Des manifestations de soutien au gouvernement de Dbeibah ont eu lieu vendredi 24 septembre dans plusieurs villes de l’ouest libyen. (Photo : AFP)
Une réunion consacrée à la Libye s’est tenue mercredi 22 septembre à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations-Unies. Une autre est prévue le 12 novembre à Paris. Objectif: garantir la tenue des élections générales comme prévu le 24 décembre prochain et la mise en place du processus politique, afin de mettre fin à une décennie de troubles dans ce pays. Car si la communauté internationale bouge et tente d’éviter un échec du processus de règlement, c’est parce que la situation n’est pas des meilleures en Libye et que les doutes planent sur la possibilité de respecter l’échéance électorale.
En effet, rien ne va plus entre le gouvernement de Abdelhamid Dbeibah et le parlement:ce dernier a voté la semaine dernière une motion de censure contre le gouvernement, ce qui a suscité l’inquiétude de la communauté internationale et aggravé les tensions entre les protagonistes. Bien que les raisons directes de cette décision semblent encore floues, elle intervient sur fond de désaccords concernant la loi électorale et le calendrier de la tenue des prochaines élections générales du pays, fixées au mois de décembre 2021. La veille de son adoption en effet, le Haut Conseil d’Etat libyen (HCE), instance faisant office de Sénat basée à Tripoli (ouest), — qui a déclaré son « rejet de la procédure », considérant cette démarche comme « nulle » et « en violation de la Déclaration constitutionnelle et de l’accord politique » de 2015— a proposé un report d’au moins un an du scrutin présidentiel, faute de consensus sur la loi électorale.
En effet, la décision parlementaire est intervenue moins de deux semaines après la ratification par le président du parlement, Aguila Saleh, d’une loi électorale controversée favorisant l’homme fort de l’Est, Khalifa Haftar, sans être soumise à un vote, au grand dam des autorités de Tripoli. L’adoption de cette loi permet à Haftar de se porter candidat à la présidentielle et de pouvoir retrouver son poste militaire s’il n’était pas élu. D’ores et déjà, le maréchal Haftar, chef de l’armée nationale libyenne, s’est officiellement retiré de ses fonctions militaires de manière provisoire, un préalable à sa candidature à l’élection présidentielle du 24 décembre.
Scepticisme
Ces derniers développements viennent ajouter le scepticisme quant au respect de l’échéance électorale et la réussite du processus de transition. « Beaucoup d’espoir sont mis sur les élections présidentielle et législatives prévues le 24 décembre. La décision du parlement à ce moment menace non seulement la tenue de ces élections, mais aussi la stabilité du pays », estime Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques à l’Université du Caire. Pourtant, selon un comité de l’Onu qui vient de visiter le pays, tout est prêt pour le processus électoral, et l’Onu a présenté une aide financière et logistique aux autorités libyennes pour organiser les élections d’une façon correcte.
Mais pourquoi cette motion de censure maintenant et quels seront ses effets? Politiquement, cette décision est sans effet, car le gouvernement poursuivra ses travaux jusqu’à la tenue des élections. Car, en dépit de la motion de censure, le cabinet actuel ne sera pas remplacé, mais devient un « gouvernement chargé d’expédier les affaires courantes ». Et après les élections— si elles ont lieu— le gouvernement actuel va naturellement démissionner. Mais pour l’analyste, si cette décision ne change rien maintenant, elle risque de donner lieu à plus de tensions entre les différents protagonistes, voire de « provoquer des accrochages entre les milices armées ».
Pourtant, après la fin des combats à l’été 2020 entre les deux camps rivaux, un gouvernement unifié et transitoire dirigé par Dbeibah avait été formé en mars pour mener la transition. La formation de ce cabinet au terme d’un processus politique parrainé par l’Onu avait offert une lueur d’espoir. Ce gouvernement a été chargé par 75 personnalités libyennes de tous bords, réunies sous l’égide de l’Onu, d’unifier les institutions et d’achever l’interminable transition politique, en organisant des élections législatives et présidentielle le 24 décembre. Au côté d’un Conseil présidentiel composé de trois membres, il avait été chargé de sortir le pays d’un conflit internationalisé et de mener à bien la transition. Mais depuis, le parlement n’a jamais organisé de vote sur le budget du gouvernement, tandis que les divisions ont rapidement refait surface.
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