
Le taux de participation de 41 % témoigne de la lassitude de nombreux Libanais face au verrouillage de la vie politique
Avec une participation de 41 %, contre 48 % en 2018, les électeurs libanais ont voté, dimanche 15 mai, dans le calme, aux premières législatives depuis le début de la crise socioéconomique qui agite le pays. Un faible taux de participation qui marque le désespoir d’une majorité de Libanais vis-à-vis d’une classe politique jugée défaillante. Ceux qui ont choisi de voter l’ont fait avec l’espoir de faire un changement et rompre avec la politique libanaise traditionnelle.
C’est le premier constat de ces élections (ndlr : les résultats définitifs n’étaient pas encore connus au moment de l’impression du journal). Le deuxième constat est un recul du Hezbollah. Selon les résultats provisoires en effet, le plus grand bloc parlementaire au Liban, mené par le Hezbollah, devrait perdre plusieurs sièges, et l’opposition réaliser une percée à l’Assemblée. Un coup dur pour le parti chiite qui, depuis des décennies, détient une forte emprise sur le pays, et son principal allié régional, l’Iran.
Axant sa campagne contre le Hezbollah, le parti chrétien des Forces Libanaises (FL) de Samir Geagea a engrangé des gains significatifs. Les FL, qui font partie de la classe politique en place depuis la fin de la guerre civile il y a 30 ans, pourrait devenir ainsi le premier parti chrétien, aux dépens du Courant Patriotique Libre (CPL) du président Michel Aoun, allié du Hezbollah. La formation obtiendrait quelque 20 sièges sur les 128 du parlement libanais. « Nous pouvons dire que le peuple libanais a sanctionné les partis au pouvoir et nous a rejoints, en exprimant sa volonté d’un nouveau départ », a déclaré à l’AFP Marc Saad, porteparole des FL.

Autre fait significatif, la percée des candidats indépendants dans plusieurs régions, notamment dans le Sud du Liban, bastion du puissant mouvement chiite.
En 2018, les législatives avaient été dominées par le Hezbollah et ses alliés, notamment le CPL Aoun et le mouvement chiite Amal, du président du Parlement Nabih Berri. De petites listes issues de la contestation populaire d’octobre 2019 ont également pu obtenir certains sièges.
Trois tests à venir
Or, si le tandem chiite Hezbollah-Amal conserve quasiment tous ses sièges, ce sont leurs alliés, les chrétiens du CPL et les Druzes du PSP, qui avaient permis depuis 2018 de former une majorité au Parlement, qui ont perdu des sièges. Par exemple, Talal Arslan, politicien druze et l’un des visages connus et alliés au Hezbollah, a perdu un siège qu’il occupait depuis trois décennies au profit d’un candidat de l’opposition. De même, la montée en puissance des FL a porté un coup à Gebran Bassil, aussi allié du Hezbollah, depuis longtemps pressenti pour succéder à son beau-père Michel Aoun, âgé de 88 ans. Les résultats des législatives pourraient donc avoir un impact sur la présidentielle prévue en novembre prochain (le poste de président de la République étant réservé à un chrétien maronite). Sans surprise, l’électorat sunnite est aussi perdant, fragilisé par l’absence du principal parti, le Courant du Futur de l’ancien premier ministre Saad Hariri qui a appelé au boycott.

Malgré ces changements, le prochain parlement sera constitué par les partis et les figures traditionnels. Avec le système électoral verrouillé en faveur des vieux partis confessionnels et le confessionnalisme qui domine la vie politique au Liban, le risque d’un blocage institutionnel au sein du parlement pèse, surtout avec l’absence du Courant du Futur de Saad Hariri, qui jouait un peu un rôle distinctif dans l’apaisement des tensions. Trois autres tests attendent le pays du Cèdre : le choix du premier ministre et la formation du gouvernement, l’élection du président du parlement, un poste réservé à un chiite, et la présidentielle.
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