Après des négociations serrées, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a arraché aux Israéliens et aux Palestiniens un accord ouvrant la voie à une reprise des pourparlers de paix, abandonnés depuis 3 ans. Kerry a annoncé, cette semaine à Amman, un accord qui établit la base d’une reprise des négociations, sans plus de détails, renvoyant à des discussions, la semaine prochaine à Washington, avec le négociateur palestinien, Saëb Erakat, et la ministre israélienne en charge de ce dossier, Tzipi Livni.
En première réaction, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a affirmé que « la reprise du processus de paix est dans l’intérêt stratégique de l’Etat d’Israël. Il est en soi important de tenter de mettre fin au conflit entre nous et les Palestiniens, et il est important en raison des défis auxquels nous sommes confrontés, en particulier l’Iran et la Syrie ». L’annonce de cet accord suscite, toutefois, un scepticisme quasi général parmi les responsables et les médias israéliens. Ces doutes portent sur les chances de parvenir à un accord de paix définitif et à la création d’un Etat palestinien lors des discussions. Netanyahu a, en effet, affirmé qu’Israël voulait empêcher l’établissement d’un Etat binational qui menacerait l’avenir de l’Etat juif, et empêcher l’établissement à l’intérieur des frontières d’un autre Etat terroriste, parrainé par l’Iran. Selon les médias, Netanyahu se serait contenté d’accepter de ne pas lancer de nouveaux appels d’offres pour la construction de logements dans les colonies juives, tout en permettant la poursuite des travaux dans les chantiers en cours. Pour rassurer les Israéliens, le chef du gouvernement a réaffirmé son intention de soumettre à un référendum tout accord qui pourrait être conclu avec les Palestiniens.
Dans un geste de bonne volonté, des responsables israéliens avaient annoncé la prochaine libération de prisonniers palestiniens à la suite de l’accord. « Il y aura un nombre limité de libération de prisonniers », a déclaré le ministre des Relations internationales, Youval Steinitz, soulignant que cette mesure bénéficierait à des Palestiniens détenus depuis avant les accords de paix d’Oslo de 1993, une exigence centrale du président palestinien, Mahmoud Abbas. Le ministre Steinitz a néanmoins affirmé qu’aucun accord n’avait été conclu sur un gel de la colonisation ou une référence aux lignes de 1967, principales revendications palestiniennes.
Détails à régler
Quant aux Palestiniens, la présidence a salué l’accord avec circonspection, prévenant qu’il restait des détails spécifiques à régler, espérant que tout se passera bien. « Les dirigeants palestiniens se sont engagés à négocier sérieusement au moins 9 mois, pendant lesquels ils continueraient à s’abstenir de toute démarche d’adhésion à des organisations internationales, y compris aux instances judiciaires habilitées à poursuivre Israël », a affirmé Steinitz.
Les dernières négociations de paix ont très rapidement achoppé sur la poursuite de la colonisation israélienne à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. Livni a assuré qu’il n’y avait pas de conditions préalables et que « tout sera sur la table » des négociations, y compris les frontières de 1967 et Jérusalem-Est, dont les Palestiniens veulent faire la capitale de leur futur Etat .
L’objection des mouvements palestiniens
Le Hamas, au pouvoir à Gaza, a rejeté la reprise des négociations, réaffirmant que « Abbas n’a aucune légitimité pour négocier au nom du peuple palestinien sur des questions fondamentales ». Une déclaration qui montre les divergences entre les partis palestiniens. Ces derniers se montraient ouvertement critiques, faisant voeu de ne pas retomber dans le piège d’Oslo, en référence aux accords de paix de 1993. Le mouvement du député indépendant, Moustapha Barghouthi, a rejeté des pourparlers qui seraient une perte de temps et offriraient une couverture au gouvernement Netanyahu sans référence claire aux frontières antérieures au début de l’occupation israélienne en 1967 et un arrêt total de la colonisation. « L’expérience de 20 ans de négociations suffit pour prouver que c’était une erreur de signer les accords d’Oslo avant un arrêt de la colonisation, le nombre de colons dans les territoires occupés étant passé depuis de 150 000 à 600 000 », remarque le porte-parole du mouvement. Partageant le même avis, le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP, gauche nationaliste) avertit également que retourner aux négociations hors du cadre des Nations-Unies et de leurs résolutions reviendrait à un suicide politique. Le FPLP exhorte la direction palestinienne à relancer ses démarches à l’Onu, suspendues à la demande de Washington, au lieu de soumettre les droits palestiniens garantis par le droit international à des compromis et des paris futiles qui ont échoué encore et encore. « Accepter un retour aux négociations aujourd’hui équivaudrait, pour la direction palestinienne, à un suicide politique et ne changerait pas les circonstances qui l’ont amenée à le refuser auparavant », a déclaré l’analyste politique palestinien, Hani Al-Masri .
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