porte essentiellement sur l’accord tant attendu avec le FMI qui devrait résulter d’un soutien international pour sortir le Liban de sa crise économique. Il ne reste pas moins que cet accord est difficile à conclure. De plus, tout accord sera naturellement accompagné de mesures d’austérité douloureuses. Ceci va être la tâche la plus explosive du futur gouvernement, quels que soient les résultats des élections.
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