Al-Ahram Hebdo : L’attaque houthie en sol émirati, la semaine dernière, représente-t-elle un tournant dans la crise yéménite ?
Tarek Fahmy : Depuis son déclenchement en mars 2015, la guerre au Yémen est une succession de vagues de combats et de vagues de calme précaire. Car chaque camp, d’un côté, les forces gouvernementales soutenues par la coalition dirigée par Riyad, de l’autre, les rebelles houthis soutenus par l’Iran, essaye d’augmenter ses gains et de garder le contrôle des régions entre ses mains. Mais sur le terrain, ils sont presque à pied d’égalité. Grâce au soutien iranien, les Houthis n’ont pas été vaincus. En même temps, la communauté internationale augmente ses pressions sur la coalition pour finir cette guerre pour plusieurs raisons : protéger les intérêts économiques et commerciaux dans la région, la catastrophe humanitaire et le fait que cette crise est une carte de pression dans les discussions sur le nucléaire iranien. Cette fois, la coalition et les forces gouvernementales ont voulu s’emparer de nouvelles zones contrôlées par les Houthis. Car la communauté internationale veut entamer des négociations entre les deux camps avec une médiation omanaise et koweïtienne. Mais les Houthis ont voulu prouver qu’ils sont forts et capables de viser des objectifs lointains. D’où l’attaque contre Abu-Dhabi. Cette attaque est une nouvelle forme de pression.
— Oui, mais on a l’impression que le conflit prend de l’ampleur malgré les tentatives de médiation …
— Si le conflit s’envenime, c’est parce qu’il y a eu des subdivisions dans les forces en présence. Par exemple, au début, les sudistes combattaient aux côtés des forces gouvernementales, mais par la suite, ils sont devenus un camp à part avec ses propres revendications. De même, les Houthis avaient fait des alliances avec certaines tribus, maintenant, ces dernières ont décidé de combattre seules, car elles ont aussi leurs revendications. Ceci complique la situation.
— Quels sont les scénarios attendus ?
— Il y a évidemment d’abord le règlement pacifique, mais pour cette sortie de crise, il faut un véritable engagement de la communauté internationale. Cette dernière doit renforcer ses pressions sur les deux puissances régionales rivales, l’Arabie saoudite et l’Iran. C’est à travers eux qu’un règlement est possible. L’autre scénario, c’est que l’un des camps l’emporte militairement. Dans ce cas, il posera ses conditions. Mais ce scénario est le plus difficile.
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